dimanche, octobre 19, 2008

Le coût de la rétention et de l'éloignement des étrangers

Le budget 2009 prévoit 42 millions d'euros pour les expulsions de sans-papiers

Le coût moyen d'une reconduite à la frontière est estimé à 2 186 euros selon le programme "immigration et asile" du projet de loi de finances présenté par le ministère du budget.

La prévision de crédits pour parvenir à l'objectif de 26 000 reconduites à la frontière d'étrangers en situation irrégulière s'élève à 42 millions d'euros, selon le programme "immigration et asile" du projet de loi de finances 2009, présenté le 26 septembre par le ministre du budget Eric Woerth.

Le texte précise par ailleurs qu'"il apparaît qu'avec 17 210 reconduites au 30 juin 2008, l'objectif [de 26 000 reconduites à la frontière] sera dépassé pour l'année". En ce qui concerne les mesures d'éloignement, la prévision de crédits est de 42 millions d'euros, avec 39 millions pour les frais de billetterie (le coût moyen d'un billet étant estimé à 1 500 euros) et 3 millions pour la location d'avions. Le montant moyen d'une expulsion est ainsi évalué à 2 186 euros.

BUDGET EN BAISSE POUR LE MINISTÈRE DE L'IMMIGRATION

Pour la rétention administrative, le montant de la dotation prévue pour 2009 est de 28,8 millions d'euros. A la mi-année, 1 538 places étaient gérées par la police et 434 par la gendarmerie, 2 030 places au total étant prévues pour 2009. Le coût moyen d'une place en rétention est de 38,84 euros par jour.

Par ailleurs, le coût estimé du nouvel appel d'offres lancé par le gouvernement pour les missions d'information et d'assistance juridique dans les centres de rétention est de 15 millions d'euros sur trois ans. Le marché public actuel, souscrit avec l'association Cimade, était, dans la loi de finances 2008, d'un montant de 4,56 millions d'euros, soit 57 790 euros par intervenant de la Cimade.

Le programme "immigration et asile" est globalement doté de 436 millions dans le projet de loi de finances 2009, lequel prévoit une enveloppe globale de 513,8 millions d'euros pour le ministère de l'immigration, soit une forte baisse (de 96,2 millions, - 15,7 %) par rapport à l'année passée, qui avait vu la création du ministère.

Le Monde.fr et AFP

Enquête sur les guichets de l'immigration

Sans-papiers, identité nationale… Le thème de l'immigration est plus que jamais un objet de polémiques. Pas facile, dans ces conditions, de travailler sereinement sur ce sujet. Sociologue, chercheur au CNRS, Alexis Spire a 35 ans et a rédigé une thèse sur l'administration de l'immigration. Dans son livre, Accueillir ou reconduire. Enquête sur les guichets de l'immigration (Raisons d'agir Ed.), il propose une histoire de l'immigration par en bas, vue des guichets de préfecture. A ses yeux, il est possible de conjuguer vocation scientifique et engagement politique.

"Accueillir ou reconduire. Enquête sur les guichets de l'immigration", d'Alexis Spire : "Moi, je fais mon chiffre et rien que mon chiffre"

Jour ordinaire en préfecture : un agent d'accueil s'apprête à enregistrer la demande d'asile d'une grand-mère sri-lankaise. Le guichetier a jugé le dossier complet. La vérificatrice intervient, vociférant : "C'est du regroupement familial, ce n'est pas de l'asile ! Ce n'est pas la peine d'attendre, on ne vous croira pas", assène-t-elle, envoyant le dossier voler en l'air.

Le sociologue Alexis Spire nous plonge dans l'univers des guichets de préfectures, directions départementales du travail et services des visas des consulats. Fondé sur plusieurs enquêtes menées entre 2003 et 2007, ce livre met en lumière l'action de ceux qui, dans les coulisses de l'administration, "font" la politique de l'immigration.

Chacun à son niveau, ces agents interviennent sur les conditions d'entrée en France, sélectionnent les migrants les plus "utiles" aux entreprises, et décident lesquels pourront rester sur le territoire. Les étrangers se trouvent ainsi face à des représentants de l'Etat qui peuvent choisir de les régulariser ou de les expulser, sans déroger à une législation qui, au fil des réformes successives, leur laisse de plus en plus de liberté.

Ainsi les titres délivrés hier de plein droit sont-ils désormais remplacés par des dispositifs accordant un pouvoir discrétionnaire aux échelons locaux. Et ce sur fond d'imprécision croissante des critères juridiques. En fonction de ce qu'il considère comme une "bonne" intégration, l'agent peut décider d'accorder à l'étranger un statut stable de résident ou de le maintenir dans la précarité. "Une telle évolution n'est pas anodine, relève Alexis Spire : elle constitue pour le pouvoir politique le seul moyen de concilier des pratiques juridiques apparemment respectueuses des droits fondamentaux et des pratiques de plus en plus répressives à l'égard des étrangers."

On aurait tort, cependant, de soupçonner ces fonctionnaires de racisme. Les services des étrangers ne suscitent guère de vocations, beaucoup se retrouvent à ces postes sans l'avoir choisi. Ces agents ne bénéficient d'aucune formation spécifique, ni même de stage centré sur les techniques d'accueil et de gestion des conflits. Ils s'en remettent à leurs collègues qui ont eux-mêmes appris "sur le tas", et aux normes édictées par les agents intermédiaires, lesquels privilégient des critères de rendement. "Largement impulsée par les gouvernants et les hauts fonctionnaires, la traque de la fraude - des "faux touristes", "faux demandeurs d'asile", "faux mariages" - devient l'obsession fédératrice des agents", observe Spire. Et la "politique du chiffre" ne fait que renforcer la suspicion.

Il y a bien quelques réfractaires qui plaident pour une écoute plus attentive, une instruction plus approfondie de chaque dossier. Certains réussissent à partir, mais les autres finissent par s'habituer. "Avec le temps, on s'endurcit", dit une fonctionnaire. Et la grande majorité des agents se montrent indifférents : ils ne résistent ni n'adhèrent véritablement aux normes qui leur sont inculquées. "Issus du monde ouvrier ou des petits employés, ils conçoivent l'activité de maintien de l'ordre comme n'importe quel autre métier, ils s'y consacrent sans éprouver ni passion ni scrupule et se conforment de façon pragmatique aux injonctions de la hiérarchie. Ils ne s'embarrassent d'aucune considération morale ou politique", explique Alexis Spire. "Moi, je fais mon chiffre et rien que mon chiffre", résume l'un d'entre eux.

ACCUEILLIR OU RECONDUIRE. ENQUÊTE SUR LES GUICHETS DE L'IMMIGRATION d'Alexis Spire. Ed. Raisons d'agir, 124 p., 7 €.

Voici des extraits

Introduction

La politique d'immigration a connu, durant les trente dernières années, d'incessantes réformes législatives. Au nom de la « maîtrise des flux migratoires », des mesures toujours plus restrictives ont été adoptées, encouragées bien souvent par des directives européennes. Mais, depuis 2003, le durcissement s'est transformé en acharnement : en à peine cinq ans, la loi a été modifiée à quatre reprises, toujours dans le même sens : précarisation du séjour des étrangers et renforcement de la lutte contre l'immigration irrégulière.

La fixation d'objectifs chiffrés toujours plus élevés pour les reconduites à la frontière a donné lieu à de nouvelles pratiques : à la fin de l'année 2003, le placement d'enfants en centre de rétention, jusque-là exceptionnel, devient monnaie courante. L'année suivante, plusieurs familles sont arrêtées après l'intervention de policiers à l'inté—rieur d'établissements scolaires. Dans le même temps, les con—trôles d'identité et les arrestations massives se multiplient dans les quartiers à forte population étrangère. La course aux chiffres a pour conséquence la mise en place de véritables pièges : en juillet 2004, plusieurs demandeurs d'asile sont arrêtés au guichet de la préfecture de Paris alors qu'ils y avaient été convoqués pour un réexamen de leur situation administrative. Le 9 août 2007, à Amiens, un jeune garçon de douze ans tombe d'un balcon du quatrième étage en tentant d'échapper à des policiers venus appréhender sa famille. Au total, le nombre d'étrangers arrêtés pour infraction à la législation sur le séjour est passé de 62 233 en 2002 à 111 842 en 2007, soit une augmentation de 80 %.

Cette spirale répressive place les responsables politiques qui l'ont engagée face à une série de contradictions : comment exiger toujours plus de résultats en matière de lutte contre l'immigration irrégulière, tout en se déclarant fidèle aux normes établies par le droit international ? Comment préconiser une baisse des demandes d'asile, stigmatisées comme « immigration subie », tout en restant signataire de la convention de Genève ? Comment restreindre de façon drastique l'immigration familiale sans remettre en cause le principe du droit à mener une vie familiale normale, inscrit dans la convention européenne des droits de l'homme ? Pour résoudre ces contradictions, les gouvernements successifs ont construit une politique en trompe-l'œil : d'un côté, ils adoptent des lois répressives qui respectent en apparence les droits fondamentaux mais, de l'autre, ils délèguent aux fractions subalternes de l'Administration le soin de rendre ces droits inopérants. C'est ce qu'on pourrait appeler la « politique des guichets ». Les discours qui accompagnent ces nouvelles réformes peuvent ainsi garder l'apparence de l'équilibre (« sévère et digne », « ferme et humaine »), tout en dissimulant les conséquences concrètes de leur mise en œuvre. Pour dévoiler cette sphère méconnue de la politique d'immigration, il faut déplacer le regard, des discours aux pratiques, et des principes juridiques à leur application.

Faisant la synthèse de plusieurs enquêtes menées entre 2003 et 2007 dans des préfectures, des directions départementales du travail et dans un service d'attribution de visas d'un consulat de France en Afrique, ce livre met en lumière l'action de ceux qui, dans les coulisses de l'Administration, conduisent la politique des guichets. Les coulisses sont des lieux où se fabriquent les illusions et les représentations « afin que le public ne puisse pas comparer le traitement qu'on lui a accordé avec celui qu'on aurait pu lui accorder. » Dans le domaine de la politique d'immigration, le rôle dévolu aux interprètes des directives gouvernementales est crucial. Ils entretiennent auprès de tous les étrangers demandeurs de titres un climat d'insécurité juridique qui constitue la plus sûre garantie de leur docilité. Lorsqu'un étranger se rend au guichet pour y demander une régularisation ou le renouvellement d'une carte temporaire, il n'a aucun moyen de savoir s'il va en ressortir avec un titre de séjour, une convocation, ou une invitation à quitter le territoire. En focalisant leur attention sur la lutte contre l'immigration irrégulière, les responsables politiques sont parvenus à imposer une suspicion qui pèse sur tous les étrangers demandeurs de titres et qui s'étend à tous ceux qui hébergent, aident ou soutiennent des sans-papiers.

L'arsenal législatif visant à renforcer le contrôle de l'immigration est allé de pair avec le développement de dispo—sitifs donnant de plus en plus de pouvoir aux échelons locaux. Plusieurs catégories d'étrangers (parents d'enfants français, conjoints de Français et membres de familles étrangères) ne peuvent plus prétendre à l'accès de plein droit à la carte de dix ans et doivent désormais se soumettre à une condition d'intégration dont l'appréciation est laissée aux agents de préfecture.

L'objectif de promouvoir une « immigration choisie » est également placé sous le signe du pouvoir discrétionnaire des échelons subalternes. Selon la loi de juillet 2006, ce sont les agents des directions départementales du travail qui ont le pouvoir de décider si la profession demandée répond localement aux besoins de main-d'œuvre. Ils peuvent également moduler la durée de l'autorisation en fonction de la nature du contrat de travail ou de la conjoncture économique du département. Ils sont ainsi en mesure de contraindre les étrangers à s'orienter vers tel ou tel secteur, en les assignant à un statut de séjour précaire et en les plaçant du même coup sous la dépendance étroite de leur employeur. Il en est de même pour les étudiants étrangers qui souhaitent poursuivre leur cursus en France ; leur admission sur le territoire ne dépend plus seulement de leur inscription dans une université française : ils doivent se soumettre à un entretien individuel mené par un agent des centres pour les études en France (CEF), qui les évalue en fonction de critères aussi vagues que le « projet d'études » ou le « parcours académique », mais également selon l'intérêt qu'ils présentent pour l'économie française.

L'extension du pouvoir discrétionnaire affecte donc toutes les administrations chargées du contrôle de l'immigration et concerne un nombre toujours plus important de décisions : chaque année, plus de 2 millions de visas sont délivrés dans les postes consulaires, plus de 660 000 titres de séjour dans les préfectures, et environ 20 000 autori—sations de travail dans les directions départementales de l'emploi et de la main-d'œuvre. Les hommes et les femmes affectés dans ces services ont une mission commune : s'assurer que chaque droit consenti à un étranger ne constitue pas une menace pour le maintien de l'ordre politique, économique et social. Cette exigence d'ordre, qui renvoie ici à un ordre national, structure les pratiques de ceux qui représentent l'État face à des étrangers demandeurs de titres. Comme les policiers, les agents du maintien de l'ordre national disposent d'une grande autonomie dans leur activité professionnelle. Cependant, leur spécialisation dans le contrôle de l'immigration les en distingue par plusieurs aspects. Leurs services sont à la fois stigmatisés en raison du statut des usagers qu'on y reçoit et relativement appréciés en raison du pouvoir qu'on y détient.

L'observation de ces agents au travail incite à rompre avec deux idées préconçues. L'une, largement répandue parmi ceux qui les fréquentent en tant qu'usagers, consiste à penser que ces fonctionnaires sont forcément racistes ou prédisposés à l'être ; on verra au contraire que beaucoup se retrouvent à ces postes sans l'avoir choisi. L'autre, davantage diffusée au sein de l'Administration, réside dans la croyance qu'ils ne font qu'appliquer la loi ; en réalité, leur marge de manœuvre est importante et dépend étroitement des instructions de chaque chef de bureau. Les itinéraires individuels de celles et ceux qui composent ces services sont multiples, mais ils sont soumis à un même conditionnement, destiné à leur inculquer une certaine vision de l'immigration plutôt qu'une connaissance des règles de droit à appliquer. Si les agents adhèrent dans l'ensemble à un même objectif de maintien de l'ordre national, ils ne conçoivent pas tous leur mission de la même façon. En me faisant embaucher comme « guichetier vacataire » dans un service préfectoral, j'ai pu acquérir une connaissance intime de leurs trajectoires biographiques, de leurs croyances et de leurs doutes. Selon leurs représentations et leur position dans le service, ils réa—gissent différemment aux injonctions de leur hiérarchie et peuvent prendre des décisions très variables d'un étranger à l'autre. Dans cette configuration, l'introduction d'indicateurs de performance en matière de traitement des dossiers puis en matière de reconduite à la frontière a contribué à faire prévaloir les critères d'efficacité au détriment de toute autre considération. La focalisation autour de la lutte contre l'immigration irrégulière a même débouché sur l'enrôlement d'autres fonctionnaires : médecins inspecteurs de santé publique, travailleurs sociaux, contrôleurs du travail ou employés de l'ANPE sont de plus en plus souvent sollicités pour débusquer les sans-papiers, alors que leurs missions traditionnelles sont très éloignées d'un tel objectif.

Dans la période récente, de nombreux travaux se sont employés à dévoiler les présupposés des discours politiques qui visent à réduire l'immigration à la menace qu'elle ferait peser sur l'identité nationale. De fait, la bataille engagée au plus haut sommet de l'État contre les étrangers est d'abord une lutte idéologique qui consiste à mobiliser à la fois l'opinion et les agents de l'État contre un ennemi commode et consensuel. Certes, elle permet de focaliser l'attention du débat public, au détriment d'autres questions économiques et sociales touchant au marché du travail ou à l'évolution des inégalités. Mais elle a aussi des conséquences pratiques considérables. Pour les étrangers, qui sont les premiers visés, elle se traduit par une insécurité juridique qui les rend d'autant plus vulnérables. Sur le plan économique, la précarisation des conditions de séjour rend possible le recrutement d'une « immigration choisie » et corvéable au gré des besoins des entreprises. L'acharnement contre l'immigration irrégulière a également des effets sur l'activité des agents qui doivent le mettre en œuvre au quotidien. Les enquêtes restituées dans ce livre montrent que les pratiques de ces soutiers de l'État recouvrent d'autres réalités que celles qui sont habituellement présentées dans les débats sur l'immigration.

Chapitre 2
L'adhésion au maintien de l'ordre national

Il existe un socle de croyances communes aux services des visas des consulats, aux guichets des préfectures et à ceux du ministère du Travail : leurs agents appliquent tous des règles établies au nom de l'intérêt national. La solidarité qui les relie entre eux repose sur la conscience de représenter l'État et sur la conviction d'être investis d'une mission de maintien de l'ordre mêlant plusieurs impératifs :
– l'ordre public vise à lutter contre toute forme de fraude ;
– l'ordre moral repose sur la stigmatisation des étrangers qui « abusent » des prestations et menacent ainsi le « modèle social » français ;
– l'ordre économique consiste à distinguer d'un côté les étrangers « utiles » au marché du travail et de l'autre les « indésirables ».

Toutes ces dimensions participent d'un même objectif de maintien de l'ordre national. Pourtant, les agents qui rejoignent les services chargés du contrôle de l'immigration ne sont pas prédisposés à adhérer à un tel objectif. À la différence des autres métiers de police, l'administration des étrangers ne suscite que très rarement des vocations : les agents y arrivent soit par hasard, soit en y ayant été contraints. On peut donc se demander comment se fabrique la cohésion idéologique qui semble se dégager des services des visas, des guichets de préfecture et des bureaux de main-d'œuvre étrangère. Certes, elle découle en partie des représentations de l'immigration véhiculées par les personnalités politiques et les médias ; mais elle tient surtout à la capacité des personnels d'encadrement à faire adhérer des individus venus d'horizons différents à un ensemble de normes qui permettent d'orienter les pratiques autrement que par le droit.

Un apprentissage sur le tas

Les agents des services d'immigration ne bénéficient d'aucune formation spécifique, ni même de stage centré sur les techniques d'accueil et de gestion des conflits comme il en existe dans d'autres administrations. La compétence associée au travail de réception et d'instruction des dossiers s'acquiert au terme d'une période d'apprentissage qui, reposant sur une défiance à l'égard de l'écrit, consiste à imiter les pratiques des collègues déjà en poste. Cette forme de socialisation professionnelle est commune à nombre d'emplois non qualifiés. Elle comporte ici une dimension supplémentaire : l'enjeu n'est pas seulement d'apprendre des règles de procédure mais d'incorporer un tempérament, autrement dit d'adopter une manière de se comporter, assimilable à des automatismes corporels. Ce qu'on apprend d'abord et avant tout, c'est une manière de concevoir et de recevoir les étrangers.

L'apprentissage du travail de guichet va de pair avec la découverte d'une forme d'interaction structurée par un souci de « maintien de l'ordre » plutôt que par celui de fournir une prestation ou d'accorder un quelconque droit. Cette posture exige l'abandon de formes policées d'échange au profit de pratiques plus agressives, considérées comme l'unique moyen de répondre à la « pression » exercée par les demandeurs.

Les premiers temps passés au guichet s'apparentent à la période des classes du service militaire, ce moment tran—sitoire marqué par la « substitution d'un habitus réglé à un habitus laxiste ». La formation des nouvelles recrues débute par la découverte de comportements et de manières d'être devenus naturels chez les autres agents en poste depuis plus longtemps. Pour les anciens, l'usage de formules expéditives se justifie par la tension permanente qu'engendre le nombre considérable d'étrangers qui attendent à l'extérieur, puis devant les guichets. En cas de débordements ou de réactions d'agressivité émanant d'étrangers exaspérés par l'attente, les plus expérimentés savent aussi déployer diverses stratégies pour désamorcer les risques de conflit et apaiser les mécontents. Le moindre incident est alors l'occasion de faire œuvre de pédagogie auprès des agents les plus récemment recrutés. Dans les préfectures, l'enseignement de la gestion des situations difficiles repose sur une culture de la méfiance, systématiquement opposée à la « naïveté » des plus jeunes recrues. Certains nouveaux venus, hostiles à ce type de représentation associant immigration et démarche frauduleuse, choisissent délibérément l'interprétation de la règle la plus favorable à l'étranger. Mais un tel parti pris ne peut être que transitoire car ces agents, faute d'être en mesure de distinguer ce qui relève des règles de droit et ce qui découle de normes bureaucratiques, sont contraints de s'en remettre aux « conseils » de leurs supérieurs. Comme chaque procédure est encadrée par de multiples règles de droit, cette faible qualification est durement ressentie :
« On a toujours l'impression de naviguer à vue dans un bateau sans pilote ; on n'est pas au courant du droit ni des circulaires qui sortent et, en plus, on est isolés du reste de la préfecture. Lorsqu'on demande des stages, on met un an à les obtenir, et encore, ce ne sont pas toujours ceux qu'on a demandés… »
Entretien avec un agent de préfecture en poste depuis 1997, 6 juillet 2003.

Ne disposant d'aucun support écrit, les guichetiers ne peuvent évaluer leur action à l'aune d'une quelconque référence au droit. L'absence de formation juridique les contraint à s'en remettre aux normes édictées par les agents intermédiaires, qui privilégient des critères de rendement et d'efficacité sur toute autre considération. Ils se trouvent donc contraints de se référer à des routines bureaucratiques qui ont été élaborées par leur hiérarchie et dont ils ne maîtrisent ni la signification ni la portée. Dans les services de main-d'œuvre étrangère du ministère du Travail, qui comptent un nombre beaucoup plus limité d'agents, la formation consiste pour les nouvelles recrues à faire un stage en préfecture pour y apprendre les rudiments de la procédure :
« Je suis arrivée à ce poste en 2001 pour remplacer une collègue qui partait à la retraite. Comme elle était souffrante, elle n'a pas pu me former, donc je me suis formée toute seule. Heureusement, j'ai tout de suite eu de très bonnes relations avec la préfecture. Ils m'ont pas mal aidée, parce que je ne connaissais pas, moi, tous les titres de séjour : c'est une réglementation compliquée. Et d'ailleurs, je me suis rendu compte après, quand j'étais en formation avec les autres employés des autres directions départementales, qu'il y avait de grandes différences de pratiques d'un département à l'autre. De toute façon, j'avais déjà commencé à travailler depuis pas mal de temps quand j'ai eu cette formation. »
Entretien avec une rédactrice d'une direction départementale du travail depuis 2001, 8 décembre 2004.

Faute d'être formée par un collègue connaissant les procédures, cette employée du service de la main-d'œuvre étrangère est contrainte de s'en remettre à un savoir-faire préfectoral. Une telle situation de dépendance n'est pas sans conséquence sur la nature des décisions prises. Au contact des agents de la préfecture, les fonctionnaires du ministère du Travail nouvellement recrutés n'apprennent pas seulement des règles formelles : ils s'imprègnent également d'un tempérament dont ils peuvent s'inspirer ou s'écarter par la suite. L'absence de formation adaptée et l'apprentissage sur le tas ont ainsi pour effet de placer l'institution préfectorale en position de pôle de référence et d'assurer la diffusion de pratiques restrictives. L'évolution du traitement des étudiants étrangers souhaitant changer de statut en est une illustration. Depuis la loi de juillet 1984, les étudiants étrangers obtenant un changement de statut recevaient systématiquement une carte de séjour d'un an portant la mention « salarié ». Mais, à partir du début des années 1990, les agents du ministère du Travail ont, sous l'influence des préfectures, généralisé les cas de délivrance d'autorisations provisoires de travail dont la durée correspond strictement à celle du contrat de travail. Par voie de conséquence, ces anciens étudiants étrangers – souvent embauchés comme vacataires dans des administrations publiques – ont obtenu des titres de séjour toujours plus provisoires. Une telle évolution a eu pour effet de les placer dans une situation de subordination accrue vis-à-vis des employeurs, en conditionnant systématiquement leur autorisation de séjour à la durée de leur contrat de travail.

La diffusion de telles normes restrictives s'inscrit dans un mouvement plus général de précarisation des conditions de séjour des étrangers. Le bénéfice d'un statut stable, matérialisé par la carte de résident de dix ans, est désormais systématiquement reporté dans le temps et soumis au pouvoir discrétionnaire des agents de préfecture, qui préfèrent délivrer des cartes temporaires. Ainsi, le nombre d'étrangers accédant pour la première fois à une carte de dix ans est passé de 39 697 en 2003 à 24 133 en 200625, soit une baisse de 60 %. Ce primat du provisoire est un moyen de rappeler à l'étranger qu'il n'est pas un sujet de droit et de mettre à l'épreuve sa volonté de se maintenir sur le territoire.

L'adhésion au maintien de l'ordre national ne résulte donc ni d'une formation spécifique ni d'instructions écrites ; elle provient davantage d'un apprentissage quotidien de normes pratiques qui se diffusent au sein d'un même bureau et d'un service à l'autre. L'existence de cet horizon commun n'exclut pas des différences entre agents, qui tiennent en particulier à leur trajectoire, à leur autonomie par rapport à la hiérarchie et à la représentation qu'ils se font de leur mission.

« Eux » et « nous »

L'enrôlement des agents autour de l'objectif de maintien de l'ordre national ne se limite pas à l'apprentissage de normes bureaucratiques ni même à l'incorporation d'un tempérament. Il suppose également des supports d'identification qui dépassent largement le seul cadre de travail et qui se transmettent durant les pauses et lors de tous les échanges qui se déroulent à l'extérieur de la sphère professionnelle. En effet, les agents ne sont pas seulement soumis à la vision du monde que leur inculque leur hiérarchie, ils sont aussi influencés par les discours politiques et plus encore par les représentations véhiculées dans le champ médiatique. La télévision joue désormais le rôle que tenait auparavant la presse écrite dans le processus de construction d'un sens commun sur l'immigration : depuis le début des années 1980, les polémiques médiatiques sur les banlieues, sur l'intégration ou sur la place des musulmans dans la société française ont ainsi contribué à entretenir et à figer une représentation du monde structurée autour de l'opposition entre « nous les Français » et « eux les étrangers ».

Aux guichets des services d'immigration, l'opposition entre « nous les Français » et « eux les étrangers » constitue d'abord un support d'identification qui garantit la cohésion du groupe des agents, en dépit des différences internes et des conflits qui le traversent. Richard Hoggart a montré que, pour les classes populaires, le monde des « autres » revêt plusieurs visages et englobe à la fois les patrons mais aussi les fonctionnaires et, plus généralement, tous ceux qui sont perçus comme différents et hostiles. Cette analyse pourrait tout à fait être transposée aux agents du maintien de l'ordre national, qui se définissent eux aussi par opposition à ceux qu'ils rejettent comme extérieurs à leur monde. À la conscience d'être français s'ajoute l'honneur d'appartenir à une administration d'État que l'on retrouve chez bien d'autres catégories de fonctionnaires. Dans le cas particulier du contrôle de l'immigration, l'opposition entre « eux » et « nous » est renforcée par le sentiment d'incarner l'État et son autorité auprès d'usagers suspectés d'en menacer l'intégrité. De plus, la conviction de former une véritable communauté de collègues est renforcée par le sentiment de devoir partager des conditions de travail difficiles. Le conseil le plus fréquemment adressé aux nouveaux venus est de se tenir à distance des étrangers, c'est-à-dire de se méfier de leurs arguments, et de ne pas leur divulguer trop d'informations au sujet du déroulement de la procédure. Réduire au minimum l'échange verbal peut aussi être un moyen de faire face à un afflux trop important de demandes, comme l'explique ce jeune guichetier :
« Au début, tu parles, tu prends le temps d'expliquer que, même s'ils ont été convoqués aujourd'hui, on ne peut pas les recevoir car on a déjà trop de monde… et puis, en fin de compte, tu t'aperçois que plus tu parles, plus ils te parlent, plus ils essaient de négocier, et alors là, ça devient l'enfer parce que tu n'arrives plus à les refouler ; alors, après tu ne te prends plus la tête, tu dis : Fini pour aujourd'hui, ciao, bye-bye , et ils comprennent très bien ; ça va beaucoup plus vite et c'est plus efficace. »
Entretien avec un vacataire affecté en préfecturedepuis onze mois, 11 juillet 2003.

Le travail de mise à distance, tel qu'il est explicité ici, se trouve renforcé par la barrière de la langue et l'absence de traducteur : la plupart des agents ne parlent aucune langue étrangère et ont de surcroît pour instruction de ne s'exprimer qu'en français. Dans les services des visas des postes consulaires, les guichetières parlent parfaitement la langue des demandeurs mais ont pour consigne de ne pas en faire état. Au-delà de la barrière de la langue, la mise à distance est un moyen de contenir les demandes trop insistantes et d'éviter tout dialogue, comme le font d'autres professionnels du maintien de l'ordre. Pour un guichetier vacataire particulièrement exposé aux contraintes de rendement imposées par la hiérarchie, le travail d'explication de la procédure s'avère vite incompatible avec la nécessité d'être « efficace ». Les titulaires assument plus difficilement un tel renoncement à leur « mission d'accueil » ; néanmoins, certains le justifient en interprétant les gestes d'incompréhension des demandeurs comme autant de simulations révélatrices de fraudes.

L'entretien d'une barrière entre « eux » et « nous » est au fondement d'une relation de domination bureaucratique qui place toute interaction entre les étrangers et les représentants de l'État sous le signe de la dissymétrie. Lorsqu'un demandeur de titre se présente au guichet en dehors des délais impartis ou qu'il envoie un document tardivement, sa demande est automatiquement considérée comme irrecevable, alors que l'Administration n'est jamais sanctionnée en cas de dépassement des délais. De même, quand un agent perd un dossier, fait revenir plusieurs fois inutilement un usager ou lui délivre une information erronée, les « collègues » qui s'en aperçoivent se retranchent derrière l'application du règlement et ne laissent aucune prise à la contestation. Ce rapport de domination est parfois perturbé par un accompagnateur parlant le français et davantage familiarisé avec l'univers bureaucratique. Alors que la présence de ces tiers devrait être considérée comme un moyen de faciliter la relation au guichet, elle est le plus souvent perçue comme un obstacle : « Ils pinaillent sur tous les détails et ça prend quatre fois plus de temps », proteste un agent de préfecture en poste depuis cinq ans. À l'instar des personnels de l'administration pénitentiaire, les agents chargés du contrôle de l'immigration entendent maintenir à distance tout regard extérieur susceptible d'interférer sur leurs pratiques quotidiennes.

La polarisation entre « eux » et « nous » joue le rôle d'une clôture érigée à l'encontre des propos tenus par l'étranger ; elle permet aussi de restreindre la quantité d'informations susceptibles de lui être délivrées. Lorsqu'un étranger dépose une demande de carte de séjour, il s'enquiert parfois de ses chances de réussite, du délai de réponse et des conséquences d'un éventuel refus, mais il se heurte le plus souvent à une fin de non-recevoir. Même quand la décision est déjà prise, la guichetière préfère ne pas en faire état, pour éviter toute contestation. En dire le moins possible mais en savoir le plus possible, telle pourrait être la devise des agents du maintien de l'ordre national. Une telle opacité contraint les étrangers à revenir au guichet beaucoup plus souvent que n'importe quel autre usager, ce qui contribue à grossir davantage les files d'attente. De plus, lorsqu'une décision de refus est prise, il n'est prévu aucun espace ni aucun temps pour une éventuelle négociation. La seule voie de conciliation, ouverte par l'instauration des commissions du titre de séjour en 1989, est tombée en désuétude dans la plupart des préfectures.

Pourtant, tous les agents ne s'identifient pas de façon uniforme à ce « nous ». Le rapport à l'identité nationale varie selon la trajectoire de chacun. Les personnels noirs et métis, surreprésentés dans les services d'immigration, ne réagissent pas tous de la même façon aux discours destinés à renforcer la cohésion du groupe de ceux qui représentent l'État : ils peuvent tantôt s'identifier au « nous » des guichetiers, tantôt s'en démarquer. Certains agents issus de l'immigration ont parfois plus de difficultés à se sentir solidaires de leurs collègues, surtout lorsque ceux-ci manifestent une hostilité ciblée sur des catégories d'étrangers ayant la même origine qu'eux :
« Les guichetiers ne font pas attention à ce qu'ils disent, ils ne font pas attention si tu es d'origine telle ou telle. Moi je suis d'origine algérienne et je voyais bien qu'ils appelaient tous les Algériens les BZ.
– BZ, c'est-à-dire ?
– Oui, BZ c'est le sigle qu'il faut rentrer sur l'écran lorsqu'il s'agit d'un Algérien. Et c'est la seule population qu'on appelait comme ça. Et donc c'était les BZ, ils sont très violents , ils sont profiteurs , enfin tous les clichés. Mais ils estiment que comme tu es avec eux, de l'autre côté de la barrière, ce n'est pas pareil. Et puis on était tous dans la même galère, donc ça crée des liens. »
Entretien avec une ancienne guichetière de préfecture, 12 décembre 2003.

Cette jeune fille de parents algériens a été recrutée comme guichetière de préfecture à l'âge de vingt-six ans, alors que sa mère était restée en situation irrégulière pendant près de vingt ans. Sa trajectoire lui rend très difficilement supportable la distance et la défiance que ses collègues entretiennent à l'égard de l'immigration algérienne, même s'ils la considèrent mécaniquement comme partie prenante du « nous » qui fait la cohésion du groupe des guichetiers. Ici, l'occupation d'une même position et l'appartenance à un même collectif de travail relèguent au second plan la représentation racialisée des autres agents. La prégnance de cette stigmatisation n'en fait pas moins naître un malaise durable chez cette fonctionnaire qui se sent appartenir aux deux mondes. Décidée à changer de poste, elle réussira « avec soulagement » le concours du ministère des Affaires sociales.

La frontière entretenue par les agents entre « eux les étrangers » et « nous les Français » a donc pour fonctions simultanées de renforcer la cohésion du groupe des guichetiers, de maintenir à distance les usagers et d'empêcher toute forme d'empathie dans l'instruction des dossiers. Pour des agents situés dans la partie supérieure des classes populaires et qui continuent à se sentir protégés par l'État, l'appartenance au « nous français » et plus encore au « nous représentants de l'État » est un moyen d'entretenir une image positive de soi et de sa mission. Et si la frontière entre « eux » et « nous » suscite parfois un malaise chez certains personnels d'origine extra-européenne, elle n'empêche absolument pas leur intégration au groupe des guichetiers, qui se construit par opposition à celui des étrangers : au contraire, cette opposition est la source d'une véritable cohésion et la condition permettant à chaque nouvelle recrue de s'identifier aux normes du maintien de l'ordre national.

LEMONDE.FR, du 02.10.08

Les immigrés français au Québec

Du nouveau pour les immigrants français au Québec, L'express.fr, Grégoire Isabelle, publié le 14/10/2008

En marge du XIIe Sommet de la francophonie, à Québec, Paris et la Belle Province ont signé une entente pour favoriser la mobilité de la main-d'oeuvre. Un geste politique qui encourage l'immigration choisie.

Orthophoniste parisienne chevronnée, Marie-Hélène Bargès était convaincue de trouver facilement du travail lorsqu'elle s'est installée à Montréal, il y a quatre ans, avec mari et enfants. Le Québec manquait - et manque toujours - d'orthophonistes : son CV lui ouvrirait toutes les portes, s'était-elle entendu dire au cours de ses voyages de prospection.

Las ! malgré dix ans de pratique et deux diplômes universitaires en neuropsychologie, Marie-Hélène n'a pas été admise à l'ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec, condition indispensable pour exercer sa profession. "On m'a expliqué que je devais retourner à l'université au Québec ou changer de métier !" Refusant cette perspective, elle n'a déniché qu'un emploi de "thérapeute du langage" - au-dessous de ses compétences et mal payé.

Les conditions d'admission aux 45 ordres professionnels et aux 34 métiers réglementés, voilà le sujet qui fâche les immigrants français au Québec. Ils sont environ 3 500 à tenter leur chance chaque année dans la province francophone, et beaucoup ne peuvent y pratiquer leur métier. Les choses devraient toutefois changer bientôt.

Un dossier vital pour le Québec

Le 17 octobre, le Premier ministre du Québec, Jean Charest, et le président Sarkozy devraient signer, en marge du XIIe Sommet de la francophonie, à Québec, une entente sur la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles. Ainsi, à terme, un médecin, un comptable ou un charpentier ayant le droit de pratique en France pourront exercer leur métier au Québec et vice versa (voir l'encadré). Les législations québécoise et française seront adaptées en conséquence.

Pour le Québec, ce dossier est vital. En raison du vieillissement de sa population, la province est confrontée à une pénurie de main-d'oeuvre et mise sur l'immigration. Pour la France aussi, l'enjeu est important - pour aider ses ressortissants au Québec (qui seraient près de 100 000) et pour favoriser la mobilité professionnelle, l'Hexagone étant le deuxième investisseur étranger dans la Belle Province (après les Etats-Unis). A l'origine de l'initiative, Jean Charest a dû vaincre les réticences des ordres professionnels québécois, souvent jugés protectionnistes. Sur les quelque 4 000 immigrants (dont 800 Français) qui demandent chaque année un permis d'exercice, seul un tiers est admis directement. Les autres se voient prescrire une formation complémentaire (50 %) ou sont refusés (16 %).
Les premiers bénéficiaires

Une vingtaine d'ordres professionnels et de corps de métiers signeront le 17 octobre une "déclaration d'engagement", prélude à de futurs "arrangements de reconnaissance mutuelle".

Professions

Architecte, assistant social, avocat, expert-comptable, géomètre expert, dentiste, ingénieur, médecin, pharmacien, sage-femme, vétérinaire.

Métiers

Carreleur, conducteur d'engins de chantier, peintre, maçon, technicien constructeur de bois, métallier, technicien de maintenance des systèmes énergétiques et climatiques, mécanicien de transport par câble et de remontées mécaniques.

Pression politique oblige, les ordres professionnels et les corps de métiers ont été forcés de coopérer. Chacun a contacté son homologue français pour comparer les conditions d'exercice. Et vérifier si celles-ci sont équivalentes, incompatibles ou nécessitent une mesure de compensation - un "stage d'adaptation", par exemple.

L'entente France-Québec doit en principe couvrir, d'ici au 31 décembre 2010, tous les métiers et professions réglementés. Mais une partie d'entre eux ont été classés "prioritaires" - surtout dans le secteur de la santé, où la pénurie est criante. Médecins, pharmaciens et physiothérapeutes, notamment, devront conclure des "arrangements de reconnaissance mutuelle" avant la fin de 2009. Pour certains, cela se fera dès les prochaines semaines.

Cette harmonisation pourrait être ensuite élargie au reste de l'Europe et du Canada. Et même, pour les plus optimistes à Ottawa, servir de socle à un accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada.

L'UE adopte formellement le pacte sur l'immigration et l'asile

L'UE adopte formellement le pacte sur l'immigration et l'asile

Candidats à l'immigration clandestine sur la plage de San Blas, dans l'île espagnole de la Grande-Canarie. Le Conseil européen a formellement adopté le pacte européen sur l'immigration et l'asile, promu par la France.

Le Conseil européen a formellement adopté le pacte européen sur l'immigration et l'asile, promu par la France.

Ce pacte, dont Nicolas Sarkozy avait fait l'un des principaux objectifs de la présidence française de l'UE, avait déjà fait l'objet d'un accord entre les ministres chargés des politiques d'immigration et d'asile des Vingt-sept, le 25 septembre.

Le pacte "exprime l'engagement de l'Union européenne et de ses Etats membres de mener une politique juste, efficace et cohérente face aux enjeux et aux opportunités que représentent les migrations", est-il indiqué dans les conclusions du Conseil.

"Cette politique commune doit reposer sur une bonne gestion des flux migratoires, dans l'intérêt non seulement des pays d'accueil mais également des pays d'origine et du migrant lui-même", est-il précisé.

Le texte ajoute que la mise en oeuvre du pacte fera l'objet d'un débat annuel à compter du Conseil européen de juin 2010.

Avec ce texte, les Vingt-sept s'engagent à renforcer la lutte contre l'immigration illégale tout en favorisant l'immigration légale et une politique d'asile commune.

Sur la question des clandestins, ils prévoient d'augmenter le nombre d'expulsions et de s'interdire toute régularisation massive pour ne plus procéder qu'au cas par cas.

La Grande-Bretagne veut réduire l'immigration

La Grande-Bretagne veut réduire l'immigration

Dans une interview publiée samedi par The Times, le ministre de l'Immigration anglais, Phil Woolas, déclare qu'en raison du ralentissement de l'économie et de la montée du chômage, la Grande-Bretagne prévoit de limiter le nombre d'étrangers sur son territoire.

En raison du ralentissement de l'économie et de la montée du chômage, la Grande-Bretagne prévoit de limiter le nombre d'étrangers sur son territoire, déclare le ministre de l'Immigration, Phil Woolas, dans une interview publiée samedi par The Times.

"Quand les gens sont sans emploi, la question de l'immigration devient extrêmement épineuse. Il a été trop facile dans le passé d'entrer dans ce pays et cela va devenir plus difficile", prévient-il.

"Ce gouvernement ne va pas laisser la population s'accroître jusqu'à 70 millions. Il doit y avoir un équilibre entre les gens qui arrivent et les gens qui partent", souligne Woolas.

En période de difficultés économiques, poursuit-il, les employeurs doivent privilégier les Britanniques faute de quoi ils risquent d'alimenter le racisme.

Woolas se prononce enfin contre toute régularisation des immigrants illégaux pour éviter d'encourager l'immigration clandestine.

La population britannique est estimée à 61 millions d'habitants. Selon le Times, l'immigration nette est de plus 200.000 personnes par an.

vendredi, octobre 10, 2008

Gérer conjointement l'immigration, par Louis Michel

Gérer conjointement l'immigration, par Louis Michel
LE MONDE | 08.10.08

Il y a quelques semaines à peine, un week-end, 311 immigrés clandestins, originaires pour la plupart des pays de la région subsaharienne, ont été repêchés au large des îles Canaries alors qu'ils tentaient de gagner l'Europe, promesse d'une vie meilleure. Ceux-là ont eu de la chance : on ne compte plus les hommes, les femmes et les enfants qui ont perdu la vie au cours de leur voyage vers l'espoir. Ces scènes sont devenues monnaie courante, que ce soit au large des côtes espagnoles, italiennes ou maltaises.

Certains hommes politiques aimeraient faire croire qu'il est possible, en dernière analyse, de contrôler l'immigration clandestine en renforçant encore la sécurité autour de la "forteresse Europe". Je peux vous assurer qu'il s'agit d'un voeu pieux destiné à détourner l'attention du public choqué par les images de centaines d'Africains épuisés, à l'agonie, venant échouer sur les plages. Tout citoyen européen devrait se demander en quoi ces femmes et ces hommes sont tellement différents de nos ancêtres - qui ont quitté tout ce qui leur était si cher pour se lancer dans l'aventure d'une vie nouvelle et meilleure dans un autre pays, sur un autre continent.

La seule réaction intelligente et honnête face à cette immigration est d'instituer un dialogue réciproque avec les pays d'origine ou de transit, d'examiner les perspectives offertes par une coopération judiciaire renforcée et de fournir une meilleure aide au développement. L'ouverture, cette semaine, au Mali d'un centre pilote d'information et de gestion des migrations illustre concrètement la manière dont l'Europe et l'Afrique tentent, en partenariat, d'aider les immigrés de manière légale, équitable et digne, avantageuses pour toutes les parties concernées.

Je souhaiterais tout d'abord préciser clairement le rôle que ce centre ne jouera pas. Il ne s'agit que d'une "agence pour l'emploi" comme il en existe dans les villes des différents pays européens. Les Maliens qui s'y rendront n'en ressortiront pas avec, comme par magie, un emploi dans une capitale européenne. Il est totalement faux d'affirmer que cette structure pourrait avoir des conséquences négatives sur l'emploi des citoyens européens.

L'objectif de ce centre est d'informer et d'aider les éventuels candidats à l'immigration. Ainsi, il donnera des renseignements sur les risques liés aux réseaux d'immigration clandestine contrôlés par une mafia sans pitié, sur certaines perspectives d'immigration légale en Europe ou ailleurs, sur les possibilités de formation professionnelle et d'emploi au Mali même. Cette structure sera également en mesure d'aider les autorités maliennes à négocier des accords d'immigration de main-d'oeuvre avec chacun des Etats membres de l'Union européenne et divers pays tiers. Les accords bilatéraux qui seront conclus à l'avenir dans ce domaine accroîtront les possibilités et permettront, par exemple, de répondre de manière équitable, légale et sûre à une augmentation de la demande de main-d'oeuvre saisonnière.

Par ailleurs, le Mali jouit d'une position géographique idéale pour un tel projet pilote. La région subsaharienne prend de plus en plus conscience des avantages que l'immigration est susceptible d'apporter pour le développement, tels que les flux de trésorerie considérables générés par la diaspora de retour dans son pays d'origine. Le Mali est le deuxième plus grand pays d'Afrique de l'Ouest. C'est un pays d'origine, de transit et de destination des flux migratoires, du fait de sa position centrale et de la perméabilité de ses vastes frontières. Il est important de signaler que sur 12 millions d'habitants, quelque 4 millions de Maliens sont des migrants, dont 3,5 millions vivent en Afrique de l'Ouest et 200 000 seulement en Europe. Il est donc fallacieux d'affirmer que la majorité des Africains veulent émigrer en Europe. Tel n'est pas leur souhait. C'est pour cette raison que la couverture géographique de ce centre ne sera pas limitée aux pays européens mais s'intéressera à ce phénomène également sous un angle régional.

Ce centre constitue un premier pas, certes modeste, mais important dans la coopération instaurée entre l'Europe et l'Afrique pour gérer de façon appropriée la question de l'immigration. Cette structure rompt avec les formules traditionnelles qui alimentent depuis plusieurs années la tactique de la peur utilisée par certains. Elle propose une véritable solution de rechange à une politique de lutte contre l'immigration fondée sur des mesures répressives et dictées par la sécurité.

Je crois sincèrement qu'aucune mesure coercitive, répressive ou sécuritaire ne permettra jamais d'empêcher quiconque d'essayer d'améliorer son sort. L'immigration n'est pas un phénomène criminel. Elle existe depuis la nuit des temps. Les grandes civilisations ont toujours été celles qui ont soutenu les migrations et ont finalement tiré profit de ces échanges d'informations et de savoir-faire.

Ce centre est un investissement dans les qualités du Mali tout autant qu'un investissement en Europe.

En définitive, il s'agit d'un investissement en faveur de notre compréhension des flux migratoires, à savoir que la prise en compte de l'immigration plutôt que la lutte contre ce phénomène pourra, à terme, être bénéfique pour tous.
Louis Michel est commissaire européen chargé du développement et de l'aide humanitaire.

LIVRE : Carine Fouteau, Danièle Lochak, Immigrés sous contrôle : Les droits des étrangers : un état des lieux, Paris : Le Cavalier Bleu, août 2008.

LIVRE :

Carine Fouteau, Danièle Lochak,
Immigrés sous contrôle : Les droits des étrangers : un état des lieux,
Paris : Le Cavalier Bleu, août 2008.

# Broché: 171 pages
# Editeur : Le Cavalier Bleu (25 août 2008)
# Collection : Libertés Plurielles
# Langue : Français
# ISBN-10: 284670211X
# ISBN-13: 978-2846702119

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Site éditeur


Présentation de l'éditeur :

La liberté de circulation, le droit de vivre auprès de ceux que l'on aime ou de gagner sa vie sont-ils réservés aux habitants des pays riches ? La question peut paraître incongrue en 2008, tant l'idée de l'universalité des droits de l'Homme a fait son chemin. Pourtant, force est de constater que la politique d'immigration française - et désormais européenne - conduite depuis trente ans a fait régresser à bien des égards la condition des migrants. Combien de familles empêchées de rejoindre leurs proches ? Combien de demandeurs d'asile refoulés ? Combien de personnes vivant et travaillant en France depuis des années reconduites à la frontière ? Les " sans-papiers ", les " clandestins ", les " immigrés ", sont d'abord des hommes et des femmes qui ont droit au respect de leurs droits fondamentaux. Mêlant mise en perspective historique, analyse des faits et interviews, les auteures dressent ici un état des lieux complet des droits des étrangers en France. Au-delà, elles soulignent les impasses d'une politique qui, érigeant barrage après barrage, ne parvient pas à atteindre son objectif de " maîtrise " des flux migratoires. Le réalisme n'imposerait-il pas de chercher des solutions pour accueillir les migrants plutôt que d'imaginer sans cesse de nouveaux dispositifs pour les refouler ?

Biographie des auteurs :

Danièle Lochak, professeure de droit à l'université de Paris X•Nanterre, est l' auteure de nombreuses publications sur les droits de l'Homme, la politique d'immigration et les différentes formes de discriminations. Elle a été de 1985 à 2000 présidente du GISTI (Groupe d'information et de soutien des immigrés), dont elle est toujours membre. Elle est également vice-présidente de la Ligue des droits de l'Homme.

Carine Fouteau est journaliste. Elle écrit pour le journal d'information en ligne Mediapart.fr, après avoir travaillé aux Échos. Elle est membre du comité de rédaction de la revue Vacarme.
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Au sommaire


Introduction
— Les origines

Hier

— La législation, reflet des politiques d’immigration
— Du contrôle du séjour…
— au contrôle de l’emploi
— Le tournant de 1974
— La continuité derrière les alternances
— Sombre bilan
— La politique Sarkozy : quel changement ?



Faits Récents

Aujourd'hui

— Chapitre I : Entrer en France

La France, l’Europe et l’espace Schengen
Une accumulation d’exigences
La logique du soupçon
Des procédures opaques et arbitraires
Des frontières très contrôlées
Le maintien en zone d’attente
La « crise » du droit d’asile

— Chapitre II : Avoir des papiers

Une question lancinante
Qu’est-ce qui donne droit au séjour ?
L’accumulation des conditions à remplir et des preuves à fournir
Conserver son droit au séjour
La menace de l’éloignement

— Chapitre III : Sous l’œil vigilant de la police

Contrôles
Fichage
Enfermement
Dans le labyrinthe des centres de rétention, reportage au Mesnil-Amelot
Traitements inhumains et dégradants

— Chapitre IV : Travailler

Un droit conditionné
Travailler sans papiers
Des travailleurs choisis, mais « jetables » ?
Immigration choisie et emploi : entretien avec François Brun
Égalité des droits
Emplois fermés

— Chapitre V : Vivre en famille

Se marier
Le regroupement familial : un droit en peau de chagrin
Vivre en famille

— Chapitre VI : Se soigner, se loger, s’instruire

Vivre décemment
Se soigner
Un droit à la santé de plus en plus compromis : entretien avec Antonin Sopena
Se loger
S’instruire

— Chapitre VII : Citoyens, quand même ?

L’absence de droits politiques
L’association des étrangers à la vie publique locale
D’autres formes de citoyenneté


Demain

— Perspectives européennes
— Un autre regard sur l’immigration
— Pour une autre politique
— Immigration et co-développement : entretien avec Madjiguène Cissé
— Quelle ouverture des frontières ?
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Lire un extrait
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lundi, octobre 06, 2008

Perspectives des migrations internationales - OCDE - étude sur la France

Après plusieurs années de hausse soutenue (13 % de croissance annuelle moyenne
entre 1995 et 2003), les entrées à caractère permanent ont nettement ralenti depuis 2004.

En 2006, environ 135 000 étrangers ont été admis au titre du séjour, un niveau comparable à celui de 2005. Cette stabilisation résulte de la baisse du nombre d’étrangers ayant obtenu l’asile en France (–6 400 par rapport à 2005), et de la hausse de la migration familiale (+4 300)
et de la migration de travail (+1 500).

La diminution du nombre de réfugiés résulte principalement de la forte baisse des demandes d’asile depuis 2004 (environ 30 750 premières demandes d’asile en 2006, soit –38 % par rapport à 2005, et presque la moitié du niveau de 2004). Par conséquent, la France a été remplacée par les États-Unis comme pays de l’OCDE ayant reçu le plus grand nombre de demandes.

L’essentiel de l’augmentation de la migration familiale provient des entrées au titre des « liens
personnels et familiaux » (+7 800 par rapport à 2005), notamment suite à l’opération de régularisation de l’été 2006, qui concernait certains parents d’enfants scolarisés en France. Parallèlement, les entrées au titre du regroupement familial ont diminué (–3 500).

La migration de travail, mesurée par les entrées directes de ressortissants étrangers sur le marché du travail, reste modeste au regard de l’ensemble de la migration permanente (10 000 personnes, soit moins de8 % de l’ensemble des entrées), mais elle a connu une
forte hausse depuis 2004 (+19 % par an en moyenne entre 2004 et 2006).

Concernant la provenance des migrants, les évolutions récentes se sont poursuivies en 2006 :
l’Afrique reste la principale région d’origine, devant l’Asie. Au total, un tiers des nouveaux immigrés proviennent d’Algérie ou du Maroc.

Une nouvelle loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile est entrée en
vigueur le 20 novembre 2007. Cette loi succède à la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration.

La nouvelle loi stipule que l’accès au regroupement familial pour les étrangers âgés de 16 à
64 ans est désormais conditionné au passage, dans leur pays de résidence, d’un test évaluant leur connaissance de la langue française et des valeurs de la République.

Le cas échéant, les intéressés doivent suivre, toujours dans leur pays, une formation et effectuer ensuite un nouveau test. Cette nouvelle procédure s’applique également aux étrangers mariés à un conjoint français lorsqu’ils sollicitent un visa pour un séjour d’une durée supérieure à trois mois.

Les conditions de ressources pour les étrangers résidant en France et souhaitant accueillir leur famille sont également renforcées : le plancher de ressources est relevé et dépend désormais de la taille de la famille.

Enfin, les parents d’enfants admis au séjour dans le cadre du regroupement familial doivent désormais signer avec l’État un contrat d’accueil et d’intégration (CAI) pour la famille. Dans ce cadre, ils doivent suivre une formation sur les droits et devoirs des parents en France et s’engager à respecter l’obligation d’instruction.

Plusieurs mesures visent à favoriser les migrations de travail : les modalités de délivrance des cartes de séjour « salarié en mission » et « compétences et talents » sont assouplies et leurs titulaires sont dispensés de la signature du contrat d’accueil et d’intégration.

Par ailleurs, la loi du 24 juillet 2006 prévoyait que la situation de l’emploi ne soit plus opposable aux étrangers demandant une autorisation de travail dans certains métiers connaissant des pénuries de main d’oeuvre.

Fin 2007, le gouvernement français a défini deux listes distinctes précisant quels sont ces métiers :

- la première concerne les ressortissants des dix États membres de l’Union européenne soumis à des dispositions transitoires et porte sur 150 professions, y compris peu qualifiées;

- la seconde concerne les ressortissants de pays tiers et porte sur 30 métiers plutôt qualifiés.

Une autre disposition de la nouvelle loi de 2007 permet la délivrance de cartes de séjour temporaires de type « salarié » au titre de l’admission exceptionnelle au séjour, ce qui ouvre la voie à la régularisation au cas par cas d’étrangers disposant de compétences professionnelles très recherchées. La circulaire ministérielle du 7 janvier 2008 précise que ces régularisations seront limitées aux métiers figurant dans les listes de métiers connaissant des pénuries de
main-d’oeuvre.

La loi de 2007 comprend également un volet sur l’asile. La mesure la plus importante, qui fait suite à une condamnation de la France par la Cour européenne des Droits de l’homme, concerne les étrangers arrivés aux frontières françaises pour demander l’asile et se voyant refuser l’entrée en France : ils peuvent désormais déposer un recours à effet suspensif contre la décision
de refus d’entrée.

Source : PERSPECTIVES DES MIGRATIONS INTERNATIONALES : SOPEMI – ÉDITION 2008 – ISBN 978-92-64-04569-9 – © OCDE 2008, p. 272 et 273.

Pour en savoir plus…

http://www.premier-ministre.gouv.fr/iminidco
http://www.anaem.fr
http://www.ofpra.fr

jeudi, septembre 25, 2008

Centres de rétention : du changement en vue

Centres de rétention : les associations craignent pour leur mission de contrôle


Un pan essentiel de la politique migratoire du gouvernement, l'éloignement des étrangers en situation irrégulière, risque de passer dans l'ombre. C'est l'inquiétude formulée par les associations depuis la publication, le 22 août, du décret réformant le dispositif d'aide aux personnes placées dans les centres de rétention administrative (CRA), et l'appel d'offres ministériel qui a suivi, le 28 août.

Jusqu'alors, la mission d'information et d'aide juridique aux étrangers placés en rétention dans l'attente d'une expulsion était confiée à une seule association nationale, la Cimade. Celle-ci publie un rapport annuel fouillé. Le ministre de l'immigration, Brice Hortefeux, agacé par les propos "toujours critiques" de cette dernière, n'a pas caché qu'en décembre, au terme de la convention triennale la liant à l'Etat, il en finirait avec cette "situation de monopole". Pour nombre d'associations, le gouvernement cherche à démanteler la mission d'aide aux étrangers sous couvert d'"introduire davantage de diversité" dans les CRA.

Mercredi 24 septembre, Amnesty International, l'Anafé, l'Association des chrétiens pour l'abolition de la torture, le Comité médical pour les exilés et la Ligue des droits de l'homme appellent toutes les structures concernées par ce changement à réfléchir à une réaction commune. De plus, une pétition lancée le 11 septembre pour dénoncer "une mise aux ordres des associations" a fédéré quelque quatre- vingts organisations associatives, syndicales et politiques. Le nouveau décret prévoit de répartir en huit lots la trentaine de centres de rétention répartis à travers la France. Chacun se verra confier à "un" intervenant, qui pourra être une association ou toute autre "personne morale", entreprise, organisme parapublic, national ou local. Dans son appel d'offres, le ministère a renoncé à maintenir une mission d'ensemble cohérente assurée en concertation par plusieurs associations, choisissant l'éclatement.

La mission d'intervention consistait jusqu'alors à "informer les étrangers et les aider à exercer leurs droits". Mais si le nouveau décret la mentionne encore en ces termes, l'appel d'offres, lui, réduit le rôle des futurs intervenants auprès des retenus à une fonction d'"information, en vue de l'exercice de leurs droits". L'aide juridique qui était jusqu'à présent assurée se trouve ainsi minorée.

Le ministère de l'immigration a déjà démarché plusieurs associations et organismes parapublics, tel l'Adoma (ex-Sonacotra), la Croix-Rouge, le gestionnaire de foyers Aftam... L'Adoma a décliné l'offre, estimant que "ce n'est pas (son) métier". La Croix-Rouge, comme France Terre d'asile, affirme ne pas vouloir "entrer en concurrence avec la Cimade". Autre association, Forum réfugiés a décidé de "tenter d'y aller". "La diversité d'expression ne peut que renforcer l'analyse de la situation dans les CRA", estime son directeur, Olivier Brachet, prêt à se coordonner avec les sept autres intervenants.

A l'inverse, Patrick Delouvin, d'Amnesty international, craint que "l'émiettement de la mission rende impossible toute analyse et vision d'ensemble sur la rétention". Selon lui, " d'une mission nationale cohérente, on passe à une mise en concurrence de prestataires". Il redoute que, "soumis à une stricte neutralité, certains intervenants hésitent à parler, de peur de perdre leur marché".

"CONTRÔLE DÉMOCRATIQUE"

Chaque intervenant devra en effet respecter "une stricte neutralité", faute de quoi l'administration pourra résilier le marché sans indemnités. Et si chacun devra "rendre compte à l'administration de la réalisation des prestations, selon une périodicité trimestrielle", les documents ne pourront pas être communiqués "dans le cadre des rapports et communications propres à la personne morale". En d'autres termes, il en sera fini des rapports annuels que publiait jusqu'alors la Cimade, pour témoigner de la situation dans chaque centre de rétention.

Pour Michel Agier, anthropologue à l'Institut de recherche pour le développement (IRD) et directeur d'étude à l'EHESS, "avec cet appel d'offres, un pas important est franchi, qui vise à interdire qu'un contrôle démocratique s'exerce dans ces lieux". Selon lui, la directive européenne "Retour" autorisant la rétention jusqu'à 18 mois va dans le même sens. "Un peu partout dans le monde, on voit se multiplier de tels lieux mis à l'écart, non visibles, avec une mise au pas de l'humanitaire."

Laetitia Van Eeckhout

Chiffres


Nombre de centres.
Il existe aujourd'hui en France métropolitaine une trentaine de centres de rétention administrative (CRA), contre 16 en 2003.

Capacité d'accueil. A la faveur d'un vaste plan de "rénovation" des CRA, le nombre de places disponibles en rétention est passé de 739, en 2003, à 1 724 en 2007.

Nombre de retenus. Selon les données recueillies par la Cimade, 34 379 personnes ont été en 2007 retenues de 24 heures à 32 jours, la durée moyenne de rétention s'élevant à plus de 10 jours.

LE MONDE, 22.09.08

vendredi, septembre 12, 2008

Renforcement du droit à l'information du demandeur d'asile

Un décret n° 2008-702 du 15 juillet 2008 (JO, 17 juill.) sur le droit d'asile garantie de nouveaux droits aux demandeurs d'asile à différentes phases de l'introduction et d'instruction de sa demande ou du recours devant la CNDA.

Il s'agit en fait de transposer en droit français une Directive européenne du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d’octroi et de retrait du statut de réfugié dans les États membres (Dir. 2005/85/CE du Conseil, 1er déc. 2005 : JOUE n° L 326, 13 déc.).


- À la frontière, le demandeur d’asile doit être informé sur « la procédure de demande d’asile, les droits et obligations au cours de cette procédure, sur les conséquences que pourrait avoir le non-respect de ses obligations ou le refus de coopérer avec les autorités et les moyens dont il dispose pour l’aider à présenter sa demande » (C. étrangers, art. R. 213-2 et R. 213-3). Cette information doit être donnée « sans délai » mais « dans une langue dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend ». Il est toutefois prévu que tant à l’entrée sur le territoire (C. étrangers, art. R. 213-2) que lors de l’instruction de sa demande sur le territoire (C. étrangers, art. R. 723-1-1) « lorsque l’audition du demandeur d’asile nécessite l’assistance d’un interprète sa rétribution est prise en charge par l’État ».

- La décision d’entrée sur le territoire(C. étrangers, art. R. 213-3, al. 2), de même que celle de l’OFPRA sur la demande d’asile (C. étrangers, art. R. 723-2, al. 3) ou sur une demande de réexamen (C. étrangers, art. R. 723-3) doivent être communiquées au demandeur « dans une langue dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend ». Cette exigence s’applique aussi à l’étranger placé en rétention administrative (C. étrangers, art. R. 723-2, al. 5).

- Au moment de l’instruction de sa demande d’asile sur le territoire, l’audition du demandeur prévue par la loi (C. étrangers, art. R. 723-3) doit faire l’objet d’un rapport écrit qui, « outre les raisons justifiant l’asile », comprend « les informations relatives à son identité et celle de sa famille, les lieux et pays traversés ou dans lesquels il a séjourné, sa ou ses nationalités, le cas échéant ses pays de résidence et ses demandes d’asile antérieures, ses documents d’identité et titres de voyage » (C. étrangers, art. R. 723-1-1, al. 1er).

- Le refus de reconnaissance de la qualité de réfugié ouvre droit à transmission au demandeur d’une copie du rapport d’audition ainsi que de la décision de refus du directeur général de l’OFPRA (C. étrangers, art. R. 723-1-1).

- Le demandeur d'asile bénéficie d’une garantie de confidentialité s’agissant du rapport d'audition de l'OFPRA. Aussi la collecte d’informations nécessaires à l’instruction de la demande n’ait pas « pour effet la divulgation directe, aux auteurs présumés de persécutions à l’encontre de l’étranger demandeur d’asile, d’informations concernant la demande d’asile ou le fait qu’une demande d’asile a été introduite » (C. étrangers, art. L. 723-2).

- Devant la CNDA, « le dossier du demandeur est tenu à la disposition de l’avocat » (C. étrangers, art. R. 733-10, al. 2).

Nouvel accord franco-gabonais de gestion concertée des flux migratoires

Nouvel accord franco-gabonais de gestion concertée des flux migratoires

L’accord relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement, signé par la France et le Gabon le 5 juillet 2007, facilite la délivrance des visas et l’admission au séjour des ressortissants gabonais qui souhaitent se rendre en France pour y suivre des études, pour motifs professionnels ou familiaux.

Mais l'accord prévoit en contrepartie une réadmission plus rapide des personnes en situation irrégulière et de lutte contre l’immigration irrégulière.


> D. n° 2008-900, 3 sept. 2008 : JO, 6 sept.

Rétention : nouvelles règles

Un décret du 22 août 2008 (Décret n° 2008-817, JO 23 août) apporte plusieurs modification au code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant le contentieux de la prolongation de la rétention et l'intervention des associations dans les lieux de rétention.

Le décret modifie plusieurs dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) en matière de rétention administrative.

1) Lorsque l'étranger n'assiste pas à l'audience, le délai court à compter de la notification de la décision décidant de la prolongation de la rétention (art. R. 552-12 CESEDA).

2) Appel possible de la préfecture des décisions du JLD : instauration de la possibilité d'interjeter appel de l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention – et non plus uniquement de former un pourvoi en cassation – devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué, dans les 24 heures de son prononcé, par l'étranger, par le préfet de département et, à Paris, par le préfet de police. L'appel n'est pas suspensif sauf demande du ministère public (art. R. 552-20). Le premier président ou son délégué statue sans délai sur la demande visant à déclarer l'appel suspensif, en fonction des garanties de représentation dont dispose l'étranger ou de la menace grave pour l'ordre public. Sa décision est portée à la connaissance de l'étranger et communiquée au procureur de la République qui veille à son exécution et en informe l'autorité administrative (art. R. 552-22). L'ordonnance du premier président ou de son délégué n'est pas susceptible d'opposition. Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé la rétention et au ministère public (art. R. 552-24).

3) ouverture des centres de rétentions à d'autres associations que la CIMADE. L'article R. 553-14 du CESEDA prévoit désormais que pour permettre l'exercice effectif de leurs droits par les étrangers maintenus dans un centre de rétention administrative, le ministre chargé de l'immigration conclut une convention avec une ou plusieurs personnes morales ayant pour mission d'informer les étrangers et de les aider à exercer leurs droits (art. R. 553-14). L'accès aux centres de rétention administrative des représentants des personnes morales est subordonné à un agrément individuel accordé pour une durée de trois ans par le préfet ou, à Paris, par le préfet de police (art. R. 553-14-1). Des dispositions semblables sont prévues pour les locaux de rétention administrative (art. R. 553-14-2 et R. 553-14-3).

samedi, juillet 19, 2008

Modifications du CESEDA 15 juillet 2008

Un décret n° 2008-702 du 15 juillet 2008 actualise les dispositions réglementaires du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA).

- Les demandes d'asile présentées à la frontière. L'article R. 213-2 du CESEDA est modifié et précise les garanties de procédure qui entourent les demandes d'asile présentées à la frontière. L'article R. 213-3 est complété pour préciser que la décision de refus d'entrée en France au titre de l'asile doit être faite dans une langue dont il est raisonnable de penser que l'étranger la comprend.

- Demandes d'asile présentées sur le territoire. Un nouvel article est inséré dans le CESEDA, l'article R. 723-1-1 afin de préciser les modalités à appliquer lors de l'audition d'un demandeur d'asile. L'article R. 723-2 est modifié : d'une part, il est désormais interdit, pendant toute la durée de l'instruction, de communiquer aux auteurs présumés de persécutions à l'encontre du demandeur d'asile toute information se rapportant à la demande et à son introduction. D'autre part, la décision du directeur de l'OFPRA sur la demande d'asile est communiquée à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. L'information sur le caractère positif ou négatif de la décision doit être transmise au demandeur d'asile dans les conditions précisées au deuxième alinéa de l'article R. 213-3, c'est-à-dire dans une langue dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend. Quand l'OFPRA ne peut prendre de décision dans un délai de six mois à compter de la réception de la demande d'asile dans ses locaux, il doit en informer l'intéressé dans les 15 jours qui précèdent l'expiration de ce délai. En cas de placement en rétention du demandeur d'asile, le directeur de l'office lui notifie sa décision par voie administrative. L'intéressé devra être informé du caractère positif ou négatif de la décision dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend. Cette information sur le contenu de la décision devra être simultanément communiquée au chef du centre de rétention.

Il n'est désormais plus possible de rejeter implicitement une demande d'asile (article R. 723-3 modifié). La décision du directeur général de l'office sur la demande de réexamen doit être communiquée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'intéressé. De plus, le caractère positif ou négatif de la décision doit lui être communiqué dans une langue dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend.

Concernant la communication des informations contenues dans le dossier du demandeur d'asile qui forme un recours contre la décision du directeur général de l'OFPRA, l'article R. 733-10 prévoit désormais que l'avocat du requérant doit pouvoir accéder au dossier de son client. Par ailleurs, c'est le recours (et non le dossier) du demandeur que le président de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) peut décider de ne pas communiquer au directeur général de l'OFPRA.

L'obligation de communiquer au demandeur d'asile le caractère positif ou négatif de la décision prise par l'autorité responsable dans une langue dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend, est mentionnée à l'article R. 733-20 et est appliquée à la décision de la CNDA.

mardi, juin 24, 2008

Lettre ouverte de GISTI au Premier Ministre

Lettre ouverte à François Fillon

À propos de la question de M. Thierry Mariani sur le financement du Gisti et de la réponse du Ministère de l’immigration


Paris, le 12 juin 2008

Monsieur François Fillon Premier ministre Hôtel de Matignon 57, rue de Varenne 75700 Paris

Monsieur le Premier Ministre

Le 18 septembre 2007, le député de votre majorité, M. Thierry Mariani a demandé « à Madame la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales de bien vouloir lui communiquer, et ce pour les cinq dernières années, le montant des financements d’État versés au Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti) » (JO du 18 septembre 2007, page 5625).

S’il est parfaitement légitime qu’un parlementaire s’intéresse au financement public des associations, nous nous interrogeons sur la raison pour laquelle la curiosité d’un député, aussi familier que M. Mariani des questions relatives à l’immigration, se soit spécialement focalisée sur le Gisti et qu’un parlementaire aussi avisé que lui, n’ait pas pris préalablement connaissance des bilans du Gisti qui sont accessibles (téléchargeables gratuitement sur son site depuis 1997), pour avoir réponse à son questionnement.

Notre étonnement à cette attention très particulière de M. Thierry Mariani tient notamment au fait qu’il n’a, semble-t-il, aucun doute sur les compétences du Gisti puisqu’il a, à plusieurs reprises depuis de nombreuses années, en qualité de rapporteur de la commission des lois, souhaité auditionner ses représentants au moment où l’Assemblée nationale allait examiner des projets de loi, prenant acte de son sérieux et donc de sa bonne utilisation des fonds publics.

Tout aussi étonnante est la réponse du Ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire du 6 mai dernier (JO du 06/05/2008 page : 3842) qui affirme que « Comme pour d’autres organismes bénéficiant du même type de conventions, le ministère va prochainement diligenter des contrôles sur l’emploi des fonds publics ainsi versés en application des règles en la matière. Le résultat de ce contrôle permettra notamment d’établir les conditions d’une reconduction éventuelle du soutien financier de l’État. » Comme si un tel contrôle n’avait jamais été réalisé. Or le Gisti, de même que d’autres associations agissant dans le champ de l’immigration, reçoit une subvention de la Direction de la population et des migrations depuis de très nombreuses années ; cette subvention est versée sur la base d’une convention qui prévoit les actions que l’association s’engage à mener (publications, conseil, formation…). La reconduction des subventions d’une année sur l’autre est bien entendu subordonnée au contrôle de l’exécution des engagements pris.

Il est surtout curieux que la réponse ministérielle ne fasse pas état du rapport récent de la Cour des Comptes sur la gestion de ses finances par le Gisti à la suite d’une inspection au deuxième trimestre 2007. Ce rapport, souligne, d’une part, que « la Cour a obtenu de la manière la plus satisfaisante les informations qu’elle a sollicitées de l’association » et, d’autre part, que le Gisti « fait preuve (…) de la plus grande transparence dans la présentation de ses comptes, puisqu’[il] met chaque année en ligne sur son site son bilan d’activité qui comprend notamment un rapport financier, lequel permet d’accéder au compte de résultat et au bilan de l’association, ainsi qu’au détail des subventions qu’elle reçoit ».

Par ailleurs, le Gisti a également bénéficié de fonds européens à travers l’Agence « Europe – Education – Formation » à l’occasion de la réalisation d’un projet dans le cadre du programme de mobilité « Leonardo Da Vinci ». A la fin de cet projet, l’association a été l’objet d’un audit qui a rendu, par lettre datée du 11 juillet 2007, les conclusions suivantes : « Les rapprochements entre les pièces qui nous ont été présentées et les mouvements de débit au compte de votre association ont pu être faits facilement. Les mouvements et les soldes correspondaient bien aux opérations du contrat (…) dans votre organisme pour l’année considérée ». Enfin, l’audit remarque « la nouvelle implication de votre organisme dans les projets européens et voulons saluer ici le professionnalisme du porteur de ce premier projet Leonardo ».

Vous comprendrez que nous éprouvions une certaine perplexité sur cette particulière attention qui ne peut s’expliquer par des doutes ni sur la compétence ni sur la gestion du Gisti.
Nous nous demandons, en conséquence, si l’on n’a pas voulu attirer l’attention sur le fait que le gouvernement accorde des financements à une association qui exprime souvent son désaccord avec sa politique et exprimer le désir que le Gisti ne bénéficie plus de financements publics.
Si tel était le cas, nous serions fondés à nous alarmer de pareilles attitudes, car si, pour bénéficier de subventions de l’Etat, il fallait nécessairement que les associations expriment des idées favorables à la politique défendue par le gouvernement, les citoyens auraient des raisons de s’inquiéter du sort des libertés et du pluralisme qui sont de l’essence même d’une société démocratique.

C’est pourquoi, nous avons décidé de vous demander ouvertement de préciser les critères qui, selon vous, doivent présider au financement public des associations.
Vous remerciant à l’avance de l’attention que vous voudrez bien porter à cette question capitale pour la démocratie, je vous prie, Monsieur le Premier Ministre, de recevoir l’assurance de ma considération distinguée.

Stéphane Maugendre, président
http://www.gisti.org/spip.php?article1150

Immigration : le rapport qui dérange

La 19e édition du rapport de la Direction de la population et des migrations (DPM) -récemment rattachée au ministère de l'immigration, intitulé "Immigration et présence étrangère en France en 2006" est parue.

Pourtant, ces pages sont intéressantes, les travaux rigoureux. On y apprend, par exemple, l’origine géographique des nouveaux Français. Ainsi, en 2006, ils ont été près de 150.000, dont 19.000 Européens, 22.600 Asiatiques et 93.500 Africains. De même, en 2006, ils étaient 9.997 sous la rubrique "immigration de travail salarié", dont les plus nombreux ont été des Marocains (1.313) et les Polonais (1.048).

Extraits du rapport (parus sur challenge.fr)

- Annexe sur les travailleurs saisonniers originaires des pays tiers
- Annexe sur l'immigration à caractère permanent en 2006 des ressortissants de pays tiers selon leur nationalité d'origine
- Tableau sur l'immigration à caractère permanent en 2006
- Tableau sur les nouveaux Français selon leur origine géographique
- Tableau sur les acquisitions de nationalité française selon l'origine géographique du bénéficiaire depuis 2001
- Tableau sur l'origine géographique des acquérants de la nationalité française par décret depuis 2001

mardi, juin 17, 2008

Immigration et asile: Bruxelles propose des outils et des principes

Immigration et asile: Bruxelles propose des outils et des principes
AFP 17.06.08


La Commission européenne a présenté mardi une série "d'outils" et de principes pour "réguler" et "organiser" l'immigration et le droit d'asile, une des priorités de la présidence française de l'UE qui commence le 1er juillet.

"Il s'agit de grands principes qui ne sont pas en opposition avec la proposition française" d'un Pacte européen sur l'immigration et l'asile, a assuré le commissaire en charge de la Justice et de la Sécurité Jacques Barrot, lors d'une conférence de presse au Parlement européen à Strasbourg.

"Il n'est pas question d'un pouvoir supranational en matière d'immigration", a-t-il ajouté, soucieux de ne pas heurter les susceptibilités quelques jours après le rejet du traité de Lisbonne par les Irlandais.

Si ce traité n'entre pas en vigueur, "les décisions en matière d'immigration légale nécessiteront l'unanimité des Etats membres, avec seulement un avis du Parlement européen", a souligné M. Barrot.

Il a cependant indiqué que la Commission essaierait d'utiliser la clause dite "passerelle" du traité existant, qui permet de passer à la majorité qualifiée moyennant l'accord de tous les Etats membres et la consultation des parlements nationaux dans chaque pays.

"Si nous pouvons l'utiliser, nous l'utiliserons", a-t-il promis.

La Commission européenne fait 10 propositions sur l'immmigration : elle rejette les régularisations massives pratiquées par l'Italie et l'Espagne, réclame la "tolérance zéro pour les trafiquants d'êtres humains" et insiste sur la nécessité de "mesures efficaces et durables" pour assurer un retour chez eux des étrangers en situation irrégulière.

Elle plaide pour la mise en place d'une politique commune de visas avec des documents utilisant les nouvelles technologies et leur délivrance dans des "centres consulaires communs représentant tous les Etats membres".

Elle préconise également des programmes d'intégration pour les nouveaux arrivants et réclame la non discrimination pour l'accès aux emplois et à la protection sociale.

La Commission évoque à cette occasion "les droits et les devoirs que les nouveaux arrivants pourront être appelés à respecter dans le cadre de procédures nationales spécifiques", et cite entre parenthèses le controversé contrat d'intégration proposé par la France dans son projet de "Pacte pour l'immigration".

Bruxelles ne rejette pas cette idée, mais ne veut pas en faire une obligation, et insiste sur la non-discrimination pour permettre aux immigrants de "développer leur potentiel".

"Nous voulons combattre l'image de l'Europe qui se barricade derrière ses frontières. Nous voulons donner celle d'une Europe qui prend à bras le corps les problèmes de l'immigration, une Europe ouverte, mais qui n'accepte pas les situations de désordre", a expliqué M. Barrot.

La présentation de ces propositions est intervenue à la veille d'un vote au Parlement sur un ensemble de règles pour faciliter le retour volontaire ou l'expulsion forcée des étrangers en situation irrégulière.

L'immigration et l'asile sont devenues des priorités pour l'Union européenne. Les Etats membres font difficilement face à l'immigration clandestine et au travail au noir généré par la présence de près de 12 millions d'étrangers en situation irrégulière sur leurs territoires.

mardi, juin 10, 2008

La question migratoire et la loi sur la modernisation de l'économie

L'étranger qui apporte "une contribution économique exceptionnelle à la France" pourra bénéficier d'une carte de résident de dix ans, selon un article du texte sur la modernisation de l'économie (LME) voté dans un climat tendu à l'Assemblée dans la nuit.

"Il ne s'agit pas de créer un nouveau titre, mais un droit exceptionnel qui devrait concerner au plus quelques dizaines de personnes", a expliqué la ministre de l'Economie Christine Lagarde en citant l'exemple d'un entrepreneur chinois ou maghrébin.

L’article 32 du projet de loi vise à permettre la délivrance de la carte de résident, sans condition de durée de séjour préalable, aux étrangers dont la présence sur le territoire français apporte une contribution économique exceptionnelle à la France.

Pour certaines catégories d’étrangers (PDG de filiales étrangères établies en France, grands investisseurs individuels, etc.), la possibilité de bénéficier d’un titre de séjour de dix ans peut influencer les choix d’installation et d’investissement et constituer ainsi un facteur d’attractivité pour la France.

Le pouvoir d’appréciation laissé à l’autorité administrative pour la délivrance de ce titre doit être encadré : aussi les étrangers en situation irrégulière et ceux qui constituent une menace à l’ordre public ne pourront en aucun cas bénéficier de ce nouveau dispositif. Dans le même esprit, un décret en Conseil d’État définira les motifs pour lesquels cette carte peut être retirée avant son échéance (atteintes à l’ordre public, condamnations pénales, etc.)

Treize interpellations dans une affaire de filière d'immigration clandestine brésilienne présumée

Treize interpellations dans une affaire de filière d'immigration clandestine brésilienne présumée
AP | 10.06.2008

Treize personnes d'origine brésilienne ont été interpellées mardi matin dans le cadre d'une enquête sur une filière d'immigration clandestine en provenance du Brésil, a t-on appris auprès de la gendarmerie. Elles sont actuellement en garde à vue dans plusieurs brigades de gendarmerie d'Ile-de-France.

Les investigations ont démarré en février et en mars 2008 après la découverte sur des chantiers de ressortissants brésiliens en situation irrégulière et détenteurs de faux documents administratifs portugais.

La compagnie de gendarmerie de Meaux (Seine-et-Marne), assistée de l'Office central de répression de l'immigration et de l'emploi sans titre (OCRIEST), a ensuite identifié plusieurs personnes soupçonnées d'avoir fait venir des travailleurs clandestins qui déboursaient de fortes sommes d'argent pour venir travailler en France. Ceux-ci étaient ensuite "exploités et logés dans des conditions indignes", indique la gendarmerie.

Trois cent vingt gendarmes et quinze policiers de l'OCRIEST ont pris part mardi matin à cette vaste opération menée dans 17 villes d'Ile-de-France et qui ciblait 31 adresses.

L'opération est menée sous la direction d'un juge d'instruction de Meaux en charge d'une information judiciaire ouverte pour "aide directe ou indirecte à l'entrée, à la circulation ou au séjour irrégulier en France, emploi d'étrangers non munis de titre les autorisant à exercer une activité salariée en France, soumission d'étrangers à des conditions d'hébergement incompatibles avec la dignité humaine, dissimulation ou conversion du produit d'un délit, falsification de documents d'identité portugais et usage".

"Ces opérations visent à mettre un terme à l'exploitation de la détresse humaine mêlant le marchandage de sommeil et l'habitat insalubre", ajoute la gendarmerie. AP

lundi, juin 09, 2008

Tout homme né et domicilié en France... Est admis à l’exercice des Droits de citoyen français

« Article 4. - Tout homme né et domicilié en France, âgé de vingt et un ans accomplis ; - Tout étranger âgé de vingt et un ans accomplis, qui, domicilié en France depuis une année - Y vit de son travail - Ou acquiert une propriété - Ou épouse une Française - Ou adopte un enfant - Ou nourrit un vieillard ; - Tout étranger enfin, qui sera jugé par le Corps législatif avoir bien mérité de l’humanité - Est admis à l’exercice des Droits de citoyen français. »

« Article 120. – [Le Peuple Français] donne asile aux étrangers bannis de leur patrie pour la cause de la liberté. - Il le refuse aux tyrans. »

Ces extraits datent d’une période révolue…, puisqu’il s’agit des extraits de la Constitution de la France du 24 juin 1793 !

Depuis la rédaction de ces articles, les temps ont bien changé et aujourd’hui, malgré la mondialisation économique et financière, l’heure est à la « maîtrise » de l’immigration.

lundi, juin 02, 2008

Immigration les chiffres du Ministère

Le Ministre de l'immigration a affirmé Dimanche 1er juin 2008 au Grand Jury RTL-LCI-« Le Figaro » que, « pour la première fois depuis une génération », le nombre de clandestins a commencé à diminuer, dans une proportion qui peut être évaluée à 6 %. « Du 1er mai 2007 au 30 avril 2008, il y a eu 28.778 reconduites, c'est-à-dire que les objectifs sont totalement atteignables », a indiqué le ministre de l'Immigration, en référence à l'objectif de 28.000 expulsions en 2008 fixé par le président Nicolas Sarkozy.

Interrogé sur le nombre d'immigrés illégaux, Brice Hortefeux a situé la « fourchette entre 200.000 et 400.000 ». (Les Echos)

Il a expliqué cette tendance par le nombre de refoulés à l'entrée sur le territoire français et de reconduites à la frontière, et par la baisse de 4% des bénéficiaires de l'aide médicale d'Etat. "Il y a un mouvement qui s'inverse", a estimé Brice Hortefeux.

Interrogé sur les travailleurs sans-papiers, il a réaffirmé que la régularisation en cours "se limitera à quelques centaines" sur 1.000 dossiers déposés.

samedi, mai 31, 2008

Au Maroc, en Tunisie et en Libye aussi...

Des pays voisins de l'Algérie sont eux aussi confrontés au problème des harragas, mais dans une mesure moindre. Au Maroc, le phénomène a beaucoup baissé ces dernières années, la lutte maritime contre l'émigration clandestine s'étant considérablement renforcée. Jusqu'à la fin des années 1990, les ressortissants marocains partaient de Nador, au nord, tandis que les Sahraouis et les Subsahariens partaient de Tarfaya, El-Ayoun ou Dakhla, sur la côte atlantique sud. Les Marocains l'emportaient largement, en nombre, sur les Subsahariens, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui.

La fermeture hermétique, à partir d'octobre 2005, des enclaves espagnoles de Ceuta et de Melilla - après qu'elles eurent été prises d'assaut par des centaines de Subsahariens désespérés - a fait chuter d'environ 70 % le nombre des candidats au départ. Reste des tragédies comme celle du 29 avril, où 29 clandestins (des Africains pour l'essentiel) ont péri dans des circonstances controversées, l'ONG « Amis et familles des victimes de l'immigration clandestine » accusant l'armée marocaine d'avoir provoqué leur noyade.

En Tunisie, les candidats à l'exil sont nombreux à tenter leur chance depuis les villes du Sahel (Sousse, Sfax, Monastir). Pas de données officielles, mais les habitants des localités côtières (Teboulba et Chebba notamment) signalent régulièrement des barques vides dans les eaux tunisiennes, avec à leur bord des vêtements, des papiers d'identité et de l'argent. Il s'agit non seulement de Maghrébins mais aussi de Subsahariens. Le 10 mai, une cérémonie d'hommage à ces disparus, intitulée « Les Embarcations de la dignité », a même été organisée à Ksiebet El-Mediouni.

Avec ses 1 700 km de rivages, la Libye est à la fois une terre d'accueil et de transit. Elle est même considérée par l'Europe comme la plaque tournante de l'immigration clandestine. Il faut dire que la petite île italienne de Lampedusa n'est qu'à 300 km de Tripoli, à vol d'oiseau.

Sur un total de 5,5 millions d'habitants, la Libye compte quelque 1,7 million d'immigrés, clandestins pour la plupart. Les autorités libyennes tentent de répondre aux demandes des Européens et de contenir au sud ces « indésirables » en leur interdisant l'accès de Tripoli et de la côte méditerranéenne.

On ne compte pas de Libyens parmi les candidats au départ : la Libye est même le seul pays de la région qui réussit à garder ses enfants ou à les faire revenir. Les jeunes Libyens obtiennent du coup facilement des visas pour l'Europe, à l'inverse de leurs frères maghrébins.

Source : Le Monde du 17.05.08