vendredi, juillet 27, 2007

Immigration : Augmentation des demandes de naturalisation aux USA

Les demandes de naturalisation ou du statut de résident permanent aux Etats Unis ont enregistré une nette augmentation à quelques jours de l¹entrée en vigueur de la majoration de 39 tarifs des formalités migratoires, prévue le 30 juillet prochain.

Quelque 711.538 immigrés, soucieux d¹échapper à la majoration décidée par les Services de la Citoyenneté et d¹Immigration (USCIS), ont rempli durant l¹année fiscale 2007 (qui débute le 1er octobre 2006) les formulaires de demande de naturalisation, soit presque l¹équivalent du nombre total des dossiers soumis durant l¹année écoulée.

En effet, 466.931 demandes pour l¹obtention de la nationalité américaine ont été enregistrées d¹octobre à mai de l¹année fiscale 2006 (1er octobre 2005-30 septembre 2006), contre 393.628 sollicitations durant la même période de l¹année précédente.
Les tarifs des formalités migratoires, qui ont connu une majoration de 66 %, ont augmenté pour la dernière fois en octobre 2005.

Avec les nouveaux tarifs, le coût de la demande de la nationalité américaine passe de 400 à 675 dollars, alors que celui de la demande du statut de résident permanent (Green Card) grimpe de 395 à 1.010 dollars.

Le directeur de l¹USCIS, Emilio Gonzales, a expliqué les raisons de cette majoration par le fait «qu¹actuellement 99 % de notre budget proviennent des tarifs que paient les usagers» et par «le grand besoin de modernisation et d¹amélioration des prestations des Services de la Citoyenneté et de l¹Immigration».

La Suède veut développer l'immigration économique

Le gouvernement suédois a présenté un projet visant à permettre aux employeurs suédois de recruter leur main-d'oeuvre dans le monde entier, avec la création d'une sorte de carte verte. Le journal trouve que c'est une bonne idée. "Cette immigration ne sera pas seulement bonne pour l'économie, elle va également permettre à l'intégration suédoise de faire un pas dans la bonne direction. La Suède a besoin d'immigrants bien formés. Cela va également renforcer la confiance en soi des immigrants moins qualifiés lorsqu'ils verront leurs compatriotes occuper des postes prestigieux. (...) Les Etats-Unis, qui ont depuis longtemps l'ambition d'attirer les travailleurs les plus qualifiés, servent de modèle. Aux Etats-Unis, le fait de parler avec un accent étranger ou de porter un nom à consonance étrangère n'est pas mal vu comme en Suède."

Immigration : une juge en colère

Immigration : une juge en colère
19/07/2007 - Propos recueillis par Élisabeth Lévy - © Le Point - N°1818

(lire aussi, pour une autre vision : http://droitdesetrangers.blogspot.com/2007/08/reconduite-la-frontire-impressions-dun.html)

Marie Dumes est le pseudonyme d'une juge administrative. Elle a traité 2 000 dossiers de recours contre des arrêtés de reconduite à la frontière ou des refus de séjour, mettant en jeu le destin de 4 000 à 8 000 personnes. Cette femme dont le coeur balance plutôt à gauche tire la sonnette d'alarme contre des politiques incohérentes qui, de droite ou de gauche, découragent l'immigration de travail et favorisent l'immigration d'assistance.

Le Point : Quelle est la raison de votre engagement sur le dossier de l'immigration ? Et pourquoi mener un tel combat sous le couvert de l'anonymat ?

Marie Dumes : Je ne fais pas de politique. Je suis magistrate administrative, tenue d'appliquer la loi. Je souhaite, à titre individuel, exprimer un malaise en tant qu'agent de l'Etat de droit au service de l'intérêt général et citoyenne responsable, car cette loi est devenue illisible et discriminatoire. J'ai essayé de me faire entendre de nombreux politiques par la voie administrative et, récemment encore, du cabinet de Brice Hortefeux. Sans succès. J'ai donc choisi, en désespoir de cause, de témoigner dans la presse. Je le fais sous un nom de plume, pour respecter mon devoir de réserve. Mais je ne me cache pas et suis prête à débattre.

Brice Hortefeux a présenté un projet qui durcit les conditions du regroupement familial et prévoit que les candidats à l'immigration ou à la régularisation seront soumis à une évaluation de leurs connaissances de la lan-gue et des valeurs de la République. Qu'en pensez-vous ?

Dans le cadre d'un parcours d'intégration, inciter les migrants à apprendre le français n'est pas une mauvaise idée. S'agissant des valeurs de la République, je ne suis pas certaine que leur apprentissage puisse relever de la réglementation. C'est notre affaire à tous. Surtout, cette réforme précipitée et partielle va susciter des tensions et de nouvelles inégalités, sans répondre à l'objectif affiché par le gouvernement de lutte contre l'immigration illégale. Le durcissement du regroupement familial ne fera que pénaliser quelques milliers de personnes qui ont respecté les règles. En effet, le regroupement familial s'applique aux conjoints et enfants mineurs d'étrangers en situation régulière, dès lors que ceux-ci disposent d'un logement et de ressources suffisantes. Mais il représente seulement 10 % des titres de séjour accordés pour des raisons familiales.

Sur quel fondement sont donc octroyés les autres titres de séjour pour raisons familiales ?

Au moins dix autres cas sont recensés par la loi, qui concernent des familles étrangères de Français et des étrangers malades, mais aussi les étrangers en situation irrégulière qui n'entrent dans aucune des catégories précédentes et invoquent des liens personnels et familiaux non définis avec des personnes résidant en France, régulièrement ou non. Ce qui signifie que deux clandestins entrés en France avec leurs enfants munis d'un visa de tourisme peuvent obtenir leur régularisation sans avoir à justifier d'un emploi et d'un logement alors qu'un Français qui veut faire venir sa femme allemande doit prouver qu'elle ne sera pas une charge. Or le nombre de ces régularisations « vie privée et familiale » accordées sans la moindre condition de ressources a quadruplé depuis l'adoption de la loi Chevènement-Jospin du 11 mai 1998 (dite loi Reseda), inspirée par un rapport de Patrick Weil, excellent historien et sociologue mais juriste approximatif. Son postulat principal, selon lequel les régularisations législatives de plein droit, dites « au fil de l'eau », risquent moins de créer un appel d'air que les régularisations ponctuelles, a été démenti par les faits.

Si on vous suit, la France régularise hors de toute obligation législative, constitutionnelle ou internationale. Pouvez-vous résumer brièvement ces obligations ?

Les experts de gauche comme de droite définissent, sur la base de raisonnements juridiquement contestables, trois voies légales d'immigration : l'asile, le travail et la famille. En réalité, il en existe seulement deux. La première répond aux obligations internationales de la France (droit d'asile, liberté de circulation et de séjour des citoyens de l'Union européenne). La seconde est à la discrétion du pays d'accueil. La Cour européenne des droits de l'homme le réaffirme avec constance : un Etat a le droit de choisir les étudiants, les travailleurs et les visiteurs qu'il accueille. Le problème est que « le droit à une vie familiale normale » inscrit dans la Constitution et « le respect de la vie privée et familiale » garanti par la Cour, interprétés de façon erronée par Patrick Weil et beaucoup d'autres, sont devenus une troisième voie d'immigration de peuplement, la plus importante en France depuis qu'on a stoppé l'immigration de travail en 1974. Autrement dit, la France va bien au-delà de ses obligations.

En somme, la France a une politique très généreuse d'immigration légale et de régularisation de l'immigration illégale ?

La situation est encore plus paradoxale. Depuis 1974, on a considérablement durci les conditions d'immigration légale (même si la loi de juillet 2006 a introduit un assouplissement pour les secteurs à forte tension d'embauche), tandis que, sans même en avoir conscience, les gouvernements successifs encourageaient l'immigration illégale. La France est le pays à taux de chômage élevé qui a la législation la plus libérale au monde en matière de régularisation. Aussi parlerai-je plutôt d'une non-politique d'immigration. Au fil des réformes contradictoires de la gauche, qui prétend offrir toujours plus de droits, et de la droite, qui affirme instaurer toujours plus de contrôles, ainsi que le dit justement Patrick Weil, l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative à l'entrée et au séjour des étrangers est devenue incohérente, illogique et discriminatoire. En théorie, elle permet d'accueillir toute la misère du monde ; or c'est impossible en pratique. Cette situation est d'autant plus explosive qu'elle est appréciée de façon divergente par « le peuple » et « les élites », en particulier par les médias, les artistes et les milieux enseignants, toujours prêts à dénoncer l'intolérance.

Peut-être, mais faire croire qu'on peut fermer les frontières et éradiquer l'immigration illégale est irresponsable.

Il existe deux options ineptes. La première, qui correspond au mythe de l'immigration zéro et à l'expulsion de tous les étrangers en situation irrégulière, ne peut se concevoir que dans un Etat totalitaire. La seconde, inspirée par les idées d'Etienne Balibar et le trotskisme de Richard Moyon, fondateur du très mal nommé Réseau éducation sans frontières, est celle d'une régularisation illimitée qui aboutirait à la fin de l'Etat-nation. J'ai fini, avec tristesse, par la considérer comme aussi dangereuse que le racisme de l'extrême droite. Refuser, sous prétexte qu'elles seraient arbitraires et insuffisantes, les régularisations au cas par cas accordées souverainement par l'administration revient à nier la distinction fondamentale entre liberté de circulation et droit à l'immigration.

Seule une minorité défend ce « droit à l'immi-gration ». Et vous savez bien que la France a souvent eu besoin de recourir aux travailleurs étrangers.

Il faut être aveugle ou extrémiste pour ne pas voir que, depuis 1974, nous avons découragé l'immigration de travail et encouragé l'immigration d'assistanat. On ne demande plus au migrant d'être en mesure de gagner sa vie et de contribuer à l'aide au développement en envoyant de l'argent dans son pays d'origine. Pour obtenir sa régularisation, mieux vaut avoir profité au maximum d'un système social exemplaire mais moribond qui favorise ce que j'ai fini par qualifier, par consternation et provocation, de droit à la procréation illimitée.

Faire des enfants qui bénéficient du système social français serait un bon moyen de rester en France ?

Oui. Dans mes salles d'audience transformées en nurseries, les requérantes font de moins en moins valoir le risque politique. Elles nous disent : « Je suis venue en France pour scolariser mes enfants, ou parce qu'ils avaient besoin de se faire soigner, de même que mon mari et moi. » Nous avons aussi de plus en plus souvent à traiter du cas de femmes entrées avec un visa de tourisme qui ont eu un, deux, voire trois enfants sans père connu. Leurs gamins sont scolarisés en priorité dès l'âge de 2 ans, elles ont obtenu un logement HLM, l'aide sociale à l'enfance et différents complé-ments et affirment que la seule chose qui leur manque pour travailler est un titre de séjour, quand bien même elles ne parlent pas le français. Je citerai le cas d'une Uruguayenne de 50 ans, exclusivement hispanophone, mère de quatre filles et grand-mère de quatre petits-enfants, tous de père inconnu.

Sans doute. Mais on ne va pas interdire aux immigrés en situation irrégulière de faire des enfants.

Ne me faites pas dire une chose pareille ! Le problème majeur en France, d'ailleurs souligné par Ségolène Royal comme par Nicolas Sarkozy, est qu'on a perdu de vue l'équilibre entre droits et devoirs. D'où une déresponsabilisation des parents et une instrumentalisation des enfants, devenus un moyen de rester en France. On s'inquiète de la polygamie, problème réel mais marginal, tandis qu'un angélisme qui s'apparente à une discrimination positive perverse concourt à l'explosion du nombre de familles monoparentales dans les couches les plus précaires. Contribution essentielle à l'égalité entre hommes et femmes, la contraception permet de planifier les naissances en responsabilité. Il n'est pas question d'interdiction légale. Mais notre loi et notre pratique administrative incitent les travailleurs qui n'ont pas réussi à obtenir un titre de séjour à faire venir leur famille et encouragent les sans-papiers à avoir des enfants dès leur arrivée sur le sol français, souvent en dehors de tout cadre familial stable.

On ne peut pas obliger les femmes à prendre la pilule. Et les enfants nés ou arrivés très jeunes en France posent un problème humanitaire et même humaniste.

Oui, et je suis inquiète pour les enfants de la génération « article 8 » (de la loi Reseda), qu'ils restent en France ou retournent dans leur pays d'origine. En se contentant du point de vue humanitaire, on a abouti à une situation intolérable. Jusque-là, l'assistanat n'avait jamais été le ferment de l'immigration. Dans toutes les sociétés, y compris les plus traditionnelles, on commence par se former, travailler, se doter d'un toit, et c'est ensuite que l'on fonde une famille. Les migrants, qu'il ne faut pas prendre pour des imbéciles, ont compris que, s'ils s'installaient en Espagne, en Grande-Bretagne, voire à Canton, il leur faudrait respecter ce schéma. En France, patrie des droits de l'homme, les travailleurs clandestins sont privés de droits, comme le dénonce en vain Droits devant !, la plus sérieuse et politique des associations de défense des sans-papiers, et il faut venir se faire soigner, procréer, voire trafiquer - « avec un bon avocat, on s'en tire » - pour susciter une compassion hystérique.

Mieux vaut être réaliste : il faut bien que les personnes qui se font exploiter dans des emplois clandestins aient accès à un minimum de prestations sociales.

Je peux vous garantir que le « quasi-statut social des sans-papiers » mis en évidence par le rapport de la Cour des comptes de novembre 2004 profite essentiellement non aux travailleurs exploités, mais aux parents que je perçois de plus en plus comme des irresponsables encouragés par des travailleurs sociaux qui ne savent plus où est l'intérêt général, des médecins empêtrés dans leur serment d'Hippocrate, des associations qui défendent des cas individuels sous couvert de combats collectifs et de tous leurs soutiens qui se donnent bonne conscience aux frais de la collectivité. Pour une famille régularisée qui coûte environ 10 000 euros par personne et par an, combien pourrait-on en sauver, de ces damnés de la terre qui survivent avec un demi-dollar par jour, n'obtiendront jamais un visa de tourisme, ne pourront jamais payer 5 000 à 20 000 euros à un passeur mafieux, et dont les enfants, surtout les filles, n'auront jamais accès à une éducation de base ?

D'accord, mais n'est-il pas incohérent de s'insurger contre l'immigration d'assistanat et de souhaiter le ralentissement des régularisations qui permettent d'accéder au marché du travail dans des conditions acceptables ?

Le préambule de la Constitution de 1946 établit que « chacun a le devoir de travailler ». Le paradoxe est que les régularisations donnent droit à l'exercice d'une activité salariée mais ne l'imposent pas, ouvrant l'un de ces « droits-créances » sans contreparties qui transforment chacun en ayant droit, ainsi que l'a dénoncé Pierre Mazeaud lors de ses derniers voeux comme président du Conseil constitutionnel. Résultat, 40 % des personnes régularisées au titre de la vie privée et familiale s'inscrivent au chômage, sans compter les femmes inactives. Et on peut s'attendre à ce que la loi si mal ficelée qui instaure le « droit au logement opposable » profite en priorité aux femmes seules fraîchement régularisées au détriment du million de personnes qui attendent un logement social depuis plusieurs années.

Que faut-il faire pour les enfants de sans-papiers scolarisés en France, qui émeuvent légitimement l'opinion ?

Il faut rappeler que, si inepte soit-elle, la circulaire du 13 juin 2006 sur la régularisation des parents d'enfants scolarisés proposait une aide au retour de 11 000 euros pour une famille de 4 personnes, alors que la gauche en octroyait 400. Dans des pays où le niveau de vie est inférieur de 10 à 20 fois à celui de la France, cela permet de rentrer la tête haute. Le problème est qu'on a créé une nouvelle catégorie de « ni-ni », (ni expulsables ni régularisables) et nourri une énorme frustration en laissant croire que tous les parents - dont les enfants, en vertu d'une circulaire de 2000, ont le droit d'être scolarisés pendant leur séjour et jusqu'à expiration des voies de recours légales - seraient régularisés. Pour finir, très peu de parents ont été régularisés, et très peu reconduits à la frontière. « Laissez-les grandir ici », proclament les cinéastes. J'ai envie de leur répondre : « Arrêtez de les instrumentaliser pour vous donner bonne conscience ».

A long terme, quelles seraient les bases d'une solution à la fois humaine et réaliste ?

Il faut désidéologiser le débat. Il faudra le moment venu, pour apurer la non-politique du passé, procéder à une régularisation large, que je préfère appeler « mesures transitoires ». Mais auparavant, le gouvernement doit replacer au coeur du dispositif législatif des critères objectifs et économiques. Les clandestins doivent être soumis aux mêmes obligations que les étrangers en situation régulière : un contrat de travail dans les secteurs qui manquent de main-d'oeuvre pour les personnes isolées et un logement pour les familles. Quant à leurs défenseurs, plutôt que de s'en prendre à l'Etat et au juge, ils feraient mieux de dénoncer les employeurs au noir qui sont, avec les passeurs, les grands bénéficiaires de l'anarchie actuelle.

L'immigration

Avec le ralentissement de l'immigration de travail, la famille est devenue le principal moteur de l'immigration en France. En effet, le « droit à une vie familiale normale », qui permet aux étrangers en situation régulière de bénéficier du regroupement familial, est devenu l'un des principaux critères de régularisation des clandestins.

- Depuis l'adoption de la loi du 11 mai 1998, 600 000 régularisations « vie privée et familiale » ont été accordées. Près de la moitié (250 000) ne concernait pas des conjoints de Français.

- Une croissance exponentielle : 96 000 adultes (dont 11 000 conjoints de Français) ont été régularisés sur cette base en 2005 et 100 000 (dont 10 000 conjoints) en 2006. (Ces données ne prennent pas en compte les enfants.)

Les obligations de la France : la famille d'un réfugié doit être accueillie sans conditions ; celle d'un citoyen européen n'a droit au séjour que sous réserve de l'exercice effectif d'une activité professionnelle ou de ressources stables et suffisantes ; enfin, les ressortissants de pays tiers résidant et travaillant régulièrement en France ont droit au regroupement familial, sous condition de ressources et de logement, au profit de leur famille nucléaire.

Recommandation du Conseil de l'Europe relative au droit de résidence permanente des travailleurs migrants et des membres de leurs familles

RECOMMANDATION 1082 (1988)[1]

relative au droit de résidence permanente des travailleurs migrants et des membres de leurs familles

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L'Assemblée,

Considérant que des millions de travailleurs migrants et leurs familles résident sur le territoire des États membres du Conseil de l'Europe depuis plus de cinq ans et sont en fait des résidents permanents de ces États, bien que leur statut juridique et leurs droits soient souvent ceux de résidents temporaires ;

Considérant que les politiques consistant encourager ces travailleurs migrants et leurs familles à retourner dans leurs pays d'origine n'ont rencontré qu'un succès très limité ;

Considérant par conséquent que la plupart des migrants installés dans les pays membres du Conseil de l'Europe y resteront ;

Rappelant la Convention européenne d'établissement de 1955, la Charte sociale européenne de 1961 et la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant de 1977, qui témoignent de la volonté des États membres du Conseil de l'Europe de protéger les droits des travailleurs migrants et de leurs familles ;

Se référant à sa Résolution 551 (1973) relative à l'intégration des travailleurs migrants dans la société des pays d'accueil ;

Rappelant qu'en ratifiant la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, les États se sont engagés à garantir les mêmes droits à toutes les personnes relevant de leur juridiction ;

Considérant que des millions de personnes ne peuvent toutefois pas bénéficier de certains de ces droits en raison de leur condition de migrants ;

Considérant qu'il convient de prendre les mesures nécessaires pour assurer une garantie effective des droits fondamentaux à toutes les personnes résidant sur le territoire des États membres du Conseil de l'Europe,

Recommande au Comité des Ministres :

d'inviter ceux des États membres qui ne l'ont pas encore fait à ratifier la Convention européenne d'établissement (1955), la Charte sociale européenne (1961) et la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant (1977) ;

d'inviter les gouvernements des États membres :

à reconnaître un droit de résidence permanente aux migrants, quel que soit leur pays d'origine ou leur nationalité, lorsqu'ils ont résidé au moins cinq ans sur leur territoire ;

à reconnaître le droit au regroupement familial au bénéfice non seulement du conjoint et des enfants, mais aussi des ascendants de ces travailleurs migrants ;

à reconnaître le droit de résidence perma,nente à l'ancien conjoint d'un travailleur migrant, resté sur le territoire de l'État après divorce, décès ou abandon ;

à garantir au migrant ayant le droit de résidence permanente l'égalité de traitement en matière de liberté de circulation, d'accès à l'emploi en dehors de la fonction publique et de conditions d'emploi, y compris le droit de faire partie de comités d'entreprises et de syndicats, le droit aux prestations sociales et à la formation professionnelle ;

à garantir aux migrants et aux autres étrangers ayant le droit de résidence permanente le droit de voter et de se présenter aux élections locales ;

Exprime le souhait que le projet de convention sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local aboutisse le plus rapidement possible ;

Recommande au Comité des Ministres de charger un comité d'experts d'élaborer une convention européenne relative au droit de résidence permanente pour les travailleurs migrants et les membres de leurs familles contenant les principes énoncés ci-dessus.


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[1] Texte adopté par la Commission Permanente, agissant au nom de l'Assemblée, le 30 juin 1988.
Voir Doc. 5904, rapport de la commission des questions juridiques, rapporteur : M. Altug.

La convention sur les droits des travailleurs migrants : Un nouvel instrument pour quelle protection ?

LA CONVENTION SUR LES DROITS DES TRAVAILLEURS MIGRANTS : UN NOUVEL INSTRUMENT POUR QUELLE PROTECTION ?

Yao AGBETSE *
Doctorant à l’Université Pierre Mendès France Grenoble 2
Source : Droits fondamentaux, n° 4, janvier - décembre 2004 www.droits-fondamentaux.org
Document disponible en PDF


« La Convention internationale sur les droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 18 décembre 1990 dans sa résolution 45/158 fut le secret le plus gardé des Nations Unies » disait Prasad Kariyawasam, président du Comité sur les droits des travailleurs migrants1. Ces propos traduisent les réticences de la communauté internationale à donner une existence juridique à un instrument dont l’enfantement s’est fait au prix d’âpres affres.

Il y a déjà plus de trente années que le Conseil Economique et Social des Nations Unies (ECOSOC) lançait un cri d’alarme dans sa résolution 1706 (LIII) du 28 juillet 1972 à propos de l’exploitation des travailleurs migrants dans des conditions proches de celles de l’esclavage. De la résolution 34/172 du 17 décembre 1979 créant un Groupe de travail ouvert aux Etats pour l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant sur la problématique de la protection des travailleurs migrants, à la résolution 45/158 de l’Assemblée générale, la communauté internationale a beaucoup lésiné. Les travaux préparatoires ont, quant à eux, duré 10 ans, de 1980 à 19902. En effet, il aura fallu encore 13 ans pour que le Guatemala dépose le vingtième instrument de ratification, rendant ainsi possible l’entrée en vigueur du traité, conformément à l’article 873.

Le 1er juillet 2003, date de l’entrée en vigueur de la Convention, est devenu un jour de référence et marque le début d’une nouvelle ère dans l’histoire tumultueuse des migrations internationales. Septième Convention ayant prévu un organe de contrôle de la mise en oeuvre de ses dispositions, la Convention met en place un cadre institutionnel et juridique susceptible de répondre aux défis que posent de nos jours le phénomène migratoire, sa gestion, ainsi que la protection des travailleurs migrants4.

Aujourd’hui, 30 Etats5 ont exprimé leur consentement à être liés par la Convention, mais il s’agit essentiellement des pays d’origine - donc « fournisseurs » de travailleurs de migrants -, alors que les violations des droits de cette catégorie de personnes se produisent, tout particulièrement, dans les pays de destination.
Les organisations de défense de droits de l’homme se sont, dès l’adoption de la Convention, engagées à assurer sa promotion et à appeler les Etats à y adhérer, avec pour objectif d’atteindre une ratification universelle. Nonobstant la plate-forme destinée à mener la campagne pour y parvenir et la mobilisation des organisations non gouvernementales sur tous les continents en faveur de la ratification, le résultat reste pour l’instant très mitigé. Les querelles d’idéologies, les réticences des Etats à accepter un droit de regard international, une sorte de contrôle sur leur politique en la matière semblent l’emporter sur la détermination de faire de cette Convention un instrument universellement ratifié. Ni les pays européens, ni les Etats-Unis, ni la Russie, ni l’Australie, ni même le Canada - pays à fort taux d’immigration - n’ont adhéré à l’instrument. On peut dire que la Convention n’a acquis qu’une victoire toute relative puisque les Etats particulièrement intéressés ne l’ont pas ratifié.

Au même moment, les flux migratoires vont croissant, attisés par le vent de la mondialisation. Corrélativement, les chiffres augmentent à une vitesse exponentielle. Plus de 175 millions de personnes vivent hors de leur propre pays, ce qui représente 2,9 % de la population mondiale. Cela équivaut à un habitant sur trente-cinq selon les chiffres récents des Nations Unies6. L’Organisation Internationale des Migrations (OIM) estime que si les migrants internationaux devaient se regrouper dans un même lieu celui-ci serait au cinquième rang des pays les plus peuplés. Le mouvement ne semble pas en voie de s’arrêter et exige une réponse réactive de la part de la communauté internationale dans son ensemble.
On recense respectivement 56,1, 49,7 et 40,8 millions de migrants en Europe, en Asie et en Amérique du Nord, ce qui place ces régions en tête des destinations des migrants. Ils sont estimés à 16,2 millions de personnes, soit 2,1 % de la population totale, alors que la population migrante en Amérique Latine et Caraïbe serait de l’ordre de 5,9 millions de personnes. Quant à l’Océanie/Pacifique (19,1 %), suivie de l’Amérique du Nord (13 %) et de l’Europe (7,7 %), elle est considérée comme la région qui concentre la plus forte proportion de migrants par rapport à sa population totale7. Les experts démographes ne présagent pas de répit dans ces mouvements migratoires qui, à l’horizon 2050, engendreront 203 millions de migrants internationaux, représentant 2,6 % de la population mondiale qui, elle, avoisinera 9 milliards, le tout sur fond d’une croissance importante de l’immigration féminine.
L’analyse de la Convention de 1990 nous montre qu’elle offre un cadre juridique international dans lequel des politiques de gestion du phénomène migratoire et de protection des travailleurs migrants peuvent s’élaborer, se développer et se réaliser. Il s’agit un traité multilatéral de vaste portée, qui s'inspire des accords juridiquement contraignants qui existaient auparavant, des études effectuées par les organes des Nations Unies chargés des droits de l'homme, des conclusions et recommandations de réunions d'experts et des débats et résolutions que la question des travailleurs migrants a suscitées au sein des organismes des Nations Unies.
Logiquement, une nouvelle codification suppose la consécration de nouveaux droits et, partant, le renforcement du cadre juridique de protection des travailleurs migrants. Toutefois, cette logique juridique se heurte à des divergences de perception des Etats qui craignent un contrôle international sur les politiques nationales migratoires qui, quoique s’inscrivant parfois dans un cadre régional concerté, ne sont pas exempts de problèmes. Si les uns voient dans le nouvel instrument un acquis réalisable et susceptible de répondre aux enjeux migratoires, les autres, en revanche, y décèlent plutôt une limitation lancinante de la souveraineté dont ils sont titulaires en vertu du droit international. Au final, la Convention se révèle comme un instrument apprécié (I) et redouté (II).

I. – UNE CONVENTION APPRECIEE

Le 1er juillet 2003 restera une date marquante pour les Nations Unies dans leur approche des questions migratoires et du respect des droits des travailleurs. Force est de constater que la Convention met en place un cadre institutionnel et juridique (A) susceptible de répondre aux défis (B) que posent de nos jours les migrations ainsi que la protection des travailleurs migrants.

A. - La valeur ajoutée de la Convention

1. - La non-discrimination

Les travailleurs migrants - réguliers ou non - font partie de la grande catégorie des « non-ressortissants » selon l’étude menée par David Weissbrodt à la Sous-Commission de la protection et de la promotion des droits de l’homme des Nations Unies8. Les femmes et les enfants sont encore plus exposés, non seulement par ce qu’ils sont des non-ressortissants mais aussi à cause de leur sexe ou de leur âge. Il en résulte de la part des Etats l’urgence de reconnaître des risques particuliers dont ces personnes ou groupes peuvent souffrir et d’éliminer de façon effective la discrimination raciale dirigée contre eux. La prohibition de la discrimination à l’égard des travailleurs migrants indépendamment de leur statut juridique devient donc une nécessité impérieuse.

Aux termes de l’article 25 de la Convention de 1990, toute distinction entre nationaux et travailleurs migrants ou toute distinction entre travailleurs migrants réguliers et irréguliers au niveau de la législation sociale est interdite en matière de rémunération, d’autres conditions de travail et d’emploi. Dès lors, on pourrait interpréter de telles discriminations comme une discrimination raciale susceptible de conduire au renversement de la charge de la preuve aux dépens de l’Etat.

Dans un avis consultatif, la Cour interaméricaine des droits de l’homme s’est penchée vers cette thèse9. Dans l’affaire Nachoya et autres c. Bulgarie10, la Cour européenne des droits de l’homme, après avoir fait référence aux principes des Nations Unies relatifs à la non-discrimination et à la jurisprudence du Comité des Nations Unies contre la torture, a décidé que « lorsqu’il existe des soupçons selon lesquels des attitudes racistes sont à l’origine d’un acte de violence, il importe particulièrement que l’enquête officielle soit menée avec diligence et impartialité, eu égard à la nécessité de réaffirmer en permanence la condamnation du racisme et de la haine ethnique par la société et de préserver la confiance des minorités dans la capacité des autorités à les protéger de la menace de violences racistes » et conclut que « l’obligation de prendre toutes les mesures raisonnables pour découvrir s’il existait une motivation raciste et pour établir si des sentiments de haine ou des préjugés fondés sur l’origine ethnique ont joué un rôle dans les événements. Si tel n’est pas le cas et si la violence et les brutalités à motivation raciste sont traitées sur un pied d’égalité avec les affaires sans connotation raciste, cela équivaudrait à fermer les yeux sur la nature spécifique d’actes particulièrement destructeurs des droits fondamentaux ». Au regard des effets préjudiciables disproportionnés des pratiques discriminatoires sur un groupe particulier et étant entendu que l’obligation pour un Etat sur d’éventuelles connotations racistes dans un acte de violence est une « obligation de moyen et non de résultat », la Cour a conclut au renversement de la charge de la preuve qui pèse désormais sur le gouvernement défendeur11.

Le principe de non-discrimination est l’un des principes généraux consacrés par la Convention. Les préoccupations autour des traitements dégradants et discriminatoires à l’égard des travailleurs migrants ont émergé dès les débuts de la réflexion.

L’article 7 de la Convention se situe dans le même esprit que la résolution 1706 (LIII) du 28 juillet 1972 du Conseil Economique et Social (ECOSOC), qui se déclarait profondément préoccupé par les mauvais traitements, y compris des pratiques inégalitaires et discriminatoires, ainsi que par des formes horribles de recrutement tirant avantage de la condition d’extrême pauvreté des migrants, de leur ignorance et du chômage chronique dans leur pays d’origine.

La non-discrimination a été particulièrement mise en exergue dans la Convention et cristallise la détermination de la communauté internationale à bannir cette pratique digne d’un autre siècle. En réalité, c’est l’affirmation du principe de l’égalité des hommes et des femmes déjà posé par la Charte des Nations Unies en 1945. L’article 7 engage les Etats parties, « conformément aux dispositions des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, à respecter et à garantir à tous les travailleurs migrants et aux membres de leur famille se trouvant sur leur territoire et relevant de leur juridiction les droits reconnus dans la présente Convention sans distinction aucune, notamment de sexe, de race, de couleur, de langue, de religion ou de conviction, d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale, ethnique ou sociale, de nationalité, d'âge, de situation économique, de fortune, de situation matrimoniale, de naissance ou de toute autre situation ». Il est intéressant de remarquer que les discriminations limitativement énumérées par le texte de l’article 7 vont au-delà de ce qui est mentionné dans les Conventions des Nations Unies consacrées jusqu’ici à la lutte contre la discrimination et se terminent par « toute autre situation », ce qui élargit son champ d’application. On remarquera au passage qu’en plus des discriminations habituelles contenues dans les instruments internationaux, la Convention ajoute la situation matrimoniale, la fortune et l’âge qui sont les nouveaux visages des méthodes et pratiques discriminatoires. De nos jours, les entreprises cherchent, bien que cela soit parfaitement illégal, à connaître le projet matrimonial des couples, et surtout de la femme en raison des congés maternités. De même, les personnes âgées éprouvent de plus en plus de difficultés à trouver du travail, les employeurs invoquant le fameux principe de la rentabilité. Inutile d’insister davantage sur les écueils des jeunes provenant des milieux défavorisés à accéder à l’emploi. Si cela est vrai pour les nationaux, cela est encore plus flagrant pour les migrants. Dès lors, l’élimination de la discrimination envers les migrants, plus qu’un engagement, devient un objectif pour la réalisation duquel tous les Etats sont appelés par la Convention de 1990 à fournir des efforts sur les plans national et international. On peut regretter que la Convention ne mentionne pas le handicap ou l’orientation sexuelle qui sont devenues de véritables sources de discrimination tant il est vrai qu’« énumérer, c’est oublier »12.

Le but est de trouver une issue à la précarité et à la vulnérabilité des migrants. Or, la sélectivité et la notion de « préférence nationale » en matière d’accès à l’emploi, l’expulsion et le refoulement ad nutum pour des motifs relevant de la seule prérogative de puissance publique de l’Etat d’accueil, mais aussi la réglementation parfois drastique dans la jouissance des droits fondamentaux – collectifs et individuels -, y compris le droit de vivre en famille, sont de nature à augmenter les risques d’extrême vulnérabilité. La lettre et l’esprit de la Convention visent à contribuer à l’élimination de la discrimination et de la précarité des éléments constitutifs de la condition juridique du travailleur migrant13 et ainsi à permettre aux travailleurs migrants de jouir des droits de l’homme indépendamment de leur statut juridique.
La Convention de 1990 codifie le droit à ne pas être discriminer contenu, certes, dans les instruments internationaux cités dans son préambule, mais réaffirme ces derniers dans le cadre de la fixation des normes permettant aux Etats d’« harmoniser leurs attitudes moyennant acceptation de certains principes fondamentaux » (préambule, § 9). Les Etats ont la responsabilité de protéger sur leur territoire tout individu contre des pratiques discriminatoires14.

Les femmes travailleuses migrantes sont exposées à une discrimination plus pernicieuse que les hommes. Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes avait noté que les femmes souffraient de multiples formes de discrimination fondées sur la race et l’identité ethnique ou religieuse, et reconnu le point de croisement entre genre et origine ethnique, s’était penché sur la question des femmes exposées à un risque particulier de violence et avait mis en évidence les besoins sanitaires particuliers des femmes appartenant à des groupes vulnérables15. La Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les travailleurs migrants, s’est, elle aussi, vivement préoccupée de la fragilité croissante de la condition de la femme migrante qui plonge celle-ci de plus en plus dans la précarité.
La résolution 2004/49 de la Commission des droits de l’homme fait état de « la persistance d’informations selon lesquelles les travailleuses migrantes subissent des sévices graves et des actes de violence de la part de certains employeurs dans certains pays d’accueil, ainsi que de la part de trafiquants dans certains pays ». Elle a appelé tous les gouvernements à signer et à ratifier mais aussi à « prendre toutes les mesures voulues pour permettre aux travailleuses migrantes de jouir pleinement de leurs droits fondamentaux et encourage les gouvernements à chercher des moyens de supprimer les causes de situations qui les exposent à des risques ».
La lutte contre la discrimination à l’égard des migrants fait l’unanimité, ne serait-ce que dans la volonté. En témoigne en Europe la Communication de la Commission sur l’immigration, l’intégration et l’emploi du 3 juin 2003, qui déclarait que « les immigrés sont trop souvent exposés au risque de discrimination »16.

Si en 2003, la Commission des droits de l’homme avait décidé d'inscrire à son agenda les « Groupes et individus particuliers : travailleurs migrants », c’est parce qu’elle s’est rendu compte de la grave situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent ces personnes et les membres de leur famille17.

2. - Droits de tous les travailleurs migrants

Le chapitre Trois de la Convention se positionne comme ce qu’il conviendrait d’appeler la renaissance des droits de l’homme pour tous, à la fois pour les migrants réguliers mais aussi pour ceux qui sont péjorativement et pudiquement nommés « sans papiers ». Il proclame d’abord des droits intangibles tels que le droit à la vie (article 9), l’interdiction du recours à la torture, à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (article 10), l’interdiction de l’esclavage ou de la servitude (article 11 alinéa 1) et du recours au travail forcé (article 11 alinéa 2). Depuis l’étude de Nicole Questiaux18 en 1982 à la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités19 et les observations générales du Comité des droits de l’homme, n° 29 du 24 juillet 200120 sur l’article 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le sens et la portée de l’interdiction absolue de déroger aux droits intangibles même en cas de circonstances exceptionnelles ou en situation d’exception sont suffisamment précisés. Le rapport intérimaire de David Weissbrodt sur les non-ressortissants, précise en outre que l’omission de « l’origine nationale » parmi les motifs pour lesquels aucune discrimination n’est permise en situation d’exception dans la Convention traduit, selon les travaux préparatoires, la reconnaissance par les rédacteurs du Pacte relatif aux droits civils et politiques du fait que les États jugent souvent nécessaire de pratiquer une discrimination à l’égard des non-ressortissants en cas de danger public exceptionnel21. Au regard de ce constat, la Convention de 1990 qui mentionne la discrimination fondée sur l’originale nationale (article 7) constitue une avancée juridique fondamentale en matière de lutte contre la discrimination en général et celle pratiquée contre les travailleurs migrants en particulier en période de péril imminent menaçant la vie normale du pays d’accueil.
La Convention reconnaît aussi aux travailleurs migrants des libertés fondamentales à l’instar de la liberté d'opinion, d'expression et de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce sans considérations de frontières, sous forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen (article 13) ; la liberté de pensée, de conscience et de religion (article 12) ; la liberté de réunion, d’association et de se syndiquer (article 26). Toutes ces libertés universellement reconnues constituent la matrice des libertés et droits fondamentaux et le minimum indispensable dans toute société respectueuse des droits de la personne humaine.

La Cour européenne des droits de l’homme considère d’ailleurs que la presse joue un rôle de « chien de garde »22 d’une société démocratique. La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples s’appuyant sur l’article 9 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, reconnaît que « la liberté d’expression est un attribut essentiel de l’existence humaine dans toutes les sphères de la vie et que le rôle cardinal de la liberté d’expression dans le développement de l’homme est désormais mondialement reconnu »23. Sa Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique contenue dans une résolution du 23 octobre 2002 demande expressément aux pays africains d’« adopter des mesures positives » pour sa réalisation24. Par ailleurs, la Cour suprême des Etats-Unis a « sacralisé » la liberté d’expression, selon le mot de Jean-Paul Costa, lui consacrant une place éminente au sein de l’ensemble des droits et libertés25. La Convention souligne et insiste sur la nécessité pour les Etats parties de garantir les même droits et libertés aux migrants comme à leurs citoyens sans aucune restriction si ce n’est celles strictement encadrées par des lois générales et impersonnelles. En un mot, la Convention réaffirme des valeurs partagées et reconnues substantielles par l’humanité dans son ensemble.

Par ailleurs, elle énonce qu’en cas de privation de liberté, les travailleurs doivent être traités avec humanité (article 17) et la non exécution d’une stipulation contractuelle ne peut, à elle seule, conduire à l’expulsion (article 20 alinéa 2). D’ailleurs, elle interdit les mesures d’expulsion collective (article 22). Au visa de ce texte, les mesures de reconduite à la frontière, les mesures de refoulement et d’expulsion se feront sur une base individuelle et doivent être analysées en tenant compte des « considérations humanitaires » (article 56). Le principe du non-refoulement figure dans la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Convention européenne des droits de l’homme et la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.

Devant les tribunaux, l’article 18 alinéa 2 garantit le principe de la présomption d’innocence. Le travailleur migrant présumé coupable, selon les provisions de l’article 18, doit être informé en détail, dans un délai raisonnable, des griefs portés contre lui dans une langue qu’il comprend ou bénéficier, le cas échéant, des services gratuits d’un interprète, disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, être jugé sans retard excessif, être présent au procès et se défendre par lui-même ou par l’intermédiaire d’un avocat de leur choix ou commis d’office pour le respect du droit à la défense, obtenir la comparution et le témoignage des témoins à charge et à décharge et ne pas être poussé, sous la contrainte et la torture, à avouer une infraction, qu’il n’aurait pas commis.

3. - Droits reconnus aux travailleurs migrants irréguliers

Le fondement de la démarche de la Convention se trouve dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, devenue la référence et le repère des normes du droit international des droits de l’homme. Elle dispose en son article 2 que « chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation ». L’article 2 alinéa 1 du Pacte relatif aux droits civils et politiques met l’accent sur ce qu’on pourrait appeler le principe de l’indistinction (mot grammaticalement incorrect mais acceptable en pratique) en matière d’octroi de droits et de libertés fondamentaux lorsqu’il dispose que « les Etats parties au présent Pacte s'engagent à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leur territoire et relevant de leur compétence les droits reconnus dans le présent Pacte, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation ». Par ailleurs, dans le souci de sauvegarde le principe de l’indistinction, le Comité des droits de l’homme a, dans sa jurisprudence, souligné que « la règle générale est que chacun des droits énoncés dans le Pacte doit être garanti sans discrimination entre les nationaux et les migrants »26.

La garantie des droits aux migrants irréguliers sonne comme une révolution en droit international. L’ambition de la Convention contraste fortement avec un principe bien établi en droit et relations internationaux. Les droits garantis par les Etats portent le sceau de la nationalité et les gouvernements semblent tenir à la protection de leurs ressortissants contre les influences étrangères, ce qui exclut de facto les migrants qui sont des étrangers, des personnes ne pouvant pas se prévaloir d’un droit en principe réservé aux nationaux. Dans un domaine aussi sensible que celui de la migration, la Convention a jeté un pavé dans la marre.
Vittoria, qui fait partie des théologiens espagnols de l’école de Salamanque et qui a joué un rôle substantiel dans la formation du droit international et dans l’élaboration de la théorie des droits de l’homme, soutenait - en invoquant le droit naturel - qu’« il est des droits dont chacun est investi sans considération de citoyenneté et ne peut être privé par un quelconque gouvernement »27. Le concept de droits fondamentaux inhérents à la personne, pierre angulaire du droit international des droits de l’homme et de son caractère universel réaffirmé, plaide en faveur de la révolution opérée par la Convention dans son approche des droits de l’homme pour tous, abstraction faite du statut juridique, des liens de nationalité, des impératifs catégoriques de légalité, des intérêts économiques, du protectionnisme national et des interférences de la souveraineté.

A priori, garantir des droits aux travailleurs migrants irréguliers paraît problématique et surtout incompatible avec le principe de la souveraineté des Etats qui sont, en vertu du droit international, autorisés à réglementer, entre autres, l’entrée et le séjour des étrangers sur leur territoire, mais aussi leur régime de protection, comme faisant parti de leurs pouvoirs régaliens. Dès lors, énoncer des droits individuels ou collectifs pour cette catégorie de migrants revient en quelque sorte à ôter à l’Etat l’exercice de cette prérogative de puissance publique qui le distingue fondamentalement de tout autre acteur du droit international. Certains gouvernements avaient même soutenu que l’octroi des droits aux migrants irréguliers contribuerait non seulement à affaiblir l’autorité étatique mais aussi et surtout à doper systématiquement l’immigration clandestine redoutée par tous les Etats28. Ces Etats ont en effet plaidé pour un durcissement des contrôles au niveau des frontières et mené une guerre contre les employeurs qui recourent à la main d’oeuvre provenant de l’immigration clandestine29.

A l’analyse du droit international tout court et du droit international des droits de l’homme et les évolutions de ces trois dernières décennies, la thèse précédente semble fragile à certains niveaux. Primo, la garantie des droits aux migrants irréguliers n’est pas en soi dramatique. C’est plutôt les employeurs et - par ricochet - l’Etat d’emploi qui tirent finalement profit de cette irrégularité, qui alimente en effet considérablement le système économique dans la mesure où la baisse démographique et le besoin croissant de main-d’oeuvre qualifiée ou non (qui se double d’une certaine réticence des nationaux envers certains emplois jugés ingrats ou subalternes) ne cessent d’attiser la demande migratoire des pays de destination. L’Etat récupère ainsi par la main gauche ce qu’il a préalablement rejeté par sa main droite, ce qui traduit une hypocrisie dénoncée par les organisations de défense de droits de l’homme. Certains analystes poussent encore plus loin la réflexion en estimant que les migrants, quoique irréguliers, sont de facto, à certains égards, « membres de la communauté nationale en vertu de leurs contributions économiques et culturelles » et donc de jure qualifiés à jouir de certains droits élémentaires30.
Secondo, la principale source du problème réside dans les incohérences, voire les contradictions, au sein des politiques migratoires tant nationales que communautaires ou régionales. Les politiques de refoulement ou celles de quotas menées par certains Etats n’ont pas porté les fruits escomptés. On en arrive parfois à des résultats inverses, ce qui suscite la réprobation de l’opinion nationale et internationale. Les stratégies nationales et régionales ont du mal à s’accorder sur une même note pour rendre la symphonie parfaite. L’Etat ne pourrait donc plus se fonder sur sa propre turpitude pour refuser la protection des migrants irréguliers et procéder a posteriori à des régularisations comme le font certains pays.
Tertio, deux facteurs majeurs militent en faveur de la Convention :

D’abord l’évolution du droit international des droits de l’Homme. Il est acquis depuis les travaux de la Commission du droit international31 que les obligations de droits de l’homme sont des obligations objectives et intégrales librement consenties par les Etats à l’égard des individus dont elles visent à protéger les droits fondamentaux. A ce titre, la Convention, en garantissant les droits aux migrants irréguliers, ne contrevient ni à l’exclusivité souveraine des Etats, ni aux principes généraux de droit, moins encore aux principes fondamentalement intrinsèques à l’idéologie des droits de l’homme. Qui plus est, la Déclaration et le Programme d’action de la Conférence mondiale des droits de l’homme de Vienne de 1993, invoquant « l'esprit et les réalités de notre temps »32, soulignent « l’obligation qu’ont tous les Etats, conformément à la Charte des Nations Unies, de développer et d’encourager le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion »33. La Conférence prie instamment tous les États de garantir la protection de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Les travaux préparatoires de la Convention ont aussi démontré la volonté des Etats – quoique lors des débats et consultations les divergences furent nombreuses - de garantir un minimum de droits à ceux qui rentreraient irrégulièrement ou se retrouveraient en situation d’irrégularité après coup dans un pays.

4. - Droits supplémentaires pour les travailleurs migrants réguliers

La Convention contient le « poison » et son antidote. Elle s’est prémunie contre les critiques qui pourraient lui être faites au regard de son ouverture en terme de droits garantis aux migrants irréguliers. Elle a le mérite d’être suffisamment claire en marquant la limite entre les droits reconnus respectivement aux migrants réguliers et irréguliers. C’est à travers des droits supplémentaires énoncés en faveur des migrants pourvus de documents que la Convention a réalisé la différence par rapport à nombre d’instruments de droits de l’homme antérieurement élaborés, pour échapper aux griffes de ses détracteurs. En plus des droits reconnus à tous les travailleurs migrants, ceux qui demeurent dans la légalité bénéficient du droit de circuler librement sur le territoire du pays d’accueil (article 39), y compris le droit de le quitter temporairement sans que cela n'affecte leur autorisation de séjour ou de travail (article 38), le droit de former des associations et des syndicats (article 40) ainsi que le droit à l’égalité de traitement en matière de licenciement de prestations de chômage, d’accès à des programmes d'intérêt public destinés à combattre le chômage ainsi que l'accès à un autre emploi et dans le choix et l'exercice d'une activité rémunérée (articles 43, 54 et 55). Les Etats d'emploi ne peuvent empêcher les employeurs de travailleurs migrants de créer des logements ou des services sociaux ou culturels à leur intention (article 43 alinéa 3). Il faut rappeler que le Conseil constitutionnel français a, dans sa décision du 19 janvier 199534, élevé au rang des droits à valeur constitutionnelle le droit au logement. Sur le plan international, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels considère le droit à un niveau de vie convenable, y compris le droit à un logement comme un droit fondamental35. Le principe de la réalisation d’un logement décent fait d’ailleurs partie des objectifs fixés dans La Déclaration du Millénaire36, ce qui renforce le principe posé à l’alinéa 3 de l’article 43 de la Convention.
Parmi les droits garantis aux migrants réguliers, le regroupement familial et les droits politiques sont les plus problématiques. Le débat lors des travaux préparatoires témoigne du caractère sensible de ces deux domaines.
L’unité familiale et le regroupement familial (article 44 de la Convention) sont un aspect particulièrement délicat des problèmes posés par les travailleurs migrants. Aux yeux des pays de destination, le regroupement constitue à la fois un appel et une incitation à une boulimie migratoire. Pour les défenseurs du droit au regroupement familial, l’unité familiale participe non seulement à l’équilibre du travailleur migrant mais aussi surtout à la réduction de sa vulnérabilité qui caractérise généralement les migrants qui sont hors de leur pays d’origine et, partant, de sa rentabilité au niveau des ses prestations. C’est tout simplement la matérialisation du droit de vivre en famille, la famille étant reconnue tant par la Déclaration universelle des droits de l’homme (article 16 alinéa 3) que par la Convention (article 44 alinéa 1) comme étant « l’élément naturel et fondamental de la société », qui a « droit à la protection de la société et de l’Etat ». La jurisprudence du Conseil d’Etat français a reconnu aux étrangers résidant sur le territoire français le droit de « mener une vie familiale normale »37. Cette jurisprudence démontre que la famille joue un rôle central dans le processus d'intégration car elle représente pour les migrants un point fixe de référence dans leur nouveau pays d'accueil. Et à la communication de la commission des communautés européennes du 3juin 2003 de reconnaître que « le regroupement familial autour du noyau familial est un instrument clé dans le processus d'intégration »38.

L’article 42 dispose que « les travailleurs migrants peuvent jouir de droits politiques dans l'Etat d'emploi, si cet Etat, dans l'exercice de sa souveraineté, leur accorde de tels droits » (alinéa 3) et que « les Etats d'emploi facilitent, conformément à leur législation nationale, la consultation ou la participation des travailleurs migrants et des membres de leur famille aux décisions concernant la vie et l'administration des communautés locales » (alinéa 2). Danièle Lochak écrit en ce qui concerne le droit de vote des étrangers que « si, dans un nombre croissant de pays, on leur a accordé le droit de vote au niveau local, le droit d’élire la représentation nationale reste, à de très rares exceptions près, le monopole des « nationaux » »39. Cette analyse est partagée par Alain Pellet et Patrick Daillier selon qui « la question des droits politiques n’a fait que très exceptionnellement l’objet d’une concertation internationale »40 tout en relevant l’ouverture opérée par l’article 17 du Traité de l’Union Européenne. La conception extensive adoptée par la Convention de 1990 en matière de d’octroi de droits politiques aux migrants peut s’interpréter comme un appel fort pour que les Etats intègrent les migrants dans les processus de décision dans les communautés dont ils apportent une dynamique certaine.

La Convention interdit la double imposition des migrants, énonce une exemption de droits et taxes d’importation et d’exportation et dispose que les travailleurs migrants ont « le droit de transférer leurs gains et leurs économies » (article 32).

B. - La Convention comme cadre idéal de lutte contre l’immigration clandestine

Bien qu’il soit difficile - voire impossible - d’avoir des statistiques fiables et précises sur le nombre de migrants clandestins dans différents pays, divers documents et les procédures de régularisation intervenues ces dernières années attestent de l’importance du phénomène de l’immigration clandestine41. Aucun expert, pas plus qu’aucun gouvernement, ne prévoit de répit dans le flux de migrants clandestins. Dès lors, la meilleure façon de lutter contre le fléau est d’y faire face et non de l’esquiver.

L’immigration clandestine est un véritable défi. Le mérite de cette Convention est de repousser les limites l’efficacité dans la protection des droits de l’homme et de se révéler ambitieuse. Tout en reconnaissant des droits aux migrants en situation irrégulière, elle donne les armes capables de venir à bout de l’immigration clandestine.

Les Etats parties, qu’il soit de départ, de transit ou de destination, s’engagent à mettre un terme au trafic de main d’oeuvre en luttant, notamment, contre la circulation d’informations trompeuses (article 68 alinéa 1 a). Aussi conviennent-ils de sévir contre les personnes, les groupes ou les entités qui organisent l’immigration clandestine (article 68 alinéa 1 b) ou qui ont recours à la violence, à la menace ou à l'intimidation contre des travailleurs migrants (article 68 alinéa 1 c) et d’infliger des sanctions aux employeurs de travailleurs migrants en situation irrégulière (article 68 alinéa 2).

Le 7 février 2005, pour la sixième fois42, L’Espagne, suivant en cela l’exemple italien, a offert l’opportunité aux migrants irréguliers de régulariser leur situation et appelé les employeurs à se conformer à la loi. Cette opération de régularisation concernait environ 800 000 à 1 million de personnes.
Aux termes de l’article 69 de la Convention de 1990, « lorsque des travailleurs migrants et des membres de leur famille en situation irrégulière se trouvent sur leur territoire, les Etats parties prennent des mesures appropriées pour que cette situation ne se prolonge pas » (alinéa 1) et « chaque fois que les Etats parties intéressés envisagent la possibilité de régulariser la situation de ces personnes conformément aux dispositions de la législation nationale et aux accords bilatéraux ou multilatéraux applicables, ils tiennent dûment compte des circonstances de leur entrée, de la durée de leur séjour dans l'Etat d'emploi ainsi que d'autres considérations pertinentes, en particulier celles qui ont trait à leur situation familiale » (alinéa 2). En réalité, au sortir de cette campagne de régularisation, l’Espagne pouvait mieux maîtriser les flux migratoires vers son territoire en sortant du nationalisme ou du régionalisme juridique en adhérant au traité multilatéral puisque les migrants irréguliers ne proviennent pas de l’Union Européenne - dont les directives lient Madrid - mais de différents pays d’Amérique Latine (Equateur, Colombie, Argentine, …) mais aussi d’Afrique (Maroc, Sénégal, Guinée Conakry, Mauritanie, Mali, Libéria, Sierra Léone, …). Encore faut-il inscrire la démarche dans le cadre juridique international. Ainsi la politique migratoire espagnole pourrait davantage prospérer sur la base des engagements de coopération mutuelle, comme le veut la Convention, avec le Maroc et avec d’autres pays concernés par la situation espagnole. D’ailleurs, les dispositions de la Convention ne font pas oeuvre de substitution ni à la législation nationale ni au droit communautaire mais vient coordonner le mécanisme à l’échelle internationale, de sorte que les craintes d’un droit de regard international, « épée de Damoclès » selon certains, même s’il est réel à certains égards, s’avère plus bénéfique que nuisible. Pour preuve, des voix se sont élevées en Espagne même pour dénoncer ce qui est considéré comme une opération de charme destinée à attirer davantage de migrants clandestins. D’autres pays européens à l’instar de l’Allemagne ont aussi dénoncé une situation qui pourrait, à leurs yeux, produire des effets dangereux.

Visiblement le Livre Vert de la Commission européenne du 11 janvier 2005, qui entend mener une politique migratoire cohérente et globale, n’a pas convaincu l’Espagne de s’en remettre aux directives de la Commission européenne.

Loin d’être ce qu’est Cassandre dans la mythologie grecque, la Convention définit aussi un régime de coopération dont l’efficacité dépend de l’adhésion de la majorité des Etats. L’article 68 prévoit que « les Etats parties, y compris les Etats de transit, coopèrent afin de prévenir et d'éliminer les mouvements et l'emploi illégaux ou clandestins de travailleurs migrants en situation irrégulière » (alinéa 1). Pour parvenir à cette fin, les Etats doivent rapprocher leurs politiques d’immigration. La lutte concerne aussi bien l’immigration clandestine par mer que par terre43.

En demandant aux Etats de s’engager dans la recherche de mesures destinées à démanteler les réseaux qui organisent les mouvements clandestins de migrants et à punir les employeurs qui recourent à la main d’oeuvre irrégulière, la Convention ouvre des perspectives sérieuses susceptibles de répondre à ce défi. Cependant, seule une démarche concertée de la communauté internationale peut matérialiser ces dispositions.

II. – UNE CONVENTION REDOUTEE

A. - Des réticences sur certaines provisions conventionnelles

1. - Contrôle de la politique nationale

Les Etats craignent par le biais de la Convention une sorte de contrôle sur leur politique interne d’immigration. Les Etats sont, comme le relève Patrick Daillier et Alain Pellet « réticents pour admettre que des étrangers exercent une activité lucrative »44, tout spécialement dans les contextes de crise. Ces réticences apparaissent dans les discussions internationales consacrées à la question de la protection des travailleurs migrants. Lors de la consultation sur la résolution sur les droits des travailleurs migrants - dont le sponsor principal était le Mexique -, au cours de la 61e session de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies, certains pays - principalement ceux de l’Union européenne - avaient fait du retrait de la référence à la Convention sur les travailleurs migrants une condition substantielle, prenant argument du fait qu’aucun Etat de l’Union n’avait adhéré à la Convention (alors même que les autres instruments fondamentaux du système des Nations Unies y étaient mentionnés).

2. - Alignement des droits des migrants

Le Principe de l’alignement des droits des migrants sur ceux des nationaux fait figure d’épouvantail. Nombre des dispositions de la Convention font référence à ce principe qui, au final, semble constituer l’une des pierres angulaires de cet instrument. A l’analyse, il est remarquable que les Etats redoutent plus qu’une égratignure de leur pouvoir discrétionnaire dans la gestion des affaires publiques. La démarche d’alignement, dans certains domaines, des droits des travailleurs migrants sur ceux des nationaux - telle que consacrée par la Convention – est suivie par la jurisprudence européenne. En effet, la Cour de Justice des Communautés Européennes a, dès 1969, adopté une interprétation extensive de la notion de conditions de travail et admis que les travailleurs ressortissants d’un autre Etat membre de l’Union européenne bénéficient du traitement national45. Le Conseil d’Etat français, pour sa part, reste réticent à l’égard des techniques juridiques imaginées pour atteindre ce résultat, mais confirme le degré inédit de protection des libertés des étrangers dans le cadre communautaire européen46.



1 Le président du Comité intervenait lors de la session inaugurale du Comité tenue à Genève du 1er au 5 mars 2004.
2 Voici les références de tous les travaux préparatoires du Groupe de travail : A/C.3/35/13, A/36/378, A/36/383, A/C.3/36/10, A/C.3/37/1, A/C.3/37/7, A/C.3/38/1, A/C.3/38/5, A/C.3/39/1, A/C.3/39/4, A/C.3/40/1, A/C.3/40/6, A/C.3/41/3, A/C.3/42/1, A/C.3/42/6, A/C.3/43/1, A/C.3/43/7, A/C.3/44/1, A/C.3/44/4, A/C.3/45/1.
3 Article 87 : « La présente Convention entrera en vigueur le premier jour du mois suivant une période trois mois après la date de dépôt du vingtième instrument de ratification ou d'adhésion ».
4 Le texte de la Convention est disponible sur le site Internet du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, à l’adresse .
5 Au 8 juin 2005, 30 Etats avaient ratifié ou adhéré à la Convention : Algérie (21 avril 2005), Azerbaïdjan (11 janvier 1999), Belize (14 novembre 2001), Bolivie (16 octobre 2000), Bosnie-Herzégovine (13 décembre 1996), Burkina Faso (26 novembre 2003), Cap-Vert (16 septembre 1997), Chili (21 mars 2005), Colombie (24 mai 1995), Egypte (19 février 1993), El Salvador (14 mars 2003), Equateur (5 février 2002), Ghana (7 septembre 2000), Guinée (7 septembre 2000), Guatemala (14 mars 2003), Kirghizistan (29 septembre 2003), Libye (18 juin 2004), Mali (5 juin 2003), Maroc (21 juin 1993), Mexique (8 mars 1999), Ouganda (14 novembre 1995), Philippines (5 juillet 1995), Sénégal (9 juin 1999), Seychelles (15 décembre 1994), Sri Lanka (11 mars 1996), Syrie (2 juin 2005), Tadjikistan (8 janvier 2002), Timor Leste (30 janvier 2004), Turquie (27 septembre 2004) et Uruguay (15 février 2001). La liste des Etats parties est disponible à l’adresse .
6 Voir Enjeux des politiques migratoires, N° 2, mars 2003, publié par l’Organisation International des Migrations (OIM).
7 Chiffres de l’Organisation Internationale des Migrations fournis par M. Abye MAKONNEN dans sa présentation lors des Deuxième journée sur les migrations, les réfugiés et l’asile dont le thème était « Migrations et intégration : un défi pour l’Europe ? » le 19 janvier 2004.
8 Voir E/CN.4/Sub.2/2002/25 du 5 juin 2002. Disponible sur le site Internet du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme .
9 Avis consultatif OC-18 « Statut légal et droits des migrants irréguliers » du 17 septembre 2003, §§ 8-10.
10 CEDH, 26 février 2004, Nachova et autres c. Bulgarie.
11 Pour la jurisprudence de la CEDH relative au renversement de la charge de la preuve, voir : Salman c. Turquie [GC], Requête no 21986/93, § 97, CEDH 2000-VII ; Selmouni c. France [GC], Requête no 25803/94, § 87 ; CEDH 1999-V ; Čonka c. Belgique, Requête no 51564/99, § 61, CEDH 2002-I.
12 Emmanuel DECAUX, in La Déclaration universelle des droits de l’homme, Textes rassemblés par Mario BETTATI, Olivier DUHAMEL et Laurent GREILSAMER pour le Monde, Editions Gallimard, 1998, p. 35.
13 LOCHACK Danièle, Les Droits de l’Homme, Paris, Edition La Découverte, 2002, p. 100. (Collection Repères).
14 Voir les préoccupations exprimées dans les Observations finales du Comité contre l’élimination de toutes formes de discriminations raciales à propos de la Nouvelle Zélande du 1er novembre 2002, A/57/18, § 429. Voir aussi la Déclaration n°5 du Groupe de Travail sur la détention arbitraire intitulée « Situation relative au immigrants et demandeurs d’asile » à l’Annexe II, Rapport du Groupe de travail sur la détention arbitraire à la 56e session de la Commission des droits de l’homme, 28 décembre 1999, UN Index: E/CN.4/2000/4.
15 E/CN.4/2005/20 du 14 décembre 2004, § 53.
16 Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, sur l’immigration, l’intégration et l’emploi, 3 juin 2003, COM (2003) 336 final, p. 33. .
17 Voir E/CN.4/2003/L.11/Add.4 et la résolution 2003/48.
18 Etude sur les conséquences pour les droits de l’homme des développements récents concernant les situations dites d’état de siège ou d’exception, présentée par la Rapporteuse Spéciale Madame Nicole Questiaux au Point 10 de la trente-cinquième session de la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, Doc. E/CN.4/Sub.2/1982/15.
19 La Sous-Commission a changé de dénomination à pour devenir la Sous-Commission pour la protection et la promotion des droits de l’homme.
20 Observation générale de Comité des droits de l’homme en date du 24 juillet 2001 sur l’article 4 du Pacte contenue dans le document CCPR/C/21/Rev.1/Add.11, par. 16.
21 E/CN.4/Sub.2/2002/25 du 5 juin 2002, § 20. Voir aussi Manfred NOWAK, U.N. Covenant on Civil and Political Rights: CCPR Commentary, Kehl am Main and Arlington, Va., Engel, 1993, p. 86.
22 Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), affaire Sunday Times c. le Royaume-Uni (n° 2), Req. n° 13166/87, 26 novembre 1991, § 50 b). Voir Jean-Paul COSTA, « Liberté d’expression selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg », Actualité et Droit International, juin 2001, p. 2. .
23 Résolution de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples adoptée lors de sa 29ème Session Ordinaire à Tripoli en Libye du 23 avril au 7 mai 2001.
24 Toutes les résolutions, déclarations de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples sont disponibles sur le site de l’institution : .
25 Jean-Paul COSTA, op. cit. note 22, p. 4.
26 Voir l’Observation n° 15 du Comité des droits de l’homme des Nations Unies.
27 Voir Danièle LOCHAK, Les droits de l’homme, Paris, Editions La Découverte, 2002, p. 98. (Collection Repères).
28BÖHNING W.R. and WERQUIN J., The Future Status of Third-Countries Nationals in the European Community, Brussels, Churches Committee for Migrants in Europe, Briefing Paper n° 2, 1980, pp. 14-16.
29 PELETIER M., “Rights and Obligations of Unauthorized Immigrants in the Receiving Countries. Protection of the Fundamental Rights of Unauthorized Immigrants”, (1983) 21 International Migration 174, p. 182.
30 BOSNIAK S. Linda, Human Rights, State Sovreignty and the Protection of Undocumented Migrants Under the International Migrant Workers’ Convention, Leiden/Boston, Martinus Nijhoff Publishers, 2004, p. 325. Certains auteurs pensent que les travailleurs migrants irréguliers sont exclusifs du contrat social qui lie la communauté nationale. Voir à cet égard L. HENKIN, The Age of Rights, New York, Colombia University Press, 1990, pp. 47-50.
31 Sur la distinction entre obligations réciproques et intégrales-objectives, voir les travaux de la Commission du Droit International (CDI), notamment ceux du deuxième Rapporteur spécial en la matière, G.G. Fitzmaurice. Voir aussi l’Annuaire de la CDI 1957- II, pp. 54 à 55 et aussi le Troisième rapport de 1958- II, pp. 27 à 28.
32 A/CONF.157/23, 12 juillet 1993, Préambule § 15.
33 A/CONF.157/23, 12 juillet 1993, Préambule § 5
34 Cons. const., n° 94-359 DC du 19 janv. 1995, Diversité de l'habitat, cons. 7, Rec. 176.
35 Commentaire Général N°4 relatif au droit à un logement convenable élaboré par le Comité des droits économiques des droits économiques, sociaux et culturels.
36 A/res/55/2 du 8 septembre 2000.
37 C.E., 8 décembre 1978, Groupement d’Information et de Soutien des Travailleurs Immigrés GISTI et autres, Lebon. 492, Conclusions Dondoux. Pour d’autres détails voir BONNECHERE, Droit ouvrier, 1979, p. 1 ; DUTHEILLET DE LAMOTTE et ROBINEAU, A.J.D.A., 1979, p. 38, chronique ; L. HAMON, Dalloz, p. 661.
38 Communication de la commission au conseil, au parlement européen, au comité économique et social européen et au comité des régions sur l’immigration, l’intégration et l’emploi, Commission des communautés européennes, Bruxelles, le 3 juin 2003, COM (2003) 336 final.
39 39 Danièle LOCHACK, op. cit., p. 99.
40 DAILLIER (Patrick) et PELLET (Alain), Droit International Public, Paris, L.G.D.J., 2002, p. 673.
41 Voir Communication concernant une politique commune en matière d'immigration clandestine pour l’Europe COM (2001)672 du 15 novembre 2001.
42 Cette opération de régularisation avait eu lieu en 1991 et 1992 sous le gouvernement socialiste de Felipe Gonzalez qui a régularisé 108 321 personnes, puis en 1996, 2000 et 2001 sous les gouvernements conservateurs de José Maria Aznar qui a bénéficié à 480 185 migrants.
43 Voir Djamchid MOMTAZ, « Les infractions liées aux activités maritimes », in Droit International Pénal, sous la direction de Hervé ASCENSIO, Emmanuel DECAUX et Alain PELLET, Paris, Editions Pedone, 2000, pp. 517- 518.
44 DAILLIER (Patrick) et PELLET Alain, Droit International Public, Paris, L.G.D.J., 2002, p. 679.
45 CJCE, affaires 15/69, 15 octobre 1969, Württembergische Milchverwertung Südmilch AG / Ugliola, Rec. 1969, p. 363 et 76/72, 11 avril 1973, Michel S. / Fonds national de reclassement social des handicapés, Rec. 1973, p. 457.
46 Voir CE, 21 janvier 1977, Ministre de l’intérieur c/ Dridi.
Droits fondamentaux, n° 4, janvier - décembre 2004 www.droits-fondamentaux.org
62 Yao AGBETSE

3. - Le regroupement familial

L’un des points d’achoppement particulièrement problématique réside dans le principe du regroupement familial qui ressort de l’article 44 de la Convention. Ce texte appelle en effet les Etats à prendre les mesures appropriées pour « assurer la protection de l’unité de la famille du travailleur migrant » (article 44 alinéa 1) et « faciliter la réunion des travailleurs migrants avec leur conjoint ou avec les personnes ayant avec eux des relations qui, en vertu de la loi applicable, produisent des effets équivalant au mariage, ainsi qu'avec leurs enfants à charge mineurs et célibataires » (article 44 alinéa 2).

Le droit au regroupement familial est reconnu d’une manière générale par les conventions en vigueur.

La jurisprudence est, pour la plupart, largement favorable à l’octroi aux travailleurs migrants du droit de « mener une vie familiale normale ». Ainsi en a décidé le Conseil d’Etat français dans une décision en date du 8 décembre 197847. Les divergences ont vu le jour au niveau de la nature de la notion de famille dans les différents systèmes juridiques.

Selon une doctrine autorisée, l’article 44 constitue le siège d’un régime qui organise le regroupement familial, concept « particulièrement délicat des problèmes posés par les travailleurs migrants »48

4. - Le choix libre de l’activité rémunérée

Les Etats entendent conserver leur pouvoir discrétionnaire en matière d’accès à certains emplois hautement sensibles. Certes, l’article 52 pose le principe du libre accès mais prévoit plusieurs exceptions pour autant qu’elles soient contenues dans la législation nationale ou dans des accords bilatéraux. Permettre à un travailleur migrant de choisir son activité, y compris celle relevant d’une extrême sensibilité, s’apparente pour les Etats à une atteinte à leur souveraineté.

5. - Les droits sociaux et culturels

L’accès aux traitements et aux soins psychiatriques est une question cruciale pour les populations marginalisées et vulnérables. Dans son rapport à la session 2005 de la Commission des droits de l’homme, le Groupe travail intergouvernemental sur l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban adopté en septembre 2001, a souligné la « nécessité de faire en sorte que les services de santé mentale soient accessibles, peu onéreux, et répondent aux besoins des populations marginalisées, y compris les migrants »49. Dispenser une éducation aux femmes et aux filles autochtones était également un moyen efficace de les rendre autonomes, compte tenu de leur vulnérabilité aux problèmes de santé mentale. Assumer toutes ces responsabilités pour les Etats ressemble à un engagement titanesque et source d’une obligation internationale complémentaire.

Souvent, ce sont les opinions publiques nationales des Etats qui paraissent défavorables à l’accès aux services sociaux, notamment aux soins de santé. Bien évidemment le gouvernement, quelle que soit sa couleur politique, reste attentif aux appréhensions exprimées. Toutefois, l’apport des migrants au système de protection sociale pourrait s’avérer d’une contribution importante.

B. - Des réticences réconciliables avec les principes fondamentaux des droits de l’homme

Incontestablement, le phénomène des migrations reste une question très sensible qui relève traditionnellement de la compétence exclusive des Etats. Cependant, les différentes mutations intervenues dans le monde ces dernières années ont changé la donne. Selon une doctrine autorisée, « la coexistence des Etats, leur interdépendance croissante, le rôle des organisations internationales en vue d’une plus grande protection des individus et d’une meilleure cohérence des politiques nationales […] introduisent des limitations très sensibles à la discrétion reconnue en principe de gouvernements »50. Par ailleurs, le statut international des étrangers - et des migrants en particulier - a connu un développement remarquable avec des instruments internationaux qui soulèvent les préoccupations relatives au respect de leurs droits fondamentaux y compris les droits économiques. En outre, des organisations de défense des droits de l’homme oeuvrent inlassablement pour l’effectivité de ces droits.

Un regard exégétique sur ce qui semble constituer l’obstacle principal à l’adhésion des Etats montre que les hésitations résident moins dans un conservatisme juridique national que dans un consensus communautaire difficile à acquérir. L’exemple de l’Union européenne est assez illustratif. Les politiques de quotas pratiquées par certains pays ont montré leurs limites. Le quota par regroupement familial - modèle autrichien - n’a pas réussi. La France, avec son système de quota par filière, n’est pas arrivée à conjurer l’immigration clandestine. Beaucoup de problèmes - et surtout d’incohérences - subsistent avec d’autres pays de l’espace européen.
Le Livre Vert de la Commission des communautés européennes du 11 janvier 200551 a relancé le débat sur les questions posées par l’immigration. La politique commune proposée par la Commission se heurte à l’hostilité de nombreux Etats qui font prévaloir leur souveraineté. Aujourd’hui, il y 357 millions d’habitants dans les 25 pays de l’UE. Selon leurs projections, entre 2010 et 2030, l’Europe perdra au moins vingt millions de travailleurs. Les experts européens estiment que l’effet conjugué du vieillissement et du déclin démographique aura des effets inévitables sur l’économie de l’Union européenne.

Les politiques nationales offrent l’opportunité aux migrants clandestins de profiter des failles des dysfonctionnements. Le prix économique risque d’être élevé. La Convention semble représenter le chemin capable de rendre plus cohérent, coordonné, concerté et maîtrisé le « management » du phénomène migratoire et la garantie des droits aux travailleurs migrants.

Nonobstant l’attention que requiert la protection des droits des travailleurs migrants sur le plan régional, des voix s’élèvent de plus en plus pour recommander une union sacrée autour de la Convention de 1990. C’est ainsi que l’Assemblée générale de l’Organisation des Etats Américains (OEA), mesurant l’envergure des questions migratoires, a souligné l’importance de la ratification de la Convention dans sa résolution 1898 en date du 4 juin 2002 intitulée « Les droits humains de tous les travailleurs migrants et de leur famille »52 et demander aux Etats membres de l’OEA qui ne l’ont pas encore fait d’adhérer à la Convention.

Le Parlement européen a effectué un pas de géant en février 2005 dans sa résolution sur les priorités et les recommandations de l'Union européenne dans la perspective de la 61e session de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies53. Cette résolution constitue un changement de ton dans le discours d’une Europe plutôt réticente à l’égard de la Convention de 1990. En effet, les députés européens siégeant à Strasbourg ont, dans cette résolution du 24 février 2005, invité la Présidence européenne à parrainer ou à coparrainer des résolutions sur les travailleurs migrants (§ 8), invité « les États membres à ratifier la Convention des Nations unies sur les travailleurs migrants et à soutenir sa ratification universelle » et demandé « à cet égard, à l'Union européenne d'appuyer vigoureusement le renouvellement du mandat du rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants » (§ 22).

Aussi, dans son discours introductif à la 58e session de la Commission des droits de l’homme, Madame Mary Robinson - alors Haut Commissaire aux droits de l’homme - avait-elle insisté sur les proportions énormes que prennent les flux migratoires et l’absolue nécessité d’« instaurer sans tarder un nouveau régime de protection des droits de l'homme pour les migrants ». « La Convention marquerait le début d'une nouvelle ère dans le domaine de l'action visant à inscrire les droits des travailleurs migrants dans la législation internationale et à assurer la protection et le respect de ces droits »54, avait-elle ajouté.

Il est intéressant de remarquer que certains Etats, comme la Suisse, jugent la Convention de 1990 « problématique » mais reconnaissent qu’elle a comme « objectif déclaré de freiner la migration illégale »55.
52 Voir Résolution E/CN.4/2003/80 du 26 décembre 2002 de la Commission des droits de l’homme des Nations Unies, § 7.

Une analyse approfondie de la Convention apporte des réponses substantielles aux différentes craintes. L’article 35 concentre en lui seul des éléments qui dissipent les doutes, lorsqu’il dispose qu’« aucune disposition de la présente partie de la Convention ne peut être interprétée comme impliquant la régularisation de la situation des travailleurs migrants ou des membres de leur famille dépourvus de documents ou en situation irrégulière, ni un droit quelconque à cette régularisation de leur situation, ni comme affectant les mesures visant à assurer des conditions saines et équitables pour les migrations internationales […] ». Voilà qui devrait rassurer et fédérer les énergies afin de parvenir à gérer au mieux les questions liées au phénomène migratoire, à sa gestion et à la protection des droits des migrants. Le devoir de coopérer contribue lui aussi à engager les Etats à assumer leur responsabilité internationale et à respecter les droits de l’homme.

CONCLUSION

La Convention sur les travailleurs migrants et les membres de leur famille est entrée dans l’ordonnancement juridique international par la volonté des Etats. L’effectivité de sa mise en oeuvre reste également tributaire de l’action volontariste de ceux-ci. Mais il semble que, dans le cas précis du phénomène migratoire, à cause des énormes défis qu’il pose et l’urgence de la protection des travailleurs migrants qu’il entraîne, le facteur temps soit un élément déterminant non pas dans le sens de la normalisation naturelle de la situation mais plutôt dans le sens de sa complexification.

Aux termes de cette réflexion, il est serait indiqué de faire la part des choses. Ou bien la communauté internationale accepte dans son ensemble d’intégrer sa stratégie globale de gestion du phénomène migratoire et de lutte contre l’immigration dans les dispositions de la Convention de 1990 - et ainsi profite des effets bénéfiques de l’immigration -, ou bien elle se réfugie dans le nationalisme ou régionalisme juridique avec ses contingences et ses complexités par des systèmes de quotas - qu’il soit par pays, par filière économique ou encore par regroupement familial - ou encore par d’autres initiatives unilatérales qui créent davantage de problèmes qu’ils n’en résolvent. Dans ce dernier cas, non seulement les retombées positives des flux migratoires lui échapperont mais également se créeront et couveront les germes d’une déstabilisation sociale sur le long terme. Dès lors, faire de la Convention un instrument universel par une adhésion massive devient plus qu’une nécessité mais un objectif à atteindre. Pour y parvenir, il faudrait joindre aux actes concrets une diplomatie active. Faire tomber aussi des barrières Nord/Sud semble aussi indispensable.

C’est une tâche ardue qui attend le Comité sur les travailleurs migrants et ses membres, qui, de façon individuelle ou collective, endossent la lourde responsabilité de créer une jurisprudence susceptible de convaincre les Etats d’adhérer à la Convention, de formater un creuset capable d’assurer une protection optimale à cette population vulnérable que sont les travailleurs migrants. Il appartient aussi surtout aux Etats d’être plus réceptifs et d’assumer pleinement leurs engagements internationaux proclamés en matière de respect des droits de l’homme dans les divers instruments internationaux et déclarations et plans d’action des conférences internationales sur les droits de l’homme. Le caractère objectif et intégral des normes de droits de l’homme, leur interdépendance et leur indivisibilité, la réaffirmation de la jouissance des droits de l’homme par tous sans exclusion devraient en principe suffire à rallier les positions. Une meilleure connaissance du contenu des dispositions conventionnelles par les Etats s’avère aussi nécessaire.

Le XXIe siècle ne se fera pas sans la maîtrise des flux migratoires et la protection des travailleurs migrants. Si les Etats ne prennent pas suffisamment la mesure du défi et des enjeux, la vague de l’immigration clandestine risque d’emporter sur son passage les efforts réalisés jusque-là.

NOTES :


1 Le président du Comité intervenait lors de la session inaugurale du Comité tenue à Genève du 1er au 5 mars 2004.
2 Voici les références de tous les travaux préparatoires du Groupe de travail : A/C.3/35/13, A/36/378, A/36/383, A/C.3/36/10, A/C.3/37/1, A/C.3/37/7, A/C.3/38/1, A/C.3/38/5, A/C.3/39/1, A/C.3/39/4, A/C.3/40/1, A/C.3/40/6, A/C.3/41/3, A/C.3/42/1, A/C.3/42/6, A/C.3/43/1, A/C.3/43/7, A/C.3/44/1, A/C.3/44/4, A/C.3/45/1.
3 Article 87 : « La présente Convention entrera en vigueur le premier jour du mois suivant une période trois mois après la date de dépôt du vingtième instrument de ratification ou d'adhésion ».
4 Le texte de la Convention est disponible sur le site Internet du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, à l’adresse .
5 Au 8 juin 2005, 30 Etats avaient ratifié ou adhéré à la Convention : Algérie (21 avril 2005), Azerbaïdjan (11 janvier 1999), Belize (14 novembre 2001), Bolivie (16 octobre 2000), Bosnie-Herzégovine (13 décembre 1996), Burkina Faso (26 novembre 2003), Cap-Vert (16 septembre 1997), Chili (21 mars 2005), Colombie (24 mai 1995), Egypte (19 février 1993), El Salvador (14 mars 2003), Equateur (5 février 2002), Ghana (7 septembre 2000), Guinée (7 septembre 2000), Guatemala (14 mars 2003), Kirghizistan (29 septembre 2003), Libye (18 juin 2004), Mali (5 juin 2003), Maroc (21 juin 1993), Mexique (8 mars 1999), Ouganda (14 novembre 1995), Philippines (5 juillet 1995), Sénégal (9 juin 1999), Seychelles (15 décembre 1994), Sri Lanka (11 mars 1996), Syrie (2 juin 2005), Tadjikistan (8 janvier 2002), Timor Leste (30 janvier 2004), Turquie (27 septembre 2004) et Uruguay (15 février 2001). La liste des Etats parties est disponible à l’adresse .
6 Voir Enjeux des politiques migratoires, N° 2, mars 2003, publié par l’Organisation International des Migrations (OIM).
7 Chiffres de l’Organisation Internationale des Migrations fournis par M. Abye MAKONNEN dans sa présentation lors des Deuxième journée sur les migrations, les réfugiés et l’asile dont le thème était « Migrations et intégration : un défi pour l’Europe ? » le 19 janvier 2004.
8 Voir E/CN.4/Sub.2/2002/25 du 5 juin 2002. Disponible sur le site Internet du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme .
9 Avis consultatif OC-18 « Statut légal et droits des migrants irréguliers » du 17 septembre 2003, §§ 8-10.
10 CEDH, 26 février 2004, Nachova et autres c. Bulgarie.
11 Pour la jurisprudence de la CEDH relative au renversement de la charge de la preuve, voir : Salman c. Turquie [GC], Requête no 21986/93, § 97, CEDH 2000-VII ; Selmouni c. France [GC], Requête no 25803/94, § 87 ; CEDH 1999-V ; Čonka c. Belgique, Requête no 51564/99, § 61, CEDH 2002-I.
12 Emmanuel DECAUX, in La Déclaration universelle des droits de l’homme, Textes rassemblés par Mario BETTATI, Olivier DUHAMEL et Laurent GREILSAMER pour le Monde, Editions Gallimard, 1998, p. 35.
13 LOCHACK Danièle, Les Droits de l’Homme, Paris, Edition La Découverte, 2002, p. 100. (Collection Repères).
14 Voir les préoccupations exprimées dans les Observations finales du Comité contre l’élimination de toutes formes de discriminations raciales à propos de la Nouvelle Zélande du 1er novembre 2002, A/57/18, § 429. Voir aussi la Déclaration n°5 du Groupe de Travail sur la détention arbitraire intitulée « Situation relative au immigrants et demandeurs d’asile » à l’Annexe II, Rapport du Groupe de travail sur la détention arbitraire à la 56e session de la Commission des droits de l’homme, 28 décembre 1999, UN Index: E/CN.4/2000/4.
15 E/CN.4/2005/20 du 14 décembre 2004, § 53.
16 Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, sur l’immigration, l’intégration et l’emploi, 3 juin 2003, COM (2003) 336 final, p. 33. .
17 Voir E/CN.4/2003/L.11/Add.4 et la résolution 2003/48.
18 Etude sur les conséquences pour les droits de l’homme des développements récents concernant les situations dites d’état de siège ou d’exception, présentée par la Rapporteuse Spéciale Madame Nicole Questiaux au Point 10 de la trente-cinquième session de la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, Doc. E/CN.4/Sub.2/1982/15.
19 La Sous-Commission a changé de dénomination à pour devenir la Sous-Commission pour la protection et la promotion des droits de l’homme.
20 Observation générale de Comité des droits de l’homme en date du 24 juillet 2001 sur l’article 4 du Pacte contenue dans le document CCPR/C/21/Rev.1/Add.11, par. 16.
21 E/CN.4/Sub.2/2002/25 du 5 juin 2002, § 20. Voir aussi Manfred NOWAK, U.N. Covenant on Civil and Political Rights: CCPR Commentary, Kehl am Main and Arlington, Va., Engel, 1993, p. 86.
22 Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), affaire Sunday Times c. le Royaume-Uni (n° 2), Req. n° 13166/87, 26 novembre 1991, § 50 b). Voir Jean-Paul COSTA, « Liberté d’expression selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg », Actualité et Droit International, juin 2001, p. 2. .
23 Résolution de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples adoptée lors de sa 29ème Session Ordinaire à Tripoli en Libye du 23 avril au 7 mai 2001.
24 Toutes les résolutions, déclarations de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples sont disponibles sur le site de l’institution : .
25 Jean-Paul COSTA, op. cit. note 22, p. 4.
26 Voir l’Observation n° 15 du Comité des droits de l’homme des Nations Unies.
27 Voir Danièle LOCHAK, Les droits de l’homme, Paris, Editions La Découverte, 2002, p. 98. (Collection Repères).
28BÖHNING W.R. and WERQUIN J., The Future Status of Third-Countries Nationals in the European Community, Brussels, Churches Committee for Migrants in Europe, Briefing Paper n° 2, 1980, pp. 14-16.
29 PELETIER M., “Rights and Obligations of Unauthorized Immigrants in the Receiving Countries. Protection of the Fundamental Rights of Unauthorized Immigrants”, (1983) 21 International Migration 174, p. 182.
30 BOSNIAK S. Linda, Human Rights, State Sovreignty and the Protection of Undocumented Migrants Under the International Migrant Workers’ Convention, Leiden/Boston, Martinus Nijhoff Publishers, 2004, p. 325. Certains auteurs pensent que les travailleurs migrants irréguliers sont exclusifs du contrat social qui lie la communauté nationale. Voir à cet égard L. HENKIN, The Age of Rights, New York, Colombia University Press, 1990, pp. 47-50.
31 Sur la distinction entre obligations réciproques et intégrales-objectives, voir les travaux de la Commission du Droit International (CDI), notamment ceux du deuxième Rapporteur spécial en la matière, G.G. Fitzmaurice. Voir aussi l’Annuaire de la CDI 1957- II, pp. 54 à 55 et aussi le Troisième rapport de 1958- II, pp. 27 à 28.
32 A/CONF.157/23, 12 juillet 1993, Préambule § 15.
33 A/CONF.157/23, 12 juillet 1993, Préambule § 5
34 Cons. const., n° 94-359 DC du 19 janv. 1995, Diversité de l'habitat, cons. 7, Rec. 176.
35 Commentaire Général N°4 relatif au droit à un logement convenable élaboré par le Comité des droits économiques des droits économiques, sociaux et culturels.
36 A/res/55/2 du 8 septembre 2000.
37 C.E., 8 décembre 1978, Groupement d’Information et de Soutien des Travailleurs Immigrés GISTI et autres, Lebon. 492, Conclusions Dondoux. Pour d’autres détails voir BONNECHERE, Droit ouvrier, 1979, p. 1 ; DUTHEILLET DE LAMOTTE et ROBINEAU, A.J.D.A., 1979, p. 38, chronique ; L. HAMON, Dalloz, p. 661.
38 Communication de la commission au conseil, au parlement européen, au comité économique et social européen et au comité des régions sur l’immigration, l’intégration et l’emploi, Commission des communautés européennes, Bruxelles, le 3 juin 2003, COM (2003) 336 final.
39 39 Danièle LOCHACK, op. cit., p. 99.
40 DAILLIER (Patrick) et PELLET (Alain), Droit International Public, Paris, L.G.D.J., 2002, p. 673.
41 Voir Communication concernant une politique commune en matière d'immigration clandestine pour l’Europe COM (2001)672 du 15 novembre 2001.
42 Cette opération de régularisation avait eu lieu en 1991 et 1992 sous le gouvernement socialiste de Felipe Gonzalez qui a régularisé 108 321 personnes, puis en 1996, 2000 et 2001 sous les gouvernements conservateurs de José Maria Aznar qui a bénéficié à 480 185 migrants.
43 Voir Djamchid MOMTAZ, « Les infractions liées aux activités maritimes », in Droit International Pénal, sous la direction de Hervé ASCENSIO, Emmanuel DECAUX et Alain PELLET, Paris, Editions Pedone, 2000, pp. 517- 518.
44 DAILLIER (Patrick) et PELLET Alain, Droit International Public, Paris, L.G.D.J., 2002, p. 679.
45 CJCE, affaires 15/69, 15 octobre 1969, Württembergische Milchverwertung Südmilch AG / Ugliola, Rec. 1969, p. 363 et 76/72, 11 avril 1973, Michel S. / Fonds national de reclassement social des handicapés, Rec. 1973, p. 457.
46 Voir CE, 21 janvier 1977, Ministre de l’intérieur c/ Dridi.
47 C.E., 8 décembre 1978, GISTI.
48 DAILLIER Patrick et PELLET Alain, op. cit.
49 E/CN.4/2005/20 du 14 décembre 2004, § 24.
50 Alain PELLET et Patrick DAILLIER , op. cit., p. 673.
51 Livre Vert sur une approche communautaire de la gestion des migrations économiques, COM(2004) 811 final, 11 janvier 2005.
53 Résolution du Parlement européen sur les priorités et les recommandations de l'Union européenne dans la perspective de la 61e session de la commission des droits de l'homme des Nations Unies, qui se tiendra à Genève du 14 mars au 22 avril 2005, P6_TA-PROV(2005)0051.
54 Rapport du Secrétaire général des Nations Unies sur l’état de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, A/57/291 du 9 août 2002, § 9 in fine.
55 Le 10 septembre 2003, le Conseil fédéral helvétique, suite à des débats au parlement fédéral, avait fait connaître les intentions de la Suisse par rapport à la ratification de la Convention de 1990. Voir Le Courrier, quotidien suisse d'information et d'opinion édité à Genève, 24 octobre 2003.