vendredi, juin 30, 2006

Circulaire Sarkozy du 13 juin 2006 sur la régularisation de certaines familles avec enfant.

A cause de la rumeur d'une "régularisation massive" des familles sans papiers, des appels sont reçus par les confrères. Les rumeurs sont fausses car les conditions cumulatives nécessaires sont rarement réunies. Le texte est disponible sur : http://www.educationsansfrontieres.org/IMG/pdf/Circulaire_enfants_scolarises_V2.pdf

Je me permets de donner certains éclaircissements sur cette circulaire qui fait naître beaucoup d'espoirs des sans papiers:

Le ministre de l'intérieur énumère six critères:

1- Résidence habituelle en France depuis au moins deux ans à la date de la publication de la circulaire (14 juin 2006) d'au moins l'un des parents;

2- Scolarisation effective d'un de leurs enfants au moins, en France, y compris en classe maternelle au moins depuis septembre 2005;

3- Naissance en France d'un enfant ou résidence habituelle en France d'un enfant depuis qu'il a atteint au plus l'âge de 13 ans;

4- Absence de lien de cet enfant avec le pays de la nationalité;

5- Contribution effective du ou des parents à l'entretien et à l'éducation;

6- Réelle volonté d'intégration de ces familles, caractérisée , notamment par, outre la scolarisation des enfants, leur maîtrise du français, le sérieux des études et l'absence de trouble à l'ordre public.

Ces critères sont cumulatifs. Aucun recours n'est possible car il s'agit d'une circulaire et non d'une loi ou d'un décret.

Ces dispositions d'admission exceptionnelle au séjour n'ont selon le ministre de l'intérieur vocation à bénéficier qu'aux familles qui auront refusé l'aide au retour exceptionnelle, auront déposé leur demande dans les deux mois qui suivent la publication de cette circulaire (soit avant le 13 août 2006). A mon avis les dossiers doivent être bétonnés et il faut conseiller aux clients de s'inscrire dans un cours de Français.

Comme le rappelle le réseau éducation sans frontière (RESF) :

Il faut impérativement déconseiller aux personnes qui ne remplissent pas les critères objectifs de se présenter en préfecture (sauf si c’est pour obtenir une aide au retour) puisque les expulsions de familles d’enfants scolarisés vont reprendre.
Les personnes qui ne doivent pas se présenter sont celles :
- dont l’enfant n’est pas scolarisé depuis septembre 2005
- dont l’enfant n’est pas soit né en France soit entré avant l’âge de treize ans
- dont les parents ne résident pas habituellement en France depuis juin 2004
- qui font l’objet d’une procédure de réadmission « Dublin »

En plus de ces personnes, il convient d’être extrêmement prudent pour ceux qui :
- ont eu un APRF notifié depuis moins d’un an
- ont demandé un réexamen de leur situation qui a été rejeté depuis moins d’un an, surtout si la demande a été déposée sur la base de la circulaire du 31 octobre 2005 (qui prévoyait que lorsque les familles ne remplissaient pas les conditions pour obtenir une carte de séjour mention "vie privée et familiale" il était possible de leur accorder une régularisation exceptionnelle et humanitaire lorsque la famille était intégrée : logement, promesse d'embauche pour les parents, maîtrise du français, scolarisation et suivi éducatif des enfants, sérieux des études). En effet, les critères étant presque les mêmes, si la demande a déjà été rejetée il est probable qu’elle le soit de nouveau.

Ceux qui remplissent les critères objectifs pourront tout de même voir leur demande rejetée, sur la base des autres critères, beaucoup plus flous :
- l’absence de lien de l’enfant avec le pays dont il a la nationalité
- la contribution effective des parents à l’entretien et l’éducation de l’enfant
- la volonté d’intégration de la famille

Conseils à la Circulaire du 13 juin 2006 sur les familles d’enfants scolarisés


Conseils à la Circulaire du 13 juin 2006 sur les familles d’enfants scolarisés

Source : Réseau d'éducation sans frontière

Depuis l’annonce de la circulaire Sarkozy sur les familles d’enfants scolarisés, de très nombreuses personnes nous interrogent pour connaître leurs chances de régularisation.

Voici à chaud un premier commentaire sur cette circulaire afin d’être en mesure de donner des conseils à ces personnes et d’essayer d’éviter de leur faire courir de trop grands risques.

Il s’agit d’une première réaction qu’il conviendra d’affiner en fonction des pratiques des préfectures que nous observerons dans les prochaines semaines : toutes les préfectures ne réagiront sans doute pas de la même manière et il est possible que les pratiques évoluent au fil du temps.

Il convient déjà de renoncer à toute illusion. Ce n’est pas une circulaire qui entend régulariser massivement les familles sans papier. C’est avant tout une mesure médiatique comme Sarkozy nous a déjà habitué à procéder. Le chiffre de 1000 familles (ou enfants ?) concernés était encore maintenu par Christian Estrosi lors de son intervention au Sénat le 13 juin, malgré l’élargissement apparent des critères. Il semblerait en réalité que les préfets ont déjà sélectionné un certain nombre de dossier — entre autre signalés par les collectifs RESF — et qu’ils ne régulariseront pas beaucoup plus. Les critères volontairement flous et vasouilleux de la circulaire sont faits pour maintenir ce pouvoir discrétionnaire.

La circulaire prévoit 3 mesures :
- la fin de la période de suspension de l’éloignement des familles d’enfants scolarisés
- une aide au retour pour les familles d’enfants scolarisés dont le montant est doublé par rapport au montant habituel
- une possibilité de régularisation exceptionnelle des familles d’enfants scolarisés, si elles remplissent certains critères

Sur l’aide au retour :

Seules les familles en situation irrégulière dont au moins l’un des enfants est scolarisé peuvent prétendre à cette mesure exceptionnelle.
Si la demande est déposée avant le 13 août 2006, le montant de l’aide sera doublé par rapport au montant habituel (par exemple pour un couple avec deux enfants le montant habituel est de 5500 euros, qui est porté à 11 000 euros pendant une période de deux mois).
Si la demande est déposée après le 13 août 2006, on peut supposer que l’aide au retour concernera toujours ces familles mais que le montant alloué sera inférieur

Sur la régularisation exceptionnelle :

Il s’agit d’une mesure ponctuelle pour des dossiers déposés en préfecture avant le 13 août 2006.
De très nombreux critères sont fixés, dont il y a toutes les raisons de penser qu’ils sont cumulatifs. Certains sont objectifs et d’autres extrêmement flous.
Beaucoup de familles ne rempliront pas les conditions, et même celles qui les remplissent ne sont absolument pas assurées d’obtenir une régularisation.

Il faut impérativement déconseiller aux personnes qui ne remplissent pas les critères objectifs de se présenter en préfecture (sauf si c’est pour obtenir une aide au retour) puisque les expulsions de familles d’enfants scolarisés vont reprendre.
Les personnes qui ne doivent pas se présenter sont celles :
- dont l’enfant n’est pas scolarisé depuis septembre 2005
- dont l’enfant n’est pas soit né en France soit entré avant l’âge de treize ans
- dont les parents ne résident pas habituellement en France depuis juin 2004
- qui font l’objet d’une procédure de réadmission « Dublin »

En plus de ces personnes, il convient d’être extrêmement prudent pour ceux qui :
- ont eu un APRF notifié depuis moins d’un an
- ont demandé un réexamen de leur situation qui a été rejeté depuis moins d’un an, surtout si la demande a été déposée sur la base de la circulaire du 31 octobre 2005 (qui prévoyait que lorsque les familles ne remplissaient pas les conditions pour obtenir une carte de séjour mention "vie privée et familiale" il était possible de leur accorder une régularisation exceptionnelle et humanitaire lorsque la famille était intégrée : logement, promesse d'embauche pour les parents, maîtrise du français, scolarisation et suivi éducatif des enfants, sérieux des études). En effet, les critères étant presque les mêmes, si la demande a déjà été rejetée il est probable qu’elle le soit de nouveau.

Ceux qui remplissent les critères objectifs pourront tout de même voir leur demande rejetée, sur la base des autres critères, beaucoup plus flous :
- l’absence de lien de l’enfant avec le pays dont il a la nationalité
- la contribution effective des parents à l’entretien et l’éducation de l’enfant
- la volonté d’intégration de la famille

Sur l’absence de lien avec le pays d’origine :
Il est extrêmement difficile de savoir de quoi il s’agit : des liens familiaux, affectifs…. ?
De plus il est par définition presque impossible de démontrer l’absence de quelque chose.

Sur la contribution des parents à l’entretien et à l’éducation de l’enfant depuis sa naissance :
Cette condition existe déjà pour la délivrance d’un titre de séjour aux parents d’enfants français. On peut donc supposer que les exigences concernant les familles d’enfants scolarisés seront a peu près les mêmes que pour les parents d’enfants français. Pour ces derniers, la circulaire du 20 janvier 2004 prévoit« vous veillerez à ce que le défaut de ressources ne soit pas un obstacle à l’admission au séjour du demandeur, dès lors que celui-ci établit par tout autre moyen remplir ses obligations légales en matière de surveillance et d’éducation de l’enfant. En cas de séparation des parents, vous pourrez vous référer utilement, le cas échéant, à la convention visée à l’article 373-2-7 du code civil qui aura été homologuée par le juge aux affaires familiales, par laquelle les parents organisent les modalités d’exercice de l’autorité parentale et fixe le montant de la pension alimentaire. Bien entendu, vous ferez une appréciation pragmatique du critère énoncé par l’article 12 bis 6° lorsque le dossier fera apparaître une communauté de résidence entre l’enfant et le parent qui sollicite la carte de séjour ».
Ainsi, il ne devrait pas y avoir de difficulté majeure pour ceux qui résident avec leurs enfants ; pour les autres au contraire il faudra prouver le lien entre le parent et l’enfant.
Pour la participation à l’éducation, il faudra prouver que le parent passe du temps avec l’enfant : facture téléphone détaillée, billets de train, attestation du pédiatre, de l’assistante sociale, de l’école, des amis, etc…, qui certifient que le parent s’occupe de son enfant
Pour la participation à l’entretien : apporter si possible la preuve de virements bancaires ou de don d’argent, facture pour l’achat de vêtement pour les enfants, de fournitures scolaires, de mobilier…..

Sur la volonté d’intégration de la famille :
- Condition de maîtrise de la langue française : il semble que cette condition ne concerne pas seulement les enfants mais aussi leurs parents. Dans certaines familles cette condition va poser des difficultés importantes
- Suivi éducatif des enfants : il s’agit d’une condition proche de la « contribution à l’éducation de l’enfant »
- Sérieux des études : produire les bulletins si l’enfant a des bonnes notes et si ce n’est pas le cas compléter par des attestations des professeurs insistant sur son assiduité, ses progrès, son comportement…..
- Absence de trouble à l’ordre public

Quelques conseils :

Au regard de ces critères il est impératif de conseiller aux familles de demander aux écoles toutes sortes d’attestations, avant leur fermeture : bulletins de notes, livret scolaire, attestation de scolarité, attestation des professeurs sur le sérieux des études, attestation des professeurs ou des travailleurs sociaux sur le suivi éducatif des parents à l’égard de leur enfant (attestation mentionnant que le parent participe aux réunions organisées entre les parents et les professeurs, qu’il a rencontré l’assistant social de l’école pour faire part des difficultés de son enfant…..).

Il convient de prévenir les familles des risques de rejet de leur demande et des risques d’expulsion qui peuvent découler de ce refus. En effet, si le ministère demande aux préfectures de se prononcer sur la demande de régularisation dans un délai d’un mois et en tout état de cause avant la rentrée scolaire c’est certainement pour pouvoir expulser plus tranquillement pendant l’été.

Pour ceux qui décideront de se présenter en préfecture, quelques mesures de prudence s’imposent : avoir sur soi le numéro de téléphone de la Cimade, du collectif local du Réseau Education Sans Frontières ou de toute autre structure en mesure de se mobiliser et/ou de donner des conseils juridiques ; confier à un proche un double de tout le dossier et le numéro de téléphone de la structure ; si possible être accompagné lors des déplacements à la préfecture ; se présenter à la préfecture avec les enfants (il sera plus difficile pour la préfecture d’éloigner une famille entière plutôt qu’un parent seul).

Après le 13 août 2006 :

Après le 13 août, cette circulaire n’aura plus d’effets.
Il est prévu que la commission nationale d’admission exceptionnelle au séjour créée par le projet de loi sur l’immigration (composée de l’administration, d’élus et d’associations) soit chargée de déterminer des critères de régularisation exceptionnelle pour les familles d’enfants scolarisés.

mercredi, juin 21, 2006

Consulter le rapport d’activité 2005 de l’OFPRA

Le rapport d’activité 2005 de l’OFPRA a été présenté le mercredi 12 avril 2006 au centre de conférences internationales, en présence des représentants de la presse et des associations.


" Après une hausse continue de la demande d’asile en France entre 1996 et 2003, l’année 2004 a été une année de transition marquée par un recul de la demande d’asile globale consécutif, notamment à l’instauration du guichet unique de l’asile devant l’OFPRA. L’année 2005 confirme et accentue cette baisse de la demande d’asile avec un net fléchissement par rapport à l’année précédente, rejoignant ainsi la tendance observée chez la plupart de nos partenaires européens. [...]

Deux ans après la loi du 10 décembre 2003, le rapport d’activité 2005 permet d’en dresser un bilan d’application. Les premiers résultats obtenus dans le courant de l’année 2004 paraissent confortés par l’activité 2005 : le délai moyen de traitement d’une demande d’asile par l’OFPRA a été divisé par trois entre 2003 et 2005, l’accroissement des procédures prioritaires a pu être géré par l’Office dans le respect des délais fixés par le décret du 14 août 2004. Les garanties d’un examen individuel de qualité sont maintenues, le principe de l’audition systématique des demandeurs d’asile introduit par la loi ayant été pris en compte avec un taux de convocation qui a augmenté de 15 points entre 2003 et 2005.

Consulter le rapport d’activité 2005 de l’ofpra (format PDF - 2,9 Mo)

jeudi, juin 15, 2006

Avis de la CNCDH sur le projet de loi sur l'immigration et l'intégration

Avis sur le projet de loi sur l'immigration et l'intégration

I Observations générales
(Adopté le 01 juin 2006)


1. La Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH), attentive depuis sa création à la question de la situation des étrangers en France, regrette de ne pas avoir été saisie du projet de loi sur l’immigration et l’intégration qui vise à réformer le Code d’Entrée et du Séjour des Etrangers et du droit d’Asile, et d'avoir dû procéder une fois encore par auto saisine et dans l'urgence. Ce nouveau projet, comme les précédents sur lesquels la CNCDH s’était longuement penchée, concerne au premier chef les droits de l’homme et les libertés fondamentales. Elle réaffirme à cette occasion[2], que son rôle n’est pas seulement d’apprécier la conformité des textes législatifs avec la règle juridique. Il est d’abord de veiller au respect des principes universels sur lesquels se fondent les libertés républicaines. Cette mission consultative, préalable au travail parlementaire, est particulièrement nécessaire en une période d’intense activité gouvernementale, où les priorités peuvent tendre à une recherche de l’efficacité immédiate, alors et surtout que le texte examiné par la CNCDH touche aux libertés publiques et fondamentales de manière essentielle.

2. La CNCDH s’est attachée au fil des années à veiller au respect effectif des droits fondamentaux consacré par la constitution, la loi, ainsi que les engagements internationaux de la France (Convention Européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, Pactes, traités et conventions des Nations Unies…). A l’égard de ce nouveau projet de loi, la CNCDH est à nouveau vigilante vis-à-vis du droit d’asile, du droit à la vie privée et familiale, des droits des travailleurs migrants, de la protection contre toutes les formes de discrimination et d’arbitraire.

3. La CNCDH rappelle qu’elle a longuement étudié la gestion des flux migratoires et des conditions d'application du droit d'asile et de ses incidences sur le respect des droits de l'homme. Dès 1996, la CNCDH affirmait conformément à la résolution 48-41 de l’Assemblée générale des Nations Unies du 20/12/93 que « les droits de l'homme, universels et indivisibles, sont applicables à tout être humain, quelle que soit sa situation, dans le respect de la dignité humaine[3] ». Elle rappelle, de manière générale, qu'aucune confusion n'est admissible entre la mise en œuvre du droit d'asile et la conduite d'une politique d'immigration.

4. Enfin, l’introduction du concept d’« immigration subie » utilisée par le législateur pour introduire le concept d’ « immigration choisie » est incompatible avec le respect de la dignité humaine. La CNCDH tient à rappeler que les premiers à « subir » l’émigration sont ces hommes et ces femmes que la misère et l’extrême pauvreté, l’oppression voire la terreur poussent à « choisir » l‘exil et l’éloignement.

5. Ecartant l’idée d’un commentaire détaillé de chacune des dispositions du projet de loi étudié, la CNCDH a préféré regrouper ses principales remarques par thèmes. Elle rappelle ainsi des éléments qui fondent sa doctrine depuis des années en matière de droit des étrangers et de droit d’asile et qui s’appuient sur des principes et des droits universellement reconnus. Elle a cependant jugé utile de commenter certaines des dispositions nouvelles du projet de loi particulièrement caractéristiques des risques qui pèsent sur les libertés fondamentales et les droits de l’homme.

I. OBSERVATIONS GENERALES

L’objectif de maîtrise de l’immigration

6. S’il n’est pas dans les intentions de la CNCDH de s’immiscer dans la définition de la politique d’immigration qu’il appartient au législateur de déterminer, elle entend veiller au respect des principes universels des droits de l’homme. Le Conseil constitutionnel a défini les normes de constitutionnalité applicables en la matière : " Le législateur peut prendre à l’égard des étrangers des dispositions spécifiques " mais " il lui appartient de respecter les libertés et droits fondamentaux de valeur constitutionnelle reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République ; (…) ils doivent être conciliés avec la sauvegarde de l’ordre public qui constitue un objectif de valeur constitutionnelle, [et] figurent parmi ces droits et libertés, la liberté individuelle et la sûreté, notamment la liberté d’aller et venir, la liberté du mariage, le droit de mener une vie familiale normale ; (…) en outre les étrangers jouissent du droit à la protection sociale, dès lors qu’ils résident de manière stable et régulière sur le territoire français ; (…) ils doivent bénéficier de recours assurant la garantie de ces droits et libertés [4]". La CNCDH rappelle[5] que l’on ne saurait limiter la politique d’immigration à sa seule dimension policière tant il est vrai que le développement des flux migratoires est dans la nature d’un monde de plus en plus globalisé. La CNCDH s'interroge sur la pertinence d'une approche qui tiendrait pour acquise la liberté des échanges commerciaux, financiers et de l'information, tout en astreignant les hommes à résidence dans leur propre pays.

7. La CNCDH rappelle également que ni le droit d’asile, ni le droit de mener une vie privée et familiale ne sauraient être affectés par des objectifs quantitatifs.


Politique d’immigration et respect du droit d’asile

8. La CNCDH réaffirme qu’il n’est pas acceptable de laisser perdurer la confusion établie entre le droit d’asile et les questions d’immigration et d’intégration. Rappelant que le droit d'asile est une préoccupation cardinale de la CNCDH, elle observe que, sur cette question, il se dégage une ligne directrice, à savoir l’impossibilité de confondre immigration et asile compte tenu de la qualité de droit fondamental de ce dernier.

9. Ainsi, il ne peut y avoir, en matière d'asile, de gestion des flux, même si l'asile peut parfois dissimuler des formes d'immigration clandestine. Il ne peut y avoir de « politique de l'asile », car chaque demande d'asile constitue un cas particulier. On ne peut pas non plus fixer de quotas, ni faire des prévisions. Il faut, au contraire, respecter la règle imposant qu'un demandeur d'asile doit pouvoir accéder au territoire quelles que soient les conditions dans lesquelles il y entre. La CNCDH rappelle[6] que l’asile, dont les causes sont multiples, ne saurait, parce qu’il est un droit, être soumis aux vicissitudes de la politique d’immigration. Le caractère de " droit fondamental " du droit d’asile impose en outre au législateur de ne pas adopter de dispositions qui affectent les garanties essentielles de ce droit, par application de la jurisprudence dite de " l’effet cliquet " dont le Conseil constitutionnel a précisément fait application au droit d’asile en jugeant que " la loi ne peut en réglementer les conditions qu’en vue de le rendre plus effectif ou de le concilier avec d’autres règles ou principes de valeur constitutionnelle[7] ».


La complexité croissante du droit des étrangers

10. A nouveau, la CNCDH se montre très préoccupée par la complexité croissante de la législation sur les étrangers. Cette loi constituerait, selon le Conseil d’Etat, la 71eme réforme de l’ordonnance de 1945, ce qui porte gravement atteinte au principe de sécurité juridique auquel il est attaché[8]. Ceci est amplifié par le fait qu’aucune évaluation n’a été faite des réformes successives et que des dispositions de la loi de 2003 n’ont pas encore été accompagnées des nécessaires décrets d’application. La CNCDH constate ainsi que la législation sur les étrangers ne cesse d’être modifiée et qu’elle est de plus en plus complexe, en dépit de la création du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en 2004 qui permet une présentation des principales dispositions applicables dans un texte unique, de maniement aisé. Elle estime cependant que la codification laisse subsister un droit extrêmement touffu, auquel, à l’exception de spécialistes, peu de personnes et surtout pas les principaux intéressés, c’est-à-dire les étrangers, ont la possibilité d’accéder. À cette complexité juridique – accrue par un nombre imposant de textes règlementaires – s’ajoute une suspicion trop fréquente à l’égard des étrangers ainsi qu’un manque de moyens administratifs particulièrement criant. Ceci explique, en grande partie, les différences de traitement que l’on constate d’une préfecture à l’autre. La CNCDH ne peut donc que regretter que le nouveau texte s’ajoute aux règles préexistantes, sans fournir, en contrepartie, l’effort de simplification nécessaire, auquel le Gouvernement affirme son attachement par ailleurs.[9]


Les risques de stigmatisation des étrangers et immigrés

11. La CNCDH insiste sur les dangers d’une stigmatisation des étrangers et immigrés. Elle s'inquiète en particulier du fait que dans un contexte de malaise social et économique fortement ressenti depuis quelque temps, les étrangers et les immigrés soient souvent sinon dénoncés, du moins désignés de manière flagrante[10]. Il en ressort en particulier un climat de xénophobie et de repli sur soi particulièrement inquiétant que la CNCDH a relevé dans son rapport 2005 sur le racisme en France. Enfin la CNCDH s’inquiète de ce que les mesures envisagées procèdent, à l’occasion, d’une suspicion à l’égard des étrangers, ce qui accroît le risque de stigmatisation.


La nécessité de travailler en amont sur le développement dans les pays d’origine, et d’intensifier la coopération nord-sud

12. La CNCDH note avec intérêt que le projet de loi relatif à l'immigration prend en compte l'impératif du co-développement. Elle relève, en particulier, le dispositif permettant de proposer à certains jeunes diplômés étrangers, "dans la perspective de leur retour dans leur pays d'origine, de compléter leur formation par une première expérience professionnelle participant directement ou indirectement au développement économique de la France et du pays dont il a la nationalité" (article 7)

13. Dans la perspective de la mondialisation, il importe, plus que jamais, de veiller au respect des principes fondamentaux de la dignité des personnes, rappelés sans cesse par les instances internationales, telles que l’ONU, le Conseil de l'Europe, l’organisation Internationale de la Francophonie[11], l’Union européenne. Il est par ailleurs nécessaire de ne pas sous-estimer la pression considérable qui existe sur le plan de l'immigration économique liée à l’extrême pauvreté et à la misère qui sévit dans certains pays. Malgré les engagements pris par les pays les plus riches, l’aide au développement reste encore très en deçà de ce qu’il serait souhaitable de faire et trop souvent les engagements pris ne sont pas tenus. La CNCDH rappelle l’importance du traitement des questions économiques dans le cadre de l'aide au développement et de la coopération Nord-Sud. Elle insiste sur le fait que la France devrait s’attacher davantage à perpétuer la tradition républicaine qui l'honore et qui a contribué à son rayonnement.

14. La CNCDH rappelle que la ratification de la Convention Internationale sur la protection de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille permettrait de formaliser le cadre nécessaire à cette coopération nord-sud. Elle constitue également un enjeu important pour les politiques de coopération et de co-développement. L’accent mis sur les accords bilatéraux de partenariat ne devrait pas constituer un obstacle à la mise en œuvre des engagements pris par les Etats européens en faveur du cadre multilatéral défini par la convention de 1990, comme par les conventions internationales du travail portant sur des matières voisines[12].

15. La CNCDH encourage la promotion d’une meilleure coopération avec les pays d’origine. Il est indispensable de renforcer et de soutenir toutes les actions de coopération internationale et notamment celles qui accompagnent le développement économique, social et culturel local dans le pays d’origine. De nombreuses associations françaises ont, d’ores et déjà, développé des initiatives de cette nature et entretiennent des échanges avec des associations locales. Ces partenariats permettent d’une part de mieux connaître les cultures et les mode de vie réciproques, mais contribuent aussi au développement économique local, souvent à travers des microprojets portés par des femmes. La CNCDH demande que les actions de coopération internationale soient soutenues et encouragées et qu’elles s’accompagnent de mesures de promotion des Droits de l’Homme, notamment pour les personnes en situation de précarisation et d’exclusion[13].
16. Plus particulièrement dans le domaine de la santé, la CNCDH rappelle[14], qu’au-delà d'une solidarité élémentaire avec les pays du Sud, l’enjeu en matière de santé intéresse aussi les pays dits développés. La pandémie du sida, le retour de maladies comme la tuberculose, les risques de contagion de maladies inconnues en occident propagées par les facilités des moyens de communication, imposent aussi une politique de coopération forte dans ce domaine.


L’intégration

17. La CNCDH ne peut que saluer la volonté exprimée de mettre en œuvre des mesures positives pour accueillir et intégrer les étrangers vivant en France. Elle rappelle cependant que toutes ces mesures doivent se faire dans le respect du droit des personnes avec le souci de favoriser au maximum l’accompagnement plutôt que la contrainte[15]. À cet égard le caractère obligatoire du contrat d’accueil et d’intégration et la délivrance d’une carte de résident subordonnée à l’intégration dans la société française suscitent des réserves de la CNCDH qui constate que seuls les préfets et les maires auront ainsi la responsabilité de l’appréciation de la condition d’intégration. Il y a là manifestement un risque de subjectivité ou d’arbitraire préjudiciable à l’appréciation impartiale d’une condition pourtant présentée comme indispensable pour l’intégration et l’obtention d’un titre de séjour.

Aller plus loi sur le site Internet de la CNCDH

vendredi, juin 09, 2006

Les principales caractéristiques de la loi allemande sur le contentieux des étrangers

Les principales caractéristiques de la loi allemande sur le contentieux des étrangers (AufenthaltsGesetz = AG) - Etude de Jean-Claude PRIVESSE, Premier conseiller à la Cour administrative d’appel de Paris

samedi 6 mai 2006

A première vue, la construction générale du droit des étrangers en Allemagne semble être tout à fait comparable, au moins dans son éventail de catégories de mesures, au droit français correspondant, tel qu’il résulte des dispositions reprises tout au long des modifications de l’ordonnance du 2 novembre 1945.

Bien sûr, quelques différences importantes apparaissent, comme l’absence de toute mesure régularisant un séjour irrégulier sur le territoire de plus de dix ans, et dans l’autre sens, la pérennisation du séjour, sous condition, après une durée de mariage minimum de deux ans.

Cependant, des différences sensibles et notables se font jour en ce qui concerne l’application des mesures, et surtout la philosophie même de cette application.

On pourra ainsi distinguer un moins grand recours au formalisme des décisions, gage d’efficacité, complété par des moyens plus conséquents pour administrer les situations et les juger.

Préliminaires

Avant d’aborder ces questions, une précision s’impose quant à la structure fédérale du pays, composé de 16 Länder, dont trois se confondent avec de grandes villes (Berlin, Hambourg et Brême). Mais, ce caractère fédéral n’a guère d’influence sur le droit applicable, justement de nature principalement fédéral et donc uniforme, lequel découle de la « loi sur le séjour, l’activité rémunérée et l’intégration des étrangers sur le territoire fédéral », du 30 juillet 2004, (AG), applicable au 1er janvier 2005, reprenant et modifiant les dispositions de la loi antérieure de 1990.

De la même façon qu’en France, la juridiction administrative est appelée à se prononcer sur l’ensemble des contentieux relatifs aux étrangers, à l’exception évidemment du volet pénal, et conformément à la « loi sur la juridiction administrative » (LJA ou VwGO), pendant du CJA français. (Verwaltungsgerichtordnung = VwGO)

Par ailleurs, il convient également de s’entendre sur la signification des mots, recouvrant les principales catégories de situations, et qui, comme nous l’avons dit, sont similaires :
en premier lieu, la distinction entre « expulsion » et « reconduite à la frontière (RF) » existe de même en droit allemand : « Ausweisung » et « Abschiebung ». Ils recouvrent les mêmes réalités distinctes (la situation d’un étranger ayant commis un délit dans le premier cas, et l’étranger dépourvu de droit au séjour, dans le second, soit respectivement 1 § 55, 56 et 1 § 58 de la AG).

de la même façon, les Allemands font également la distinction entre détention et rétention, selon qu’il s’agit de privation de liberté à la suite d’une décision judiciaire, ou à la suite d’une décision administrative (Haft - terme générique - et Abschiebungshaft pour la reconduite notamment).

De même qu’en France, c’est au juge judiciaire que revient l’appréciation du bien-fondé de la mise en rétention (§ 62 de la AG), et de sa prolongation (d’abord 6 semaines, puis jusqu’à six mois renouvelables ensuite jusqu’à un an, soit en tout 18 mois).

Enfin, il convient de signaler que dans le domaine des étrangers, comme dans les autres domaines du droit administratif allemand, le recours préalable (Widerspruch = contredit) est obligatoire (dans le mois suivant la décision),

soit auprès de la même autorité que celle ayant délivré l’acte (pour les étrangers : l’autorité commune du Land = Landratsamt = simple bureau, mais ce peut être aussi l’administration de la commune = Stadtverwaltung),
soit auprès de l’autorité hiérarchique, c’est-à-dire le Regierungspräsidien ( équivalent du préfet), à moins que ce ne soit directement le gouvernement du Land (Landsregierung).

L’étranger devra ensuite attendre la décision sur contredit (Widerspruchsbescheid) qui devra intervenir « dans un délai raisonnable » après l’introduction du contredit (pas de délai fixé par la réglementation, mais en général la décision intervient dans un délai moyen de six semaines), et alors introduire, toujours dans le délai d’un mois, un recours auprès du TA compétent ratione loci (il y a plusieurs TA par Land, par exemple 4 dans le Bade-Würtemberg). [Pour les conditions du délai raisonnable, ou l’absence de « Widerspruchsbescheid », voir § 75 VwGO].

Il convient enfin de signaler qu’aussi bien la décision sur contredit, que l’introduction du recours auprès du TA (Anfechtungsklage) ne sont nullement suspensifs de la décision initiale. Pour obtenir un effet suspensif, le requérant devra expressément demander par référé, que la décision de refus initiale soit suspendue, le temps de son jugement par le TA ( § 80 de la LJA ou VwGO).

Enfin, pour ce qui concerne les demandes d’asile, elles relèvent (de façon similaire à la France), de « l’office fédéral pour la migration et les réfugiés ».

Un formalisme moindre

La loi française distingue d’abord l’étranger entré irrégulièrement en France ou dont le visa a expiré, n’ayant jamais demandé de titre de séjour (TS), ..... de celui qui en a demandé un.

Cette distinction n’existe pas vraiment en Allemagne, car tout étranger sans document de séjour valide, une fois pris en illégalité, est supposé être en position de demande de TS, ne serait-ce que parce qu’il peut toujours, au moins, demander l’asile (AsylVfG = AsylVerfahrenGesetz).

Le seul cas que les autorités allemandes ont alors à traiter, est celui de l’étranger à qui l’on refuse un TS, .... car par définition, celui qui en a un, n’a pas besoin d’un juge, ... a priori.

Le refus de titre de séjour peut comporter deux ou trois parties, et constitue pourrait-on dire un « package » qui se suffit à lui-même, comprenant :

le refus de TS proprement dit, avec sa motivation,
l’obligation de quitter le territoire allemand (OQTA), qui a un effet exécutoire, dans le délai d’un mois, (le délai pour partir est fixé par l’autorité et peut aller jusqu’à six mois),
et dans la plupart des cas, sans que cela soit obligatoire, « l’avertissement de reconduite à la frontière » (Abschiebungsandrohung = AA), qui constitue l’exécution forcée de l’OQTA.

Le refus de TS et l’OQTA sont toujours présents dans la décision.

L’avertissement de RF est rajouté dans le cas, assez général, où l’autorité dispose d’indices non négligeables selon lesquels le départ volontaire de l’intéressé (e) n’aura pas lieu, ou lorsqu’il y a nécessité de surveiller son départ (sécurité publique). Conséquence de l’OQTA, le délai de contestation de l’AA est le même, soit un mois.

Il faut alors comprendre qu’à la suite de cette seule décision, constituée donc généralement de trois parties et qui, comme nous l’avons dit, se suffit à elle-même, aucune autre décision n’a à intervenir, soit pour la modifier, soit pour la compléter.

Là se situe une importante différence avec le droit français. D’une façon concrète, cette différence est à l’image même de celle qui existe sur les autoroutes ! Prenons le cas allemand : avant la sortie d’autoroute, un panneau indicateur mentionnera les directions que l’on peut prendre à la prochaine sortie ; il faut être extrêmement attentif à ces indications qui ne se renouvelleront pas ensuite, c’est-à-dire comme en France, tout près de la sortie elle-même ... Pas de seconde chance donc !

Or, dans la configuration française légale actuelle, l’étranger pris en situation d’illégalité, se verra dans un premier temps notifier un refus de séjour, puis quelque temps plus tard, une RF indépendante, fondée sur le refus, et lui précisant ... « la direction de la sortie » (avec le pays de destination), au cas où il n’aurait pas compris la signification du refus de séjour.

On voit bien dès lors, que la réunion des trois volets (généralement) en une seule décision, correspond à un formalisme moindre : si l’étranger n’a pas attaqué la décision de refus de TS comprenant également l’OQTA et la RF, dans le délai d’un mois, en introduisant un « contredit », puis une requête auprès du TA, il ne pourra plus, par la suite, contester cette décision, devenue définitive. Une seule indication, pas davantage.

Ce type de procédure répond ainsi à une exigence d’efficacité, non seulement pour l’administration elle-même, qui peut à tout moment (sous réserve de l’effet suspensif demandé ou pas) mettre à exécution la RF, sans le formalisme supplémentaire français de l’APRF (arrêté préfectoral de reconduite à la frontière), mais également pour le juge, qui se prononcera, le cas échéant, sur une seule décision, et dans des conditions bien différentes de la « version française ».

Dans la même veine d’un formalisme moindre et d’une efficacité plus grande, il nous faut également aborder la question de l’effet d’une RF.

La reconduite à la frontière du territoire allemand n’est pas aussi « anodine » qu’en France, car elle comporte notamment comme conséquence une véritable interdiction du territoire (Aufenhaltsverbot).

Cela résulte en effet clairement de l’article § 11 AG (qui vise également l’expulsion).

Ainsi et de la même façon qu’une OQTA accompagne un refus de séjour, une reconduite à la frontière emporte automatiquement interdiction, a priori illimitée, du territoire allemand (ITA)

Le juge peut limiter cette interdiction, si toutefois l’intéressé le lui demande (par exemple pour trois ans). Il peut ainsi prononcer une « injonction » (Verpflichtungsklage) envers l’administration (l’autorité concernée) de « procéder à l’action réclamée », en l’occurrence de limiter l’interdiction. (Voir LJA § 113 5°). Toutefois, le juge donnera à l’autorité des instructions pour déterminer cette limitation, mais ne fixera pas précisément celle-ci. L’injonction a ses limites...

Cette description de la question de la RF tranche quelque peu avec la situation française, où par exemple la RF n’a aucun effet dans le cas où elle n’est pas exécutée (par ex CE nº 260 349 M. Idali). Lorsqu’en France, la reconduite est exécutée, elle n’emporte pas pour autant ITF, et n’a d’effet finalement qu’en ce qui concerne l’attribution d’un titre de séjour (CE nº 206 739 M. Ghoraf). En conclusion, si l’on rapproche cette mesure générale d’ITA avec la circonstance que les étrangers n’ayant pas un visa d’entrée d’au moins 30 jours (et bien plus souvent d’au moins 3 mois) n’ont aucun espoir de se voir délivrer un TS ... (voir AG § 5 alinéa 2 surtout, pour les visas § 6), a fortiori ceux entrés irrégulièrement, on en déduit ainsi que le cadre juridique allemand est clairement annoncé dans sa cohérence et ses effets, .... même si ses contours restent volontairement imprécis, dans certaines limites, de façon à laisser le juge agir avec sa pleine appréciation.

Après avoir constaté la volonté d’efficacité de la loi allemande en matière d’accès au territoire, et de refoulement (RF ou expulsion), voyons maintenant ce qu’il en est des moyens mis en oeuvre pour administrer et juger les situations des étrangers présents sur le territoire.

Des moyens plus conséquents pour l’administration et les juges

S’agissant tout d’abord de l’administration, c’est-à-dire des différentes autorités fédérées (Landsbehörden), leur travail d’interpellation et de refoulement des étrangers est simplifié, et rendu plus efficace.

Tout d’abord, les règles sont claires : comme nous l’avons dit, un étranger entré clandestinement sur le territoire ne peut obtenir un titre de séjour (sauf bien sûr l’asile, qui est généralement demandé dans ce cas). Il y ensuite la règle des six mois s’appliquant aux étrangers présents sur le territoire depuis moins de 6 mois, et qui ne peuvent en outre obtenir de décision de statu quo (sursis à exécution = VwGO § 80).

Ensuite, les moyens destinés à lutter contre l’immigration clandestine sont tels que la police peut éviter de remettre volontairement en liberté des étrangers reconductibles ou expulsables en raison d’un manque de place dans les sites de rétention : on estime que chaque année environ 40 000 personnes y sont placées, y restant en moyenne 3 à 4 semaines (le délai maximum, nous l’avons vu étant de 18 mois).

La fameuse question « des voies postales » semble être donc résolue de cette manière ( ?). [« voies postales » = la plupart des reconduites en France, à l’heure actuelle, s’effectue par le biais d’APRF adressés de façon postale aux étrangers qui se trouvent en liberté sur le territoire].

Les sites de rétention sont en outre multiples, permettant une première mise en rétention de quelques jours à proximité des villes, puis le regroupement des étrangers après quelques jours vers des centres plus importants, à proximité des aéroports. Les questions de « pays de destination » n’apparaissent pas problématiques, en général, sauf peut-être pour l’asile.

Mais, pour ceux présents sur le territoire depuis un certain temps, et en situation irrégulière, chaque Land dispose d’une commission dénommée Härtefallskommission c’est-à-dire littéralement une commission s’occupant des cas « dignes d’intérêt » (AG § 23 a), soit pour des raisons humanitaires ou personnelles (maladie, famille, intégration à la société ..). Cette sorte de « commission de séjour » n’intervient pratiquement que pour les étrangers ayant déjà une présence suffisante (environ 3 ans) sur le territoire.

L’administration dispose en outre, et depuis longtemps, des possibilités offertes par les articles AG § 43 à 45 relatifs aux programmes d’intégration des étrangers, de nature fédérale, à travers les cours de langue allemande, mais aussi d’apprentissage des règles de vie en société (notamment en ce qui concerne la connaissance du Rechtsordnung, équivalant à l’instruction civique de jadis ( ! ) en France), de la culture et de l’histoire de l’Allemagne.

La nationalité allemande s’acquiert au bout de huit ans, généralement. Mais les enfants nés en Allemagne obtiennent la nationalité allemande, si les parents sont titulaires d’un permis de séjour illimité (§ 9 AG).

Le regroupement familial (AG § 28) peut être demandé par un étranger au bout de deux ans (auparavant quatre ans). Le « Familiennachzug » est obtenu, comme en France, sous condition de ressources et de logement (voir AG § 27 à 30).

Si un divorce intervient (AG § 31), après une durée de mariage d’au moins deux ans, l’étranger est admis à rester sur le territoire au moins un an de plus, notamment lorsqu’il y a des enfants. Mais, par la suite, son titre de séjour qui dépendait généralement de la présence de son conjoint (AG § 30), [il s’agissait donc d’un titre dépendant de son conjoint = TS « lié »], devient un titre « individuel » (Eigenständiges Aufenthaltsrecht).

S’en suivent toutes les autres catégories de titre de séjour « liés » pour les enfants (articles AG § 32 à 36). La loi règle par exemple, comme en France, le cas des enfants entrés en Allemagne avant leur majorité : il résulte par exemple indirectement des dispositions de l’article AG § 35 que les enfants entrés en Allemagne avant l’âge de 11 ans reçoivent à 16 ans un titre lié au regroupement familial, et à leur majorité, un titre individuel.

Au total, si les obstacles à l’entrée et au séjour des étrangers en Allemagne sont importants, pour ceux qui les franchissent, l’administration (c’est-à-dire.. . les autorités fédérées) dispose des moyens nécessaires pour les intégrer et leur offrir les conditions de l’égalité des droits avec les citoyens. Les juges disposent également des moyens leur permettant d’agir rapidement, dans le respect des garanties.

Il convient tout d’abord de noter que les juges administratifs allemands sont au nombre d’environ 2400 ( 900 en France), l’ordre administratif (Bundesverwaltungsgericht - barkeit) n’ayant pas, au surplus, dans sa compétence les questions fiscales, qui sont réglées, par ailleurs, par un autre ordre administratif (Bundesfinanzhof - barkeit) comprenant lui-même 800 juges.

Le premier article de la LJA (= VwGO) concerne l’indépendance des tribunaux, règle déjà fixée dans l’article 97 de la loi fondamentale.

La règle dans les juridictions administratives est celle de la collégialité : il n’y a pas vraiment d’article la consacrant (voir seulement VwGO § 5), car il s’agit d’un principe.

Cette règle s’applique absolument dans tous les domaines, que ce soient les domaines de fond (par exemple les étrangers) que s’agissant des procédures d’urgence (référés etc...)

Mais ce qui pourra certainement étonner le juge français, c’est que le recours au juge unique ne procède pas de la loi, les députés considérant les juges dans leur indépendance, à la fois d’appréciation mais aussi d’organisation (voir plus haut l’article § 1 de la LJA).

C’est ainsi que s’il y a recours au juge unique, c’est-à-dire « Übertragung auf der Einzelrichter » (= § 6 LJA ou VwGO), ce recours sera comme en France, à l’heure actuelle, limité aux cas ne présentant « pas de difficultés particulières, ni en fait ni en droit, l’affaire n’ayant pas une portée de principe ». [La seule limitation concerne le juge stagiaire qui ne peut être juge unique dans l’année de sa nomination]

Le seul cas de juge unique obligatoire reconnu par la loi, concerne les procédures d’urgence en matière d’asile : loi sur la procédure d’asile (Asylverfahrensgesetz = AsylVfG) § 76 al.4, article relatif à l’ Einzelrichter. Il y est bien indiqué par exemple, qu’en cas de difficulté particulière concernant l’appréciation des faits ou le droit, la collégialité doit reprendre le dessus.

Concrètement, les dossiers étant attribués aux chambres du tribunal, il leur reviendra de trier ces dossiers de façon à déterminer ceux qui seront traités par un juge unique, et ce qui seront en attribution collégiale à la chambre, la proportion du collégial étant variable, mais le plus souvent en matière de titres de séjour légèrement supérieure à 50 %. C’est donc à la chambre de décider, pas à son président.

Il faut surtout noter à propos de cette question de la collégialité, qu’il existe une autre possibilité de juge unique, lorsque l’accord des parties se fait sur ce mode de règlement du litige, permettant ainsi des délais plus courts.

Mais le président de la chambre ou le juge désigné pourra, au cours de la phase dite préparatoire, statuer seul sur les désistements, la suspension de la procédure, les dépens ... (article LJA § 87 « procédure préparatoire »).

Quant aux délais des juridictions, s’agissant d’étrangers, ils sont d’environ un an en matière collégiale, l’urgence se voyant jugée en trente jours en moyenne. L’intervention du juge unique se situe entre quelques heures ou jours (quand il s’agit du départ de l’étranger) à un mois (pour les refus de TS).

Ce bref aperçu de la situation qui prévaut chez nos voisins peut être source d’enseignements dans le cadre de l’actuel débat législatif qui se déroule en France.

Jean-Claude PRIVESSE, Premier conseiller à la Cour administrative d’appel de Paris

mardi, juin 06, 2006

Régularisation partielle d'enfants étrangers saans papiers mais scolarisés

720 familles étrangères pourraient être régularisées
LE MONDE | 06.06.06


Face à la mobilisation croissante, autour des écoles ou des collectifs de soutien aux jeunes étrangers scolarisés et menacés de reconduites à la frontière avec leur famille, le ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, veut montrer que sa politique ne se résume pas en un seul mot – fermeté – mais deux : fermeté "et" humanité. Mardi 6 juin, en ouvrant la discussion, au Sénat, sur son projet de loi "immigration et intégration", il a annoncé son intention de régulariser une partie de ces familles. Quelque 720 familles, soit entre 2000 et 2500 personnes, pourraient être autorisées à rester en France et se voir délivrer une carte de séjour.



"Lorsqu'un enfant étranger est né en France ou qu'il y est arrivé en très bas âge, qu'il est scolarisé en France, qu'il ne parle pas la langue de son pays d'origine, qu'il n'a aucun lien avec ce pays, il serait très cruel de l'y reconduire de force", a estimé M. Sarkozy mardi après-midi au Sénat, en préambule à la discussion de son projet de loi sur l'immigration. Le ministre a cependant exclu une régularisation systématique, pour éviter qu'il suffise "d'entrer illégalement en France et d'y scolariser un enfant" pour obtenir un titre de séjour.


Le 4 juillet au soir, avec le début des grandes vacances, prend fin le sursis qu'il avait accordé, le 31 octobre 2005, aux parents en situation irrégulière ayant des enfants scolarisés et aux jeunes étrangers majeurs en cours d'étude, en demandant aux préfets de suspendre leur éloignement pendant l'année scolaire. Il ne se passe plus un jour sans que, quelque part en France, une banderole surgisse sur une école primaire, un collège ou un lycée. Dans les mairies, les parrainages se multiplient pour chaque enfant connaissant quelqu'un à qui téléphoner en cas d'interpellation. Dans les établissements scolaires, des parents se tiennent prêts à prendre sous leur aile et à cacher les enfants pendant l'été.

Une mobilisation dont la Place Beauvau semble avoir pris la mesure. "Nous avons conscience qu'humainement la question est délicate pour certaines familles", affirmait-on en fin de semaine dans l'entourage du ministre. Ce week-end, "la décision de principe était prise par le ministre de régulariser les familles des enfants répondant à des critères d'intégration et d'ancienneté. Reste maintenant à en finaliser les modalités", a confirmé au Monde, mardi 6 juin, Claude Guéant, son directeur de cabinet. Des instructions seront ainsi données prochainement aux préfets dans une circulaire "pour que des mécanismes de régularisation soient mis en place pour les enfants attachés à la France". "Il ne s'agit pas de créer une nouvelle filière d'immigration clandestine, avec un droit automatique au séjour, tient à insister M. Guéant, mais de préciser les critères de régularisation au cas par cas" pour les familles de ces "enfants attachés à la France."


"CIRCONSPECTION"


Derrière ce terme quelque peu flou, seraient concernées les familles dont les enfants n'ont plus aucune attache dans leur pays d'origine, nés en France ou arrivés en très bas âge et toujours scolarisés, et qui ne parlent que le français. Parallèlement, toutes les familles qui le souhaitent ou qui ne seraient pas concernées par cette régularisation se verront proposer l'aide volontaire.

Déjà, lundi 29 mai, Nicolas Sarkozy avait demandé aux préfets de veiller, en juin, à ce que l'aide au retour volontaire soit "systématiquement" proposée à chacune des familles en situation irrégulière ayant des enfants scolarisés, pour qu'elle puisse "choisir de retourner volontairement dans son pays d'origine lorsque l'année scolaire sera achevée".

Au sein du Réseau éducation sans frontières, on prend les dernières annonces de M. Sarkozy "avec beaucoup de circonspection". "Il y a de quoi quand on voit la difficulté qu'il y a à faire respecter la circulaire du 31 octobre 2005 demandant de suspendre pendant l'année scolaire l'éloignement des familles", relève Richard Moyon, porte-parole de cette plate-forme d'information et de conseil qui, depuis deux ans, relaye tous les collectifs de soutien aux jeunes sans papiers et à leurs familles.

Et celui-ci de citer les parents interpellés et éloignés, pour lesquels les préfectures invoquent un trouble à l'ordre public, ceux dont les enfants ne sont encore qu'en maternelle et n'entrent donc pas encore dans le cadre de la scolarité obligatoire, ou ceux qui sont renvoyés dans un pays de transit en vertu de l'accord de Dublin II selon lequel une demande d'asile déposée dans un pays de l'espace Schengen doit être traitée jusqu'au bout par celui-ci. "Nous avons même vu un préfet prétexter l'absence d'examen en fin d'année pour ne pas appliquer la circulaire à une famille dont l'enfant était en seconde", affirme-t-il.

"Nous, nous voulons des assurances fermes, insiste Richard Moyon. Or parler d'enfants attachés à la France, c'est ouvrir la voix à une appréciation subjective et restrictive des dossiers par les préfectures en fonction des objectifs d'éloignement qui leur sont assignés", s'alarme-t-il.



Laetitia Van Eeckhout

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Chiffres

750 familles seraient sous le coup d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière (APRF), selon le ministère de l'intérieur. A ces familles s'ajoutent celles qui n'ont pas encore reçu un APRF, mais à qui il a été notifié une invitation à quitter le territoire, toutes celles dont le dossier de régularisation ou de demande d'asile est en cours d'examen et d'appel, ainsi que les jeunes majeurs qui n'ont pu rentrer dans le cadre du regroupement familial.
Selon le Réseau éducation sans frontières, "au moins 10000 jeunes" scolarisés seraient menacés de reconduite à la frontière avec leur famille

lundi, juin 05, 2006

La Commission des lois du Sénat adopte le projet de loi sur l'immigration et l'intégration dans ses grandes lignes

Immigration - Immigration et intégration - Examen des rapports

La commission a procédé à l'examen du rapport de M. François-Noël Buffet sur le projet de loi n° 362 (2005-2006), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'immigration et à l'intégration, et sur les propositions de loi n° 56 (2005-2006), présentée par M. Georges Othily, tendant à modifier les conditions d'attribution de la nationalité française et à lutter contre les abus liés à l'immigration clandestine dans le département de la Guyane et n° 69 (2005-2006), présentée par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et plusieurs de ses collègues, pour le respect du droit à l'éducation des jeunes étrangers résidant en France.

M. François-Noël Buffet, rapporteur, a tout d'abord rappelé que la loi du 26 novembre 2003 avait été la première pierre d'une redéfinition de la politique migratoire de la France autour de quatre principaux axes : restaurer le droit d'asile, lutter contre l'immigration clandestine, favoriser l'intégration des étrangers et rapprocher les politiques européennes.

Il a estimé que si tout n'était pas parfait la situation s'était améliorée depuis trois ans sur ces différents points.

Concernant le projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration, il a indiqué que deux traits principaux le caractérisaient : la continuité par rapport à la loi du 26 novembre 2003 et la rupture en matière d'immigration de travail.

Il a précisé qu'il y avait une continuité dans la détermination à lutter contre l'immigration clandestine, et notamment contre le travail illégal qui l'alimente, ainsi que dans le souci de favoriser l'intégration des étrangers en rendant obligatoire le contrat d'accueil et d'intégration et en étendant à la quasi-totalité des cas de délivrance de la carte de résident la condition d'intégration républicaine de l'étranger dans la société française.

En revanche, M. François-Noël Buffet, rapporteur, a estimé que le projet de loi constituait une véritable rupture en matière d'immigration de travail après plus de trente années de gel. Il a jugé qu'il y avait la place pour une immigration de travail répondant à des besoins ciblés de main-d'oeuvre. Il a ajouté que cette politique de réouverture officielle de nos frontières devait également permettre d'attirer les meilleurs talents dans nos pays, qu'il s'agisse d'étudiants ou de personnels hautement qualifiés.

Enfin, il a indiqué que ce projet de loi devrait contribuer à réhabiliter une vision positive de l'immigration.

M. François-Noël Buffet, rapporteur, a ensuite présenté les principales dispositions du projet de loi.

En matière d'immigration clandestine, il a expliqué que le projet de loi ouvrait deux nouveaux chantiers en :

- supprimant les régularisations de plein droit des étrangers justifiant de dix années de résidence habituelle en France ;

- simplifiant la procédure administrative contentieuse de l'éloignement des étrangers au travers de la création d'une obligation de quitter le territoire français.

Concernant le premier point, il a ajouté que l'Assemblée nationale avait en contrepartie adopté un amendement du Gouvernement créant une nouvelle procédure de régularisation dite d'admission exceptionnelle au séjour.

Il a indiqué que le projet de loi s'attaquait à la lutte contre le travail illégal en frappant plus durement les employeurs ainsi que les donneurs d'ordre.

Enfin, il a souligné que le titre VI du projet de loi était consacré à l'outre-mer et visait à apporter des réponses spécifiques à la situation dramatique de l'immigration clandestine en Guyane, à Mayotte et en Guadeloupe.

En matière de regroupement familial, il a indiqué que le projet de loi apportait plusieurs modifications importantes, notamment :

- en faisant passer de 12 mois à 18 mois le délai à partir duquel un étranger séjournant en France peut demander le regroupement familial ;

- en permettant de moduler la condition de ressources en fonction de la taille de la famille ;

- en exigeant du demandeur qu'il se conforme aux principes qui régissent la République française.

En matière de lutte contre les mariages de complaisance, M. François-Noël Buffet, rapporteur, a indiqué que, si cette question relevait principalement d'un projet de loi distinct sur le contrôle de la validité des mariages, le présent projet de loi modifiait néanmoins les conditions de délivrance de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » et de la carte de résident aux conjoints de Français.

En matière d'immigration de travail, il a expliqué que le projet de loi :

- prévoyait de ne plus opposer la situation de l'emploi pour des métiers et dans des zones géographiques figurant sur une liste établie au plan national ;

- facilitait les conditions de séjour des étudiants, en particulier ceux de niveau master ;

- créait une nouvelle carte de séjour « compétences et talents » délivrée pour une durée de trois ans renouvelable selon une procédure simplifiée pour accueillir en France des étrangers particulièrement qualifiés.

Concernant les apports de l'Assemblée nationale, il a mis en exergue la création de trois commissions au rôle distinct mais devant permettre d'associer dans une même enceinte des représentants de l'administration et de la société civile. Il ajouté que l'Assemblée nationale avait également adopté des amendements renforçant la protection des femmes immigrées et instaurant une cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française.

Enfin, M. François-Noël Buffet, rapporteur, a présenté ses principales propositions d'amendements indiquant qu'elles visaient pour l'essentiel à renforcer l'effectivité des droits accordés aux étrangers, d'une part, et à améliorer et simplifier les dispositions du projet de loi, d'autre part.

M. Bernard Frimat, reconnaissant que certaines propositions du rapporteur semblaient aller dans le bon sens, a jugé que le texte présenté par le gouvernement reposait sur le présupposé selon lequel tout étranger était en situation de fraude au regard des règles d'entrée ou de séjour en France, ou des règles d'acquisition de la nationalité. Il a estimé que sa philosophie était, en conséquence, « détestable » et qu'il aurait pour effet d'aggraver la situation de l'immigration clandestine et de précariser celle des immigrés en situation régulière. Il a souligné qu'il allongeait les délais exigés des étrangers pour accéder à certains droits et raccourcissait les délais qui leur étaient accordés pour former certains recours.

Il a fait état du désaccord fondamental du groupe socialiste avec les orientations du gouvernement, soulignant que la réforme proposée avait un objet identique à celui de la loi du 26 novembre 2003, adoptée à l'initiative du même gouvernement. Il a ajouté que cette démarche faisait partie d'une stratégie politique et électorale qui ne pourrait avoir pour effet que de favoriser le sentiment xénophobe. Il a regretté que le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire n'ait pas été entendu par la commission.

Mme Eliane Assassi a jugé le projet de loi extrêmement dangereux tant pour les étrangers que pour la société française, dès lors qu'il traitait les personnes humaines comme de simples marchandises. Elle a considéré qu'il s'attaquait aux règles protectrices du droit à la vie privée, du droit d'asile et du regroupement familial, tout en méprisant les populations vivant dans les pays en développement. Elle a indiqué que le groupe communiste républicain et citoyen voterait contre l'adoption de ce texte qui ne ferait qu'aggraver l'immigration irrégulière. Elle a souhaité que le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire soit présent lors du débat en séance, contrairement à ce qui s'était passé à l'Assemblée nationale.

M. Jean-René Lecerf a estimé que, dans le cadre de la politique d'immigration, il était nécessaire de se garder de tout angélisme mais qu'il convenait de respecter les droits fondamentaux des étrangers. Il a souligné que certaines institutions du droit de la famille étaient actuellement détournées de leur objet, citant le cas du mariage, et qu'il était indispensable de lutter contre cette fraude.

Mme Alima Boumediene-Thiery a déclaré partager la position de ses collègues des groupes socialiste et communiste républicain et citoyen, mettant en exergue la contradiction entre le discours du gouvernement, favorable au codéveloppement, et la teneur du projet de loi, qui favorise le pillage des cerveaux dans les pays en développement.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat a critiqué la succession de textes intervenus sur le sujet de l'immigration sans aucune évaluation préalable des réformes précédentes. Elle a estimé que le projet de loi mettait en réalité en place une politique migratoire fondée sur des quotas en contribuant au pillage des personnes qualifiées originaires des pays du sud, la France offrant à celles-ci un traitement beaucoup moins favorable qu'aux nationaux français, citant l'exemple des médecins étrangers exerçant dans les hôpitaux publics dont la rémunération est inférieure de 40 % à celle de leurs collègues français.

Elle a contesté la suppression du mécanisme de régularisation actuellement offert aux étrangers ayant séjourné irrégulièrement en France pendant dix ans. Elle a jugé que ce dispositif ne constituait nullement une prime à la clandestinité, comme cela était soutenu par le gouvernement, mais permettait de régulariser quelques milliers de personnes qui, en définitive, avaient fait la preuve de leur capacité à s'intégrer en France.

M. Hugues Portelli a estimé que le projet de loi devrait être modifié sur plusieurs points. Il a regretté que la France n'ait plus de réelle politique de développement et a insisté sur la nécessité de respecter les pays d'origine des migrants.

Il a jugé qu'il convenait de sortir des débats idéologiques que ce texte entretenait, soulignant l'absence d'évaluation réelle de la loi du 26 novembre 2003 et la multiplication des structures créées dans le domaine de l'immigration. Il a estimé que toute réforme en cette matière devait respecter les droits fondamentaux des personnes.

En réponse, M. François-Noël Buffet, rapporteur, a indiqué qu'il était favorable aux orientations du projet de loi, mais qu'il avait veillé à ce que certains droits des étrangers soient mieux assurés, ce qui le conduirait à présenter à la commission des amendements sur l'aide juridictionnelle et le délai de recours devant la commission des recours des réfugiés, ainsi que sur la contestation du pays de destination lorsque l'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement a été préalablement débouté du droit d'asile.

S'agissant de la critique récurrente du « pillage des cerveaux », il a souligné que des études universitaires, à commencer par celles conduites par M. Patrick Weil, directeur de recherches au CNRS, avaient montré que si l'entrée en France des étrangers qualifiés n'était pas favorisée, ceux-ci migreraient en tout état de cause vers d'autres pays. Il a néanmoins indiqué qu'il fallait inciter ces personnes à revenir dans leurs pays d'origine afin de contribuer à leur développement.

Il a estimé qu'on ne pouvait qu'être favorable au renforcement de la lutte contre le travail clandestin et contre les fraudes à l'état civil qui étaient notoires.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a souligné que la loi du 26 novembre 2003 avait déjà prévu des mécanismes, mais qu'aucune donnée ne permettait de connaître les résultats de leur mise en oeuvre sur le terrain.

Puis la commission a examiné les amendements proposés par le rapporteur.

A l'article premier (liste des titres de séjour), la commission a adopté un amendement de cohérence tendant à compléter la liste des titres de séjour existants.

A l'article 1er bis (création du Conseil national de l'immigration et de l'intégration), la commission a examiné un amendement du rapporteur précisant les missions du Conseil national de l'immigration et de l'intégration introduit par l'Assemblée nationale.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a souhaité connaître les différences entre ce nouvel organisme et le Haut Conseil à l'intégration, dont M. Hugues Portelli a rappelé les travaux.

M. François-Noël Buffet, rapporteur, a répondu que ce nouveau conseil serait un lieu de dialogue entre les représentants des administrations compétentes et la société civile.

M. François Zocchetto s'est interrogé sur la valeur ajoutée de ce conseil et a rappelé que sa création ne figurait pas dans le projet de loi initial.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a regretté que le projet de loi multiplie les commissions ou conseils. Il a ajouté que le projet de loi ne précisait pas la composition de ce conseil national.

M. Pierre Fauchon a proposé que la commission adopte un amendement de suppression de l'article premier bis.

Constatant l'unanimité de la commission, M. François-Noël Buffet, rapporteur, a alors accepté de retirer son amendement.

M. Jean-Jacques Hyest, président, a relevé que l'une des recommandations de la commission d'enquête du Sénat sur l'immigration clandestine demandait précisément de ne pas multiplier les organismes d'évaluation et de faire en sorte que ceux existants travaillent mieux ensemble.

La commission a adopté un amendement de suppression de l'article premier bis.

A l'article 2 (visa de long séjour obligatoire pour la délivrance de certains titres de séjour), la commission a adopté un amendement tendant à généraliser l'obligation de délivrance d'un récépissé de demande de visa de long séjour, afin de faciliter l'exercice des voies de recours.

A l'article 3 (condition du retrait de la carte de séjour temporaire et de la carte de séjour « compétences et talents »), la commission a adopté un amendement tendant à exclure la possibilité de retirer une carte de séjour temporaire portant la mention « salarié » ou « travailleur temporaire » au motif que l'étranger a été involontairement privé d'emploi.

A l'article 4 (obligation pour les primo-arrivants de signer un contrat d'accueil et d'intégration), la commission a adopté, outre deux amendements rédactionnels et un amendement de coordination avec l'article 5, un amendement précisant que le représentant légal qui cosigne le contrat d'accueil et d'intégration d'un mineur de plus de seize ans doit avoir été régulièrement admis au séjour en France.

A l'article 5 (définition de la condition d'intégration républicaine de l'étranger dans la société française), la commission a adopté un amendement tendant à conserver l'expression en vigueur d'« intégration républicaine dans la société française » pour qualifier la condition d'intégration nécessaire à l'obtention d'une carte de résident. Elle a également adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 7 (entrée et séjour en France des étudiants et des stagiaires), la commission a adopté deux amendements tendant à accorder aux étudiants étrangers un droit à exercer une activité professionnelle salariée dans la limite d'un temps partiel annualisé en lieu et place du système en vigueur d'autorisation préalable, à charge pour l'employeur de déclarer l'embauche d'un étudiant étranger afin de faciliter des contrôles a posteriori.

M. François-Noël Buffet, rapporteur, ayant tout d'abord proposé de limiter le droit de travailler à un mi-temps annualisé, la commission a décidé, à la suite d'un large débat, de repousser cette limite à un temps partiel annualisé, afin d'offrir plus de souplesse aux étudiants pour organiser leur temps de travail.

Outre un amendement de précision, elle a également adopté un amendement supprimant les dispositions relatives aux étudiants ressortissants des nouveaux Etats membres afin de les regrouper à l'article L. 121-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile tel que modifié par l'article 16 du projet de loi.

A l'article 10 (carte de séjour autorisant l'exercice d'une activité professionnelle salariée), la commission a adopté un amendement tendant à préciser que la liste définissant les métiers et les zones géographiques connaissant des difficultés de recrutement est établie au plan national.

Elle a également adopté un amendement pour étendre le bénéfice de la carte de séjour temporaire « salarié en mission » aux étrangers détachés au sein d'un même groupe mais titulaires d'un contrat de travail établi en France et pour accorder aux membres de leur famille une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » renouvelable de plein droit pendant la durée de validité de la carte « salarié en mission ».

Enfin, elle a adopté trois amendements rédactionnels et de coordination.

A l'articler 11 (interdiction d'exercer une activité professionnelle à tout employeur étranger dont le titre de séjour a été retiré pour recours au travail illégal), la commission a adopté un amendement tendant à prévoir que la carte de séjour temporaire « étudiant » peut être retirée si son titulaire travaille plus longtemps qu'un temps partiel annualisé.

A l'article 11 bis (aggravation des peines applicables aux employeurs d'étrangers sans titre de travail), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 12 (création de la carte de séjour « compétences et talents »), la commission a adopté trois amendements rédactionnels ou de coordination. Elle a également adopté deux amendements tendant respectivement à :

- lier le renouvellement de la carte « compétences et talents » au respect effectif de l'obligation de participer à une action de développement, lorsque son titulaire est un ressortissant d'un pays de la zone de solidarité prioritaire ;

- ne pas permettre à un titulaire de la carte « compétences et talents » de faire venir son conjoint si celui-ci est mineur.

A l'article 13 (conditions d'attribution et de validité des autorisations de travail), la commission a adopté un amendement de coordination avec l'amendement à l'article 7 accordant aux étudiants étrangers le droit d'exercer une activité salariée.

A l'article 15 ter (aggravation du montant de la contribution spéciale à l'ANAEM en cas de récidive de l'employeur), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 16 (droit au séjour en France des ressortissants communautaires et des membres de leur famille), la commission a adopté, outre quatre amendements rédactionnels ou de précision, deux amendements tendant respectivement à :

- regrouper au sein de l'article L. 121-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile l'ensemble des dispositions relatives aux ressortissants communautaires, notamment celles relatives aux ressortissants des nouveaux Etats membres et figurant aux articles 7 et 10 du projet de loi ;

- préciser dans quel cas des dérogations peuvent être apportées, conformément à la directive européenne du 29 avril 2004, au principe de l'acquisition d'un droit au séjour permanent des citoyens de l'Union au bout de cinq années de résidence ininterrompue.

A l'article 18 (délivrance d'une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » aux membres de la famille d'un étranger ayant obtenu le statut de RLD-CE dans un Etat membre et séjournant en France), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 24 (délivrance de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale »), la commission a adopté un amendement tendant à prévoir qu'un étranger, qui justifie par tout moyen avoir résidé habituellement en France depuis l'âge de treize ans, bénéficie d'une carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » s'il a résidé avec au moins un de ses parents et non avec les deux. Elle a également adopté un amendement de coordination.

A l'article 24 bis (création d'une procédure d'admission exceptionnelle au séjour), la commission a adopté un amendement prévoyant que la commission nationale d'admission exceptionnelle au séjour exprime un simple avis sur les critères de cette admission.

Mme Alima Boumediene-Thiery a déclaré que les commissions du titre de séjour existant dans chaque département devraient être compétentes pour connaître des dossiers individuels de régularisation plutôt que de confier cette mission à une commission nationale trop lointaine.

M. François-Noël Buffet, rapporteur, a répondu que cette commission nationale donnerait un avis sur les seuls dossiers d'étrangers justifiant résider habituellement en France depuis dix ans et qu'elle permettrait d'homogénéiser les décisions des préfets.

A l'article 25 (conditions pour bénéficier de la protection subsidiaire), la commission a adopté un amendement tendant à dispenser de l'obligation de visa de long séjour le conjoint et les enfants d'un étranger bénéficiant de la protection subsidiaire.

A l'article 29 bis (document de circulation délivré aux mineurs étrangers), la commission a adopté un amendement de coordination.

Puis la commission a examiné l'article 31 (conditions de logement, de ressources et de respect des principes qui régissent la République française) et l'article 31 bis (avis du maire sur la condition tenant au respect de la condition relative au respect des principes qui régissent la République française).

M. François-Noël Buffet, rapporteur, a indiqué que l'Assemblée nationale avait souhaité moduler par décret le montant des ressources exigées du demandeur d'une mesure de regroupement familial, le Sénat s'étant déjà opposé, à l'initiative de la commission, à une telle modulation lors de l'examen de la loi du 26 novembre 2003. Le rapporteur ayant proposé à la commission de maintenir sa position, celle-ci a adopté un amendement supprimant cette modulation.

Le rapporteur a ensuite présenté un amendement tendant à prévoir qu'en l'absence d'avis donné par le maire sur le respect par le demandeur des principes qui régissent la République française, dans un délai de deux mois à compter de sa saisine, cet avis serait réputé favorable.

M. Michel Dreyfus-Schmidt et M. Jean-Jacques Hyest, président, se sont interrogés sur l'utilité d'un tel avis, M. José Balarello estimant qu'il n'était pas justifié lorsque l'étranger vivait dans une commune importante et qu'un contentieux pourrait naître du fait de cette condition.

M. Jean-René Lecerf a indiqué que, dès lors qu'une condition nouvelle de respect par le demandeur des principes qui régissent la République française était instituée à l'article 31 du projet de loi, le fait de recueillir un tel avis semblait légitime et protecteur vis-à-vis de l'étranger, dès lors qu'elle serait difficile à apprécier.

M. Pierre-Yves Collombat a souligné qu'en tout état de cause, l'examen d'une telle condition s'opérerait déjà lors de l'obtention du titre de séjour du demandeur et jugé qu'elle n'était donc pas justifiée dans le cadre du regroupement familial.

Mme Alima Boumediene-Thiery s'est demandé comment le respect de cette condition pourrait être considéré de manière objective, M. Michel Dreyfus-Schmidt estimant qu'il convenait de la supprimer dans le cadre du regroupement familial.

Constatant qu'une majorité des membres de la commission relevait le caractère subjectif de la condition tenant au respect des principes qui régissent la République française, M. Jean-Jacques Hyest, président, a proposé que cette mesure soit supprimée.

La commission a, en conséquence, adopté un amendement à l'article 31 supprimant cette condition.

Par coordination avec cet amendement, elle a adopté un amendement supprimant l'article 31 bis, devenu sans objet.

A l'article 32 (retrait du titre de séjour en cas de rupture de la vie commune), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

La commission a ensuite adopté trois amendements tendant à insérer trois articles additionnels après le titre III (avant l'article 33) et ayant respectivement pour objet :

- de supprimer l'exigence du consentement de l'étranger pour recourir à la visioconférence lors des audiences de prolongation du placement en rétention administrative, le juge des libertés et de la détention étant libre d'utiliser ou non cette technique ;

- d'en disposer de la même façon pour le recours à la visioconférence lors des audiences de prolongation du maintien en zone d'attente ;

- de prévoir l'intervention de l'administrateur ad hoc dès que la décision de refus d'entrée sur le territoire français est opposée à un mineur étranger isolé.

A l'article 36 (création d'une obligation de quitter le territoire français délivrée à l'occasion d'une décision de refus de titre de séjour), la commission a adopté un amendement tendant à permettre aux étrangers frappés d'une obligation de quitter le territoire français de demander l'aide au retour au-delà du délai d'un mois pendant lequel l'étranger ne peut être éloigné de force.

A l'article 41 (contentieux de l'obligation de quitter le territoire français), la commission a adopté un amendement tendant à supprimer des dispositions de nature réglementaire.

A l'article 43 (coordination), la commission a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 47 (suppression de la faculté pour les déboutés du droit d'asile de contester la décision fixant le pays de renvoi), la commission a adopté un amendement tendant à supprimer le II de cet article qui interdit aux étrangers déboutés du droit d'asile de contester la décision fixant le pays de renvoi.

A l'article 56 bis (transports des personnes en rétention administrative ou en zone d'attente), la commission a adopté un amendement tendant à prolonger l'expérimentation en matière de transfert à des personnes publiques ou privées des missions de transfèrements des étrangers placés en rétention ou en zone d'attente.

A l'article 59 bis (transmission au maire et aux parlementaires de l'adresse des personnes ayant acquis la nationalité par mariage - organisation d'une cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française), la commission a adopté un amendement tendant à supprimer cet article, M. François-Noël Buffet, rapporteur, ayant précisé qu'il s'agissait d'une mesure de coordination avec les amendements proposés aux articles 62 quater et 62 quinquies du projet de loi, regroupant dans ces dispositions les mesures relatives à la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française.

Pour les mêmes raisons, la commission a ensuite adopté deux amendements supprimant respectivement :

- l'article 60 bis (transmission au maire de l'adresse des enfants mineurs nés en France de parents étrangers ayant acquis la nationalité française par déclaration - organisation d'une cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française) ;

- l'article 60 ter (transmission au maire et aux parlementaires de l'adresse des enfants mineurs nés en France de parents étrangers ayant acquis la nationalité française par déclaration - organisation d'une cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française).

A l'article 60 quater (organisation obligatoire d'une cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française pour les étrangers naturalisés par décret), la commission a adopté un amendement tendant à abroger l'article 21-14-2 du code civil compte tenu des modifications proposées concernant l'organisation de la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française.

A l'article 62 (coordination), la commission a adopté un amendement tendant à permettre la naturalisation d'enfants mineurs restés étrangers dont l'un des parents aurait acquis la nationalité française, à condition d'avoir résidé avec ce parent durant les cinq années précédant le dépôt de la demande.

A l'article 62 bis (réduction du délai de réponse de l'autorité publique à une demande de naturalisation à l'égard des étrangers ayant en France leur résidence habituelle depuis dix ans), la commission a adopté un amendement améliorant la rédaction globale du dispositif.

A l'article 62 quater (réduction du délai de réponse de l'autorité publique à une demande de naturalisation à l'égard des étrangers ayant en France leur résidence habituelle depuis dix ans), la commission a adopté un amendement tendant à étendre à l'ensemble des modes d'acquisition de la nationalité française, à l'exception de celle découlant d'une possession d'état, le bénéfice de la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française.

A l'article 62 quinquies (possibilité pour le maire d'organiser la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française), la commission a adopté un amendement tendant à prévoir que la délégation de l'organisation de la cérémonie d'accueil dans la citoyenneté française au maire, en sa qualité d'officier d'état civil, peut être refusée par le préfet.

A l'article 63 ter (sanctions pénales applicables en cas de reconnaissance d'enfant effectuée aux seules fins d'obtenir ou de faire obtenir un titre de séjour ou la nationalité française), la commission a adopté un amendement tendant à punir des peines prévues par cet article le fait de reconnaître un enfant aux seules fins d'obtenir le bénéfice d'une protection contre l'éloignement.

La commission a ensuite adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 63 ter tendant à préciser que la réforme du droit de la filiation intervenue du fait de l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 est sans effet sur la nationalité des personnes majeures à la date de son entrée en vigueur.

Puis la commission a adopté deux amendements tendant à insérer deux articles additionnels après l'article 64 afin :

- d'étendre, à compter du 1er décembre 2007, le bénéfice de l'aide juridictionnelle devant la commission des recours des réfugiés aux étrangers entrés irrégulièrement sur le territoire français ;

- de préciser dans la loi que les recours devant la commission des recours des réfugiés doivent être exercés dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides.

A l'article 65 (centres d'accueil pour demandeurs d'asile), la commission a adopté, outre un amendement rédactionnel, un amendement tendant à préciser que la création et la gestion par l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) d'un fichier comportant des données personnelles relatives à l'occupation des centres d'accueil pour demandeurs d'asile devraient respecter la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

La commission a ensuite adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 66 afin de permettre la communication par l'Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) de données personnelles nécessaires au versement de l'allocation temporaire d'attente.

A l'article 72 ter (observatoire de l'immigration de la Guadeloupe et de la Martinique), la commission a adopté un amendement tendant à codifier les mesures relatives aux observatoires de l'immigration dans les départements d'outre-mer et à clarifier leurs compétences.

A l'article 75 (règles de l'état civil applicables à Mayotte - procédure d'opposition aux reconnaissances frauduleuses de paternité à Mayotte), la commission a adopté un amendement de précision ainsi qu'un amendement tendant à maintenir l'application à Mayotte des dispositions relatives aux accouchements sous X.

A l'article 78 (renforcement temporaire des contrôles d'identité en Guadeloupe et à Mayotte), la commission a adopté un amendement tendant à assurer une coordination.

A l'article 80 (entrée en vigueur des dispositions relatives aux reconnaissances de paternité à Mayotte), la commission a adopté un amendement tendant à supprimer cet article compte tenu du fait que l'entrée en vigueur de la présente loi ne devrait pas intervenir avant le 1er juillet 2006.

La commission a adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 80 ayant pour objet de reporter l'entrée en vigueur de l'article 23 du projet de loi afin qu'elle intervienne après la promulgation du projet de loi relatif au contrôle de la validité des mariages.

A l'article 82 bis (entrée en vigueur de la réforme de l'obligation de quitter le territoire français), la commission a adopté un amendement de coordination.

Bien qu'indiquant être dubitatif sur plusieurs points du projet de loi, M. François Zocchetto a déclaré qu'en raison des amendements présentés par le rapporteur et des travaux de la commission il approuvait le projet de loi ainsi modifié.

La commission a alors adopté le projet de loi ainsi modifié.

Aller plus loin :

- Rapport n° 371, tome I (2005-2006) de M. François-Noël BUFFET, fait au nom de la Commission des lois du Sénat, déposé le 31 mai 2006 : (rapport)

- Rapport n° 371, tome II (2005-2006) de M. François-Noël BUFFET, fait au nom de la Commission des lois du Sénat, déposé le 31 mai 2006 : (tableau comparatif)