samedi, mai 31, 2008

1931, les étrangers au temps de l'Exposition coloniale

Colonies et émigrés de 1931
LE MONDE | 28.05.08

A Paris, la Cité de l'immigration fait revivre les coulisses de l'exposition coloniale de 1931.

Le 15 novembre 1931, au coeur du bois de Vincennes, à Paris, devant près de 400 000 personnes, les couleurs étaient amenées pour la dernière fois au sommet d'une éphémère tour de bronze de 82 mètres. L'Exposition coloniale s'achevait sur une note à la mesure de son triomphe.

En six mois, pas moins de 8 millions de visiteurs avaient entrepris "le tour du monde en un jour" vanté par les organisateurs. Ils y avaient découvert les piroguiers du Dahomey, les danseuses de Bali, les musiciens des Antilles et les comédiens malgaches. Ils avaient arpenté les dizaines de pavillons, jubilé devant les reproductions grandeur nature du temple d'Angkor Vat ou d'un palais de Tombouctou. Ils avaient rempli théâtres, concerts et cafés, observé jusqu'à minuit fontaines lumineuses et spectacles pyrotechniques.


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Un succès populaire doublé d'une réussite financière : 33 millions de francs de bénéfice sur 320 millions de francs de budget. L'opération marquait en outre durablement le Sud-Est parisien : le métro était prolongé, les boulevards extérieurs élargis, le bois transformé.

Pour sa première grande exposition temporaire, la Cité nationale de l'histoire de l'immigration a choisi de faire revivre cette scène exceptionnelle. Installée depuis septembre 2007 au palais de la porte Dorée, dernier vestige de la fameuse exposition, la Cité y présente, dans toute sa brutalité, cette célébration de l'oeuvre coloniale.

A peine l'entrée franchie, une carte du monde, peinte par Henri Milleret et exposée au pavillon des armées, plante le décor : "C'est avec 76 900 hommes que la France assure la paix et les bienfaits de la civilisation à ses 60 millions d'habitants." Frises, fresques, tableaux, sculptures, photos, affiches, cartes postales, journaux, costumes et maquettes, souvent sortis pour la première fois des réserves du Musée du quai Branly, nourrissent la reconstitution. Faute de volume approprié, on devine l'ampleur plus qu'on ne la ressent. Mais là n'est pas l'essentiel.


6,9 % DE LA POPULATION


Derrière la scène, ce sont les coulisses, et derrière le théâtre, le monde réel que l'exposition "1931, les étrangers au temps de l'Exposition coloniale" entreprend de faire apparaître. Un monde fragilisé par le krach de 1929. Un monde de tensions et de premiers craquements. 1931 marque en effet l'apogée de la présence étrangère en France. Ils sont alors 2,8 millions, dont 800 000 Italiens, soit 6,9 % de la population métropolitaine : mineurs, ouvriers, paysans. Loin du tintamarre de l'événement, leur présence s'est imposée, avant, pendant et après la première guerre mondiale, silencieuse et massive. Au travail, d'abord, mais aussi dans les loisirs, le logement, la culture.

Colonisation, immigration : tout le parti pris de l'exposition tient précisément dans ce souci de faire résonner les deux phénomènes. Là-bas, dans ces terres d'outre-mer, où se côtoient Français, étrangers et surtout "indigènes" privés de droits. Ici, où cohabitent travailleurs, non-travailleurs et réfugiés. La prétendue mission civilisatrice glorifiée par les oeuvres d'art et les plans somptueux, d'un côté ; les images et objets du quotidien, de l'autre, à commencer par cette mosaïque de papiers d'identité : visages anonymes, inconnus, au milieu desquels apparaît un jeune Espagnol sans moustaches nommé Salvador Dali.

Immigration de travail, immigration politique et même immigration de transit, vers les Etats-Unis ou l'Amérique du Sud : l'exposition s'emploie à incarner la complexité du phénomène. Dans les mines, Français et étrangers luttent côte à côte, mais ailleurs se multiplient les manifestations xénophobes ou antisémites. La presse livre ici son habituel et efficace témoignage. Plus édifiant, la Cité expose les travaux "scientifiques" de Georges Mauco et sa thèse sur le degré d'assimilabilité des différentes "races". Dix ans plus tard, le régime de Vichy saura en faire usage.

Pour l'heure, nous sommes encore en 1931. Dans les allées du bois, éléphants et dromadaires éblouissent un petit garçon nommé François Cavanna. L'écrivain en livre le témoignage sonore. A quelques centaines de mètres, dans le 12e arrondissement, un immeuble poursuit sa vie de tous les jours. Une grande installation reconstitue les appartements, étage par étage. De haut en bas : une cuisinière française ; un manoeuvre algérien ; un maçon italien ; une blanchisseuse, un employé d'hôtel et un employé du gaz, tous français ; un marchand ambulant chinois ; un manoeuvre, chinois encore... On rêve de les entendre se parler, s'interpeller, ou plaisanter "Va donc, indigène ! - Chez toi, étranger !"

Lors de son inauguration, l'an dernier, la Cité de l'histoire de l'immigration s'était vu reprocher de ne pas lier l'immigration au fait colonial et à ses conséquences. Huit mois plus tard, elle a trouvé la meilleure réponse possible : une très belle exposition.


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"1931, les étrangers au temps de l'Exposition coloniale." Jusqu'au 7 septembre. Cité nationale de l'histoire de l'immigration, 293, avenue Daumesnil, Paris-12e. Tél. : 01-53-59-58-60.

Un "pacte européen pour l'immigration" proposé par la France

Hortefeux propose un "pacte pour l'immigration"
NOUVELOBS.COM | 31.05.2008

Le document de travail du ministre de l'Immigration, qui a pour objectif d'harmoniser les politiques européennes, entend notamment instaurer au niveau communautaire l'expulsion des migrants illégaux, un droit d'asile, et promouvoir l'immigration professionnelle légale.

Brice Hortefeux, le ministre de l'Immigration, a présenté à ses homologues de l'Union Européenne un document de travail visant à sceller un "pacte pour l'immigration" européen, indique vendredi 30 mai Le Figaro. Ils devraient en discuter le 7 juillet à Cannes, lors d'un conseil informel des ministres de l'Immigration, dans le cadre de la présidence française de l'Union Européenne qui débutera le 1er juillet.

Le texte repose sur la conception que "le flux migratoire doit impérativement s'adapter aux capacités d'accueil de l'Europe, sur le plan du marché du travail, du logement, des services sanitaires, scolaires et sociaux".

Expulsion et asile

Composé de cinq chapitres, il a pour objectif d'harmoniser les politiques européennes. Les deux premiers développent un volet sécuritaire. Brice Hortefeux souhaite une Europe qui fasse "respecter sur l'ensemble de son espace, la règle selon laquelle un migrant en situation irrégulière a vocation, soit à partir volontairement, soit à être reconduit dans son pays".
Un troisième chapitre vise à "bâtir une Europe de l'asile", qui pourrait se heurter à des réticences de la part de certains partenaires. Le document propose d'instaurer d'ici 2010 "des garanties communes en matière d'asile et un statut de réfugié uniforme".

Un quatrième veut promouvoir l'immigration professionnelle légale, où chaque Etat membre conserverait la liberté de définir ses besoins. Dans le cadre de la présidence française de l'Union Européenne, Nicolas Sarkozy souhaite également l'adoption d'une directive instaurant une "carte bleue", sur le même modèle de la carte verte américaine. Il s'agit d'une autorisation de travail pour les immigrés hautement qualifié.

Le document stipule également que les pays doivent dispenser des cours de langues et définir un contrat d'intégration qui impliquerait "l'apprentissage des identités nationales et des valeurs européennes".

Un cinquième chapitre, moins fourni, met l'accent sur la nécessité de promouvoir la coopération économique avec les pays d'origine.

lundi, mai 26, 2008

L'ambassadeur du Mali juge « légitime » la revendication de régularisation

Depuis le 15 avril , près de 1 000 travailleurs sans papiers se sont mis en grève en Ile-de-France pour réclamer leur régularisation. Selon la CGT, qui soutient leur action, 70 % d'entre eux sont maliens. Dans un entretien au Monde, Mohamed Salia Sokona, ambassadeur du Mali à Paris, demande à la France d'être « humaine » dans le traitement des dossiers de ses ressortissants.

Comment percevez-vous le mouvement des travailleurs sans papiers ?

Je ne peux pas rester indifférent face à une telle situation. Il y a des gens qui ont du travail et qui veulent sortir de cette situation inconfortable. Nous sommes très solidaires de leur revendication légitime, qui est la régularisation. Nous ne demandons pas l'impossible.

Le gouvernement français s'est dit prêt à régulariser « au cas par cas ». Le regrettez-vous ?

L'essentiel pour nous, c'est que le gouvernement français puisse examiner les dossiers avec un côté humanitaire : c'est quelque chose qu'on pourrait saluer.

C'est ce qui pourrait vous inciter à signer les « accords de gestion concertée des flux migratoires » avec Brice Hortefeux, ministre de l'immigration ?

Nous sommes en pleine négociation. Il n'y a aucune précipitation. Mais je tiens à dire que nous avons toujours été contre l'immigration clandestine. Il faut que les compatriotes comprennent qu'ils doivent être en règle dans le pays d'accueil.

Ceux de vos compatriotes qui viennent en France font-ils le bon choix ?

Ils ne vont pas forcément trouver un eldorado. Mais ces gens qui viennent ici, avez-vous vu dans quelle souffrance ils vivent pour nourrir leur famille ? Ils font beaucoup pour le développement économique du pays : c'est remarquable !

Je dois préciser que leur départ n'est pas toujours lié à une raison économique, c'est très culturel aussi chez nous de partir : ça forge l'homme.

Vous ne souhaitez pas les retenir ?

Nous oeuvrons pour qu'ils ne soient plus tentés par le départ. Et, pour ceux qui sont loin du pays, il nous faut trouver des projets afin qu'ils reviennent investir et s'installer chez eux. Nous y parviendrons.

Le Monde du 22.05.08

dimanche, mai 25, 2008

En Italie, un climat de chasse à l'étranger

Le Monde du 17.05.08

L'Italie ne procédera pas à des « expulsions de masse » d'immigrés en situation irrégulière. Le ministre de l'intérieur, Roberto Maroni, s'est senti obligé de le préciser, jeudi 15 mai, après une journée où la question de l'immigration et des Roms, les Tziganes d'origine roumaine, a monopolisé les débats.

A la « une » des journaux, le matin, on pouvait voir les photos des incendies de camps de Roms à Ponticelli, près de Naples, à la suite d'une tentative de rapt d'un bébé italien de la part d'une Tzigane. Dans l'après-midi, le chef de la police criminelle Francesco Gratteri annonçait les résultats d'une vaste opération contre le crime lié à l'immigration clandestine : dans neuf régions du pays, 383 personnes dont 268 étrangers, essentiellement originaires de Roumanie et des pays du Maghreb, ont été interpellés pour trafic de drogue, exploitation de l'immigration clandestine, vols et proxénétisme. Une cinquantaine d'étrangers ont été expulsés. 65 autres ont été placés dans des centres de rétention.

Dans la soirée, la télévision diffusait les images de la descente nocturne de la police municipale de Rome dans le plus grand camp Rom de la ville. Un climat de chasse à l'étranger semble s'installer alors que le gouvernement prépare un tour de vis contre l'immigration. Le paquet de mesures sur la sécurité devrait être approuvé lors du premier conseil des ministres qui se tiendra la semaine prochaine à Naples. Selon la presse, il devrait prévoir le nouveau délit d'immigration clandestine, le test ADN pour les regroupements familiaux ainsi que la justification d'un revenu et d'un logement décent sous peine d'un rapatriement dans le pays d'origine. La loi, dit-on, viserait principalement les Roms. Lesquels sont 160 000 en Italie. Un « commissaire » aux Roms sera nommé à Milan, Naples et Rome. Une mesure annoncée après la rencontre entre le ministre Maroni et son homologue roumain Cristian David, dépêché à Rome après que Bucarest s'est émue de la dérive xénophobe en Italie. Tout semble réglé. Les rapports entre les deux pays sont « excellents », a déclaré M. David. La création d'une commission paritaire pour une coopération policière renforcée est envisagée. Mercredi, le premier ministre roumain assurait à ses compatriotes que le paquet législatif italien ne les ciblait pas.

Les Eglises chrétiennes de France pour une immigration qui respecte droits et valeurs

Le Conseil d'Eglises chrétiennes en France, qui regroupe catholiques, protestants et orthodoxes, a estimé le 14 mai que la présidence française de l'UE devait être « une chance pour que l'harmonisation des politiques migratoires se fasse dans le respect des valeurs et des droits qui ont fait de [l'Europe] un espace de liberté et de paix ». - (AFP.)

samedi, mai 24, 2008

La lutte contre les clandestins se généralise en Europe

L'union européenne, dans son ensemble, s'apprête à renforcer sa lutte contre l'immigration clandestine. Mercredi 21 mai, les ambassadeurs des vingt-sept Etats membres étaient réunis pour tenter de trouver un accord sur le projet de directive visant à harmoniser les normes d'expulsion des migrants illégaux.

Cette « directive retour » doit en principe être soumise le 4 juin au Parlement européen et le 5 juin au conseil des ministres, pour une adoption en première lecture. En l'état actuel, ce projet, qui fait encore l'objet d'intenses débats, autorise une durée de rétention jusqu'à 18 mois et instaure une interdiction de revenir en Europe pendant cinq ans.

Au cours de la présidence française de l'Union, au second semestre 2008, le président Nicolas Sarkozy entend aussi parvenir à la signature d'un « pacte européen sur l'immigration » qui engagerait notamment les Etats membres à « renoncer aux régularisations massives et collectives » et à renforcer le contrôle des frontières de l'UE. D'un pays à l'autre, les politiques migratoires restent cependant encore très variables, et évolutives, au regard de la culture et de la conjoncture.

La France a depuis 2003 érigé en priorité la lutte contre l'immigration clandestine. Depuis lors, le gouvernement se fixe chaque année un objectif chiffré d'expulsions. Passé d'un peu moins de 10 000 en 2002 à 25 000 en 2007, celui-ci est chaque année revu à la hausse, bien que se révélant de plus en plus difficile à atteindre. Aussi la France a-t-elle adopté, entre 2003 et 2007, trois nouvelles lois visant à renforcer les outils de lutte contre l'immigration clandestine (évaluée entre 200 000 et 400 000 personnes) et à substituer une « immigration choisie » (professionnelle qualifiée) à « l'immigration subie » (familiale et illégale). Opposée à toute régularisation massive, la France a régularisé en 2006, sous la pression de la société civile, 6 927 parents d'enfants scolarisés.

Au Royaume-Uni, le gouvernement travailliste, un temps accusé de laxisme, met désormais l'accent sur la répression. Les autorités disent « éloigner » un clandestin toutes les huit minutes (plus de 63 000 en 2007). Le ministre de l'immigration, Liam Byrne, a récemment lancé un plan visant à accélérer le rythme des reconduites à la frontière. Le programme prévoit l'accroissement de 60 % du nombre de places en centres de rétention ainsi que le renforcement des contrôles aux frontières nationales (le Royaume-Uni ne fait pas partie de l'espace Schengen). Londres compte mettre en place progressivement la carte d'identité, sujet très controversé dans le pays, et la prise d'empreintes digitales pour les demandeurs de visa. Un nouveau système d'« immigration à points », visant une immigration « choisie », est en cours d'application.

En Allemagne, l'immigration clandestine constitue un délit passible d'une amende ou d'une peine d'emprisonnement jusqu'à un an. Pour lutter contre l'immigration illégale (évaluée entre 100 000 et un million de personnes), la police allemande a multiplié ces dernières années les contrôles à l'intérieur du pays. Toutefois, depuis 2007, une législation permet de régulariser certains immigrés en situation irrégulière. Il s'agit d'étrangers dits « tolérés » dont la procédure d'expulsion a été suspendue pour diverses raisons. 14 750 « tolérés » sur les 154 780 existants ont déjà été régularisés.

En Espagne, le temps des régularisations massives est révolu. La conjoncture économique a convaincu le gouvernement Zapatero d'adopter des mesures répressives à l'encontre de l'immigration clandestine (évaluée entre 300 000 et 800 000 personnes). Si les étrangers d'Europe, d'Amérique latine et du Maroc continuent d'être nombreux à venir chercher du travail, les autorités luttent surtout contre l'arrivée des sans-papiers d'Afrique subsaharienne. En 2007, les rapatriements se sont élevés à 55 938 - 6 % de plus qu'en 2006 et l'arrivée des sans-papiers par mer s'est réduite de 54 %.


Source : Le Monde du 23.05.08

jeudi, mai 15, 2008

Immigration choisie : quand la « rupture » se heurte aux réalités du marché du travail

Immigration choisie : quand la « rupture » se heurte aux réalités du marché du travail

Le Monde du 06.05.08

Prenant acte d'une nécessaire relance de l'immigration de travail (6 % des flux migratoires annuels seulement), la politique du nouveau Ministère de l'immigration marque, du moins dans ses postulats, un tournant par rapport à celles qui l'ont précédée ces trente dernières années. Des listes de métiers ouverts, région par région, aux étrangers ont ainsi été établies.

Ce tournant ira jusqu'à conduire le nouveau ministre de l'immigration à accueillir, bon gré mal gré, dans son projet de loi présenté à l'automne 2007, un amendement ouvrant la possibilité pour des étrangers en situation irrégulière d'obtenir un titre de séjour sur la base d'une promesse d'embauche.

Cependant, cette « rupture » est occultée par la priorité donnée à la lutte contre l'immigration irrégulière. Incarnée par la « culture du résultat », cette priorité soumet les préfectures à des objectifs chiffrés de reconduites « effectives » d'étrangers à la frontière. Des objectifs, d'une année sur l'autre, revus à la hausse : 25 000 reconduites prévues en 2007, 26 000 en 2008.

Le ministre de l'immigration n'a de cesse de souligner que sa politique « ne se résume pas à un chiffre ». Selon M. Hortefeux, « il y a le principe - tout immigré en situation irrégulière a vocation à être reconduit dans son pays d'origine - et la pratique », laquelle n'interdit pas d'examiner les situations particulières « avec justice et humanisme ».

ARRESTATION ILLÉGALE

Reste que les préfectures, soumises à forte pression, finissent par rester sourdes à des situations individuelles, que celles-ci se caractérisent par des problèmes sanitaires, familiaux, sociaux, ou même qu'elles remplissent les critères de l'immigration choisie, répondant à un réel besoin économique. Convocations-pièges en préfecture, « chasses » dans certains quartiers, arrestations à domicile : l'administration est entraînée dans une telle surenchère qu'elle en vient à développer des pratiques à la limite de la légalité.

Le 6 février 2007, la Cour de cassation a pourtant considéré comme illégale l'arrestation d'un sans-papiers convoqué au guichet d'une préfecture.

Les associations ne sont plus les seules à s'alarmer de cette spirale. Des policiers, des juges, des avocats sont aussi nombreux à dénoncer les dérives liées à la politique des expulsions.

Les récentes grèves, inédites, de travailleurs réclamant des titres de séjour témoignent des contradictions de la situation. Le gouvernement, soucieux de ne pas céder à la pression et de ne pas prêter le flanc aux critiques de l'extrême droite, insiste sur le caractère « exceptionnel » et discrétionnaire du dispositif de régularisation par le travail, et rappelle que sa priorité reste « la lutte contre l'emploi illégal des étrangers ». Le ministère de l'immigration évoque quelques centaines de salariés et défend un « examen au cas par cas ». Mais les étrangers concernés sont plus probablement plusieurs dizaines de milliers.

La méthode du « cas par cas » comporte en outre un risque : celui de bafouer le principe constitutionnel d'équité, en masquant la fixation de quotas arbitraires. Ce fut le cas à l'été 2006, lorsque, sur 33 500 demandeurs, seuls 6 900 parents sans papiers d'enfants scolarisés avaient été régularisés.

Dans le même temps, les réalités du marché du travail imposeront de conserver la main-d'oeuvre immigrée dans les emplois non délocalisables et peu convoités par les Français (BTP, restauration, services à la personne...). « Il est de bon sens, avant d'accueillir de nouveaux étrangers, de voir si certains, qui sont déjà sur notre sol, ne correspondent pas aux besoins affichés région par région », ont souligné, dans un récent communiqué, les députés UMP Frédéric Lefebvre et Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale.

mardi, mai 06, 2008

Immigrés, assimilation, intégration, insertion : quelques définitions

Immigrés, assimilation, intégration, insertion : quelques définitions

Dans son ouvrage « L’immigration » (collection Débat Public, 2006), Laetitia Van Eeckhout présente et explique le thème de l’immigration en 135 questions, en précisant les conditions historiques, les évolutions et les enjeux de ce phénomène.

Les deux questions reproduites ici définissent clairement les notions essentielles des débats sur l’immigration : immigré, assimilation, intégration, insertion.

Qu’est-ce qu’un immigré ?

« Est immigrée toute personne née de parents étrangers à l’étranger et qui réside sur le territoire français. Certains immigrés deviennent français par acquisition de la nationalité française, les autres restent étrangers : "Tout immigré n’est pas nécessairement étranger, et réciproquement", souligne l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). La qualité d’immigré est permanente : un individu continue à appartenir à la population immigrée même s’il devient français par acquisition. En revanche, on parle souvent d’immigrés de la deuxième ou troisième génération pour désigner les enfants dont les parents ou les grands-parents sont immigrés. Pour ceux, nombreux, qui sont nés en France, c’est un abus de langage. Les enfants d’immigrés peuvent cependant être étrangers, s’ils choisissent de garder la nationalité d’origine de leurs parents. »

Etrangers et immigrés en France

Les données issues des enquêtes de recensement de l’INSEE permettent de bien distinguer étrangers et immigrés en France.

Schéma représentant les étrangers et immigrés en France
Source : INSEE, enquêtes annuelles de recensement 2004 et 2005 (chiffres pour la métropole).

Assimilation, intégration ou insertion ?

« Ces trois termes ne sont pas neutres et reposent sur des philosophies politiques (très) différentes. L’assimilation se définit comme la pleine adhésion par les immigrés aux normes de la société d’accueil, l’expression de leur identité et leurs spécificités socioculturelles d’origine étant cantonnée à la seule sphère privée. Dans le processus d’assimilation, l’obtention de la nationalité, conçue comme un engagement "sans retour", revêt une importance capitale.

L’intégration exprime davantage une dynamique d’échange, dans laquelle chacun accepte de se constituer partie d’un tout où l’adhésion aux règles de fonctionnement et aux valeurs de la société d’accueil, et le respect de ce qui fait l’unité et l’intégrité de la communauté n’interdisent pas le maintien des différences.

Le processus d’insertion est le moins marqué. Tout en étant reconnu comme partie intégrante de la société d’accueil, l’étranger garde son identité d’origine, ses spécificités culturelles sont reconnues, celles-ci n’étant pas considérées comme un obstacle à son intégration dès lors qu’il respecte les règles et les valeurs de la société d’accueil. »


vendredi, avril 04, 2008

Appel du Syndicat de la magistrature et du Syndicat des avocats de France : Non à une justice d’exception pour les étrangers

Appel du Syndicat de la magistrature et du Syndicat des avocats de France : Non à une justice d’exception pour les étrangers

Les étrangers ne sont plus des justiciables comme les autres.

Les lois successives piétinent les droits fondamentaux garantis aux autres citoyens par la justice : le droit à un procès équitable, à l’assistance d’un avocat et d’un interprète, le droit à un recours effectif. Pour les étrangers, l’enfermement prévaut sur la liberté.

Les parquets se sont mis au service de la politique « du chiffre » imposée par le pouvoir actuel. Rachida DATI, ministre de la justice a même rappelé qu’elle était la « chef » des procureurs et utilise son autorité pour demander aux parquets de multiplier les contrôles d’identité ciblés sur les étrangers.

Le contrôle exercé par les juges judiciaires devient résiduel. Les réformes récentes et à venir créent une véritable justice d’exception pour les étrangers en situation irrégulière. Ils peuvent être jugés au sein même des zones d’attentes ou des centres de rétention et non plus au sein des palais de justice comme les autres justiciables.

Au prétexte que la justice « annulerait trop des procédures », il faudrait même modifier la constitution pour faire disparaître le juge judiciaire de ce processus. Ainsi, les libertés individuelles ne mériteraient pas d’être protégées lorsqu’elles concernent de « simples étrangers. »

De plus, la pénalisation des actes de solidarité ou de soutien aux étrangers renforce l’instrumentalisation de cette justice spéciale des étrangers.

Nous refusons la création d’une justice d’exception pour les étrangers. Nous appelons les professionnels du droit attachés à nos valeurs à se joindre à la manifestation du 5 avril 2008 place d’Italie.

USMA reçu par la Commission Mazeaud sur la politique d'immigration

USMA - Union Syndicale des Magistrats Administratifs

Questions budgétaires et financières : Politique de l’immigration

L’Usma a pris attache dès le mois de janvier avec les décideurs politiques dans la perspective de la préparation du budget pour l’année de 2009. Nous avons donc rencontré les cabinets du Président de la république (14 février), du ministre de la justice (7 février) et du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique (6 mars) pour évoquer les besoins de nos juridictions ainsi que les lignes directrices de ce qui devrait être la politique budgétaire du gouvernement concernant la justice administrative.

Voici le compte-rendu de ses réunions :

I Questions budgétaires et financières

USMA a rappelé la carence générale des effectifs que chacun peut constater dans les tribunaux administratifs, cette situation étant aggravée dans les juridictions les plus importantes. Cette situation est, notamment, la conséquence d’un phénomène connu des pouvoirs publics, à savoir l’accroissement tendanciel des citoyens à saisir la justice administrative.

Or les hausses spectaculaires du volume d’affaires enregistrées ces cinq dernières années n’ont été, comme nous le savons tous, que très insuffisamment prises en compte en ce qui concerne les créations de postes, le choix de n’appliquer la dernière LOPJ qu’à demi-charge pour les années 2005, 2006 et 2007 étant, à cet égard, particulièrement regrettable et dommageable. Par ailleurs le contentieux continue de croître, même si c’est un peu plus modérément en 2007.

En outre la poursuite des effets constatés sur le volume de contentieux des nouvelles procédures OQTF associée aux effets programmés des futures procédures fondées sur le droit au logement opposable constitue une réelle menace pour l’équilibre des stocks pour les mois et les années à venir.


II Sur la politique de l’immigration

USMA a été reçu par la commission Mazeaud, dont la lettre de mission comporte deux aspects principaux, à savoir :

- la mise en oeuvre d’une politique de quotas,

- une éventuelle unification du contentieux des étrangers.

La commission est naturellement libre d’aborder, indépendamment de la lettre de mission, tous les sujets de nature à améliorer le traitement de ce contentieux.

USMA a rappelé, synthétiquement, le contexte :

- la loi du 24 juillet 2006 créant les OQTF n’a pas réussi à endiguer le flux des requêtes et a créé, par l’instauration de l’obligation de juger en trois mois, un effet d’éviction particulièrement redoutable sur les autres contentieux ;

- ce contentieux représente à peu près un quart de l’activité des juridictions administratives ;

- le taux d’exécution des mesures d’éloignement pour le premier semestre de 2007 est tout aussi faible qu’auparavant (de l’ordre de 700 mesures exécutées pour plus de 27000 OQTF prononcées) ;


USMA rappelle essentiellement trois points.

1) Le traitement des effets de la loi du 24 juillet 2006 :

USMA a rappelé notamment que le traitement des effets de la loi du 27 juillet 2006 passe par :

- la suppression de l’obligation de juger en trois mois,

- et/ou le renforcement massif des moyens dans les juridictions engorgées par ce contentieux.

2) La question des quotas :

USMA a qu’une éventuelle politique basée sur des quotas ... ait également pour objectif de ne pas nous compliquer la tâche au contentieux.

3) L’unification éventuelle du contentieux des étrangers :

USMA a rappelé plusieurs évidences, d’ailleurs connues des membres de la commission :

- il n’y a aucune contradiction de jurisprudence entre les décisions des ordres judiciaire et administratifs dès lors qu’elles ne portent pas sur les mêmes questions ;

- USMA se dit résolument opposés à un transfert du contentieux des étrangers vers la juridiction judiciaire dès lors que ce transfert remettrait en cause l’existence même de la juridiction administrative ;

- USMA ne serait en aucune manière en mesure d’absorber un flux d’environ 25 000 décisions de prolongation de rétention en provenance de l'ordre judiciaire ;

- USMA s'intérroge en cas de transfert, quel qu’en soit le sens, de savoir comment régler la question des effectifs, sauf à se voir expliquer comment il est possible de transférer et déplacer d’autorité des magistrats ... inamovibles.

USMA a affirmé clairement sa résolution en faveur du statu quo et de l’amélioration du système dans le cadre actuel de la dualité de juridictions.

En 2007, la demande d'asile a de nouveau baissé en France

La France perd la première place pour les demandes d'asile
En 2007, la demande d'asile a de nouveau baissé en France
LEMONDE.FR avec AFP 03.04.08


Avec 35 520 demandes enregistrées, la demande d'asile en France a baissé de 9,7 % en 2007 par rapport à 2006, relève le rapport annuel de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), publié jeudi 3 avril.

L'année 2007 marque toutefois un net infléchissement de la tendance de forte baisse des demandes, amorcée depuis 2004. Alors que la demande globale d'asile avait baissé en 2006, pour la troisième année consécutive, de 33,6 %, elle ne s'est réduite que de 9,7 % en 2007. Les premières demandes d'asile ont également baissé de 9,4 %, comprenant 23 804 cas en 2007 contre 26 269 en 2006. Les réexamens ont chuté de 28,6 %.
L'Ofpra, dont la tutelle est passée depuis la loi du 20 novembre 2007 du ministère des affaires étrangères au ministère de l'immigration, souligne que la demande d'asile en France en 2007 a aussi été caractérisée par une augmentation de 24,6 % du nombre des mineurs accompagnants, dont le cas est indissociable de celui de ses parents.

LA FRANCE, DEUXIÈME PAYS D'ACCUEIL

La France, qui jusqu'en 2006 était la première destination des demandeurs d'asile en Europe, est passée en 2007 au deuxième rang, après la Suède. Ce pays, avec 36 207 demandes, a en effet connu un très fort accroissement (48,9 %) de la demande d'asile, de même que la Grèce qui, avec une hausse de 117,9 %, se place désormais au quatrième rang européen, juste après l'Allemagne et devant la Grande-Bretagne.

En 2007, 8 781 personnes ont été placées sous la protection de l'Ofpra, le taux global d'admission passant de 19,5 % en 2006 à 29,9 % en 2007. Au total, ce sont 130 926 personnes qui ont en France le statut de réfugiés statutaires. L'Europe est le principal continent d'où viennent les demandeurs d'asile. En revanche, ce sont les Maliens (en raison du risque de mutilation génitale pour les femmes), les Erythréens et les Rwandais qui figurent parmi les demandeurs qui accèdent le plus facilement au statut de réfugié. En ce qui concerne les déboutés, ils ont été 23 569 en 2007, et 171 594 depuis cinq ans. Les trois premières nationalités pour les déboutés sont les Turcs, les Chinois et les ressortissants de la République démocratique du Congo.

Dans un communiqué, l'Association France Terre d'asile a estimé que la protection est certes "à la hausse", mais en "trompe l''œil", argumentant que près de 14 000 personnes étaient protégées en 2005. Constatant que l'accueil des demandeurs d'asile se déplace vers les pays périphériques de l'Union européenne, l'association a également souligné la nécessité d'un "véritable système de solidarité européenne".


Les syndicats de l'Ofpra appellent à la grève contre le projet de loi sur

Les syndicats de l'Ofpra appellent à la grève contre le projet de loi sur
l'immigration
LEMONDE.FR avec AFP | 03.04.08


Les deux syndicats présents à l'Office français de protection des réfugiés
et apatrides (l'Ofpra), la CGT et l'Asyle (Action syndicale libre) appellent à
une journée de grève mercredi pour dénoncer l'une des mesures de la loi sur
l'immigration qui réduirait les délais de recours pour les déboutés du
droit d'asile. Les avocats qui plaident devant la commission de recours des
réfugiés (CRR) seront également appelés à la grève et à refuser de plaider,
ajoute l'Asyle.

Les syndicats appellent à se mettre en grève contre le projet, contenu dans
la loi actuellement en discussion au Sénat, de réduction de un mois à 15 jours du délai de recours devant la Commission des recours des réfugiés, qui "nuirait inévitablement aux demandeurs d'asile, en réduisant leurs chances de voir leur recours aboutir", explique l'Asyle dans un communiqué. Ils s'opposent également à la limitation à 24 heures du recours suspensif en zone d'attente.

Les syndicats appellent à un rassemblement à 9 heures devant l'Ofpra à
Fontenay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) et à une manifestation à 12 h 30
devant la CRR, à Montreuil-sous-Bois (Seine-Saint-Denis).

mercredi, avril 02, 2008

Grande-Bretagne : Un rapport parlementaire britannique conteste les bienfaits de l'immigration

Un rapport parlementaire britannique conteste les bienfaits de l'immigration
Des députés britanniques estiment dans un rapport publié mardi par la Chambre des communes que l'immigration a très peu bénéficié à l'économie du Royaume-Uni, contrairement à ce qu'a encore soutenu le Premier ministre Gordon Brown le jour même.

La commission des affaires économiques présidée par Lord John Wakeham demande une nouvelle limitation de l'immigration, qui a atteint des niveaux record ces dernières années. Selon le rapport, le solde entre l'immigration et la émigration est positif de plus de 300.000 en 2006, alors qu'il était inférieur à 100.000 par an au début des années 1990.

La Grande-Bretagne a vu arriver ces dernières années de nombreux Polonais et autres ressortissants des dix pays (dont huit de l'ex-Europe de l'Est) entrés dans l'Union européenne en 2004.

A ceux qui accusent les immigrés de faire grimper les prix de l'immobilier et la délinquance, le gouvernement répond que ses dernières données font état d'une contribution de 6 milliards de livres (7,6 mds euros) des immigrés à l'économie britannique.

"La plupart des gens de la City à Londres savent qu'ils en ont bénéficié de façon substantielle", a affirmé Gordon Brown mardi à la presse, évoquant le centre financier de Londres. Il a ajouté que le produit intérieur brut (PIB) par tête était passé de 13.900 livres en 1997 à 22.840 livres l'an dernier. Il a jugé impossible de stopper l'immigration mais a souligné les mesures prises pour limiter la part des ouvriers non qualifiés dans l'afflux.

La commission parlementaire dans son rapport estime que les immigrés non ou peu qualifiés font concurrence à leurs homologues britanniques. AP

dimanche, mars 23, 2008

France : Quid des contrats d'intégration

La France impose un contrat d'intégration
Source : Cyberpresse.ca

L'immigration pèse lourd en France: sur 62 millions d'habitants, 8% viennent de l'étranger. Et 200 000 personnes de plus arrivent chaque année, le double ou le triple si on compte les illégaux. Le président Sarkozy souhaite changer les règles, et favoriser l'immigration économique au détriment de la réunification des familles. Mais qu'importe le processus de sélection, tous devront signer un «contrat d'accueil et d'intégration».

Une étude européenne, parue en début de semaine, indique que la France est désormais l'un des pays ayant les politiques d'obtention de la citoyenneté les plus restrictives du continent.



Une trentaine de personnes originaires de pays aussi divers que le Mali, la Chine et le Brésil regardent, sans broncher, une courte vidéo censée leur expliquer comment les Français de toute provenance peuvent «vivre ensemble».

Le court document, projeté sur un écran adjacent à un buste de Marianne, débute sur une image de la tour Eiffel, avant de souligner l'importance des valeurs de liberté, de fraternité et d'égalité issues de la Révolution 1789. «Pour vivre ensemble, il est nécessaire de les comprendre et de les respecter», souligne d'emblée le narrateur à l'attention du public, formé d'immigrants dotés, depuis peu, d'un titre de séjour.

Réunis à Paris à l'initiative de l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), ils doivent signer ce jour-là un «contrat d'accueil et d'intégration» qui lie leur maintien en sol français au respect d'un certain nombre d'engagements.

«C'est un contrat très, très, très important... En le respectant, vous trouverez votre place dans la société française», souligne l'animatrice de la séance, Bouchra el Hamdouchi, en brandissant un document de deux pages signé par le préfet de la région.

Le contrat en question, obligatoire depuis le 1er janvier 2007 pour tous les immigrants provenant de l'extérieur de l'Union européenne, précise en préambule que la France est un pays démocratique où chaque citoyen dispose de droits et de devoirs «sans distinction d'origine, de race et de religion». La femme, peut-on lire, est l'égale de l'homme ; la polygamie et les mariages forcés sont strictement interdits.

Le contrat impose au signataire de suivre une formation civique d'un après-midi. Il exige aussi l'obtention d'une maîtrise minimale du français. Au besoin, une formation linguistique est offerte aux frais de l'État. Un cours expliquant l'a b c administratif du pays peut aussi être requis. Ces engagements sont pris en compte par la préfecture au moment de remettre la carte de résident et peuvent constituer, s'ils ne sont pas respectés, un motif suffisant de refus.

100 000 contrats

Pour Hacene Chabane, immigrant d'origine algérienne de 28 ans rencontré à la mi-mars dans les locaux de l'Agence d'accueil, la signature du contrat ne pose aucun problème. «C'est très utile de savoir comment fonctionne la vie en France», dit M. Chabane, qui avoue avoir été surpris, dans un premier temps, lorsqu'il a entendu parler du contrat.

L'homme, arrivé au pays l'an dernier, maîtrise le français et se voit donc immédiatement exempté des cours de langue. Sa première préoccupation est de savoir comment il pourra caser la séance de formation civique sans empiéter sur son travail d'agent de sécurité. «Ne vous inquiétez pas. On ne va quand même pas vous demander d'abandonner votre emploi pour la suivre», le rassure Mme el Hamdouchi lors d'une rencontre individuelle.

En 2007, plus de 100 000 contrats du genre ont été signés en France. La mesure, introduite en 2003, a graduellement été élargie à l'ensemble du territoire avant de devenir obligatoire.

Selon Arlette Vialle, directrice territoriale de Paris à l'ANAEM, le pays a longtemps considéré à tort les immigrants comme des personnes qui venaient temporairement s'installer pour travailler avant de repartir. L'approche a changé au début des années 90. À l'époque, des émeutes ont mis en relief le fait qu'une fraction importante des immigrants peinaient à se trouver un travail et vivaient coupés de la société.

Le gouvernement cherche, en imposant le contrat, à encourager activement l'intégration des nouveaux arrivants, souligne Mme Vialle. «Ça permet d'éviter que des immigrants s'installent en France et s'habituent à vivre sans parler français dans un communautarisme total qui les exclut de la société.»

Sus aux illégaux

L'imposition du contrat d'intégration n'est que l'une des multiples modifications apportées au cours des dernières années aux lois françaises en matière d'immigration. Il s'agit de l'un des thèmes de prédilection du président, Nicolas Sarkozy, qui avait soulevé de vives critiques durant la campagne présidentielle de l'année dernière en annonçant son intention de créer un ministère de l'Immigration et de «l'Identité nationale».

Le ministre responsable, Brice Hortefeux, un collaborateur de longue date du président, multiple les annonces à ce sujet en insistant sur la nécessité d'en arriver à un «juste équilibre» entre flux migratoire et intégration. Il a mandaté récemment une commission qui planche sur une nouvelle politique de quotas visant à définir, au préalable, combien de titres de séjour doivent être octroyés par région, voire par pays.

Le gouvernement souhaite modifier ses politiques pour favoriser l'immigration économique au détriment de l'immigration familiale, actuellement prédominante.

Le virage en cours s'accompagne, par police interposée, d'une forte pression sur les immigrants illégaux. L'approche musclée des autorités est décriée par les organismes communautaires. «L'étranger est le bouc émissaire. On ne va pas jusqu'à dire que tout ce qui ne va pas est de sa faute, mais c'est ce qui est suggéré», dit Bernard Aubrey, du Groupe d'information et de soutien des immigrés.

Une étude européenne, parue en début de semaine, indique que la France est désormais l'un des pays ayant les politiques d'obtention de la citoyenneté les plus restrictives du continent.

La Grande-Bretagne serre la vis aux immigrants

La Grande-Bretagne serre la vis aux immigrants


Source : Cyberpresse.ca

Les beaux jours des immigrants en Grande-Bretagne sont comptés. Dans un climat où l'immigration a le dos large, le gouvernement britannique a décidé de serrer la vis. Que ce soit pour obtenir un permis de travail ou la citoyenneté, les arrivants feront bientôt face à une course à obstacles, avant même d'arriver à la ligne de départ.


C'est l'heure de la collation en ce matin de février à l'école secondaire pour filles Tolworth, dans la banlieue londonienne de Surrey. Des adolescentes trottinent, serrant contre elles leur sac, rose de préférence. Une élève d'origine indienne en tire une autre par le bras. Deux Asiatiques à lunettes discutent discrètement dans un coin.

Le visage culturel de l'école change. Et cela cause de sérieux maux de tête à la directrice, Clarissa Williams. Elle manque de moyens pour répondre aux difficultés d'apprentissage des enfants allophones. Elle reçoit 7000$ des deniers publics pour cette clientèle, alors qu'il lui en coûte 60 000$ par année.

«J'ai dû gratter à droite et à gauche pour trouver cet argent, dit-elle. La semaine dernière encore, nous avons reçu deux nouvelles élèves, une du Sri Lanka et une autre d'origine pakistanaise. On ne peut pas les renvoyer, il faut leur trouver une place. Nos dirigeants ignorent à quel point notre situation est critique.» Mme Williams est aussi vice-présidente de l'Association des directeurs d'école britanniques.

Critique certes, et pas seulement à Surrey. Car dans 1300 écoles au pays, la majorité des élèves ont une autre langue maternelle que l'anglais.

La surenchère

«Des emplois britanniques pour les travailleurs britanniques», a promis le premier ministre Gordon Brown en septembre dernier. Une telle formule aurait choqué l'opinion publique il y a à peine cinq ans. Plus maintenant.

Autrefois tabou, l'immigration est devenue un sujet chaud. Ou plutôt, les problèmes qui lui sont attribués, à tort ou à raison. Pas une semaine sans que les tabloïds n'accusent les immigrants de voler des emplois ou de recevoir des allocations pour leurs enfants vivant à l'étranger. Près de 70% des Britanniques jugent le gouvernement trop mou en la matière.

Depuis 2004, l'immigration nette oscille autour de 200 000 personnes par année. Et un nombre équivalent de sans-papiers disparaissent dans la nature.

Downing Street a cédé à ce climat de surenchère. Gordon Brown a annoncé le mois dernier qu'il ajouterait quelques haies dans la course à la citoyenneté. Bientôt, il ne suffira plus pour les étrangers de travailler et payer leurs impôts pour obtenir le passeport britannique. Ils devront aussi prouver qu'ils s'intègrent bien à leur communauté, en pratiquant le bénévolat ou en faisant des dons à des oeuvres de charité.

Au pied du mur

C'est toutefois l'adoption d'un système d'immigration à points, semblable à celui du Canada, qui inquiète les défenseurs des immigrants. Les candidats seront admis au pays seulement s'ils obtiennent un nombre suffisant de points. Ceux-ci seront attribués selon l'âge, le revenu, la scolarité et la spécialisation. La première phase, qui vise les immigrants hautement qualifiés, a débuté le 29 février. Le reste du système, touchant d'autres types de travailleurs, sera introduit progressivement au cours de l'année.

L'expert Habib Rahman croit que cette politique est fondée sur des principes racistes. «Ce sont surtout les Indiens et les Africains qui écoperont puisque les Européens n'ont pas besoin de visa pour travailler ici», explique le directeur d'un groupe de pression en faveur de l'immigration, le JCWI.

Pour la majorité des 49 000 immigrants hautement qualifiés déjà au pays, la situation est catastrophique. Car le gouvernement a déjà commencé à appliquer le système de points à ceux qui renouvellent leur visa. Or, selon ses critères sévères, 90% d'entre eux devront plier bagage.

Victor Abegunde en fait partie. Le Nigérian de 37 ans avait quitté un bon poste dans une banque pour repartir à zéro en Grande-Bretagne. Pour démontrer son engagement, il avait vendu sa maison et ses actions.

Après un an au pays, il s'est vu refuser la reconduction de son permis de travail en avril 2007 chez son employeur. Motif? Son salaire de 50 000 $ et ses qualifications n'étaient pas assez élevés.

Sans le sou, le père de famille se sent acculé au mur. «Je me sens trahi par le gouvernement britannique, explique-t-il. J'ai sacrifié tant pour venir ici! Mon ancien employeur au Nigeria ne veut pas me reprendre. Je peux être déporté à tout moment.»

Il garde tout de même espoir. Un groupe de défense des droits des immigrants, le HSMP Forum, tente de démontrer que le gouvernement ne peut pas changer les règles du jeu pour les travailleurs déjà au pays.

Aux yeux de Keith Best, directeur d'un service de consultation juridique pour les immigrants, la Grande-Bretagne glisse vers la xénophobie. «Le débat sur l'immigration est devenu trop émotif, dit-il. Il faut éviter qu'une partie de la population devienne le souffre-douleur national. C'est ce qui était arrivé aux Juifs en Europe, avant l'Holocauste, au début du siècle dernier.»

dimanche, mars 16, 2008

Canada : Loi sur l'immigration: des changements «inquiétants»

Loi sur l'immigration: des changements «inquiétants»

Hugo De Granpré

La Presse, Ottawa

Un projet de loi déposé hier et qui fera l'objet d'un vote de confiance à la Chambre des communes donne un pouvoir discrétionnaire beaucoup trop grand à la ministre de l'Immigration, disent des spécialistes du domaine.

La ministre Diane Finley a introduit des amendements à la Loi sur l'immigration et le statut réfugié dans le but officiel de réduire les listes d'attente de demandeurs. Actuellement, plus de 800 000 personnes attendraient une réponse du gouvernement canadien, parfois depuis aussi longtemps que quatre, cinq ou six ans.

Si elles étaient adoptées, ces mesures donneraient à la ministre le pouvoir de donner des instructions pour le traitement des demandes. Mme Finley, ou ses successeurs, pourraient par exemple restreindre le nombre de demandes à traiter par année, ou déterminer quelles catégories seraient traitées, et dans quel ordre.

«Notre objectif principal est d'amener plus d'immigrants ici, et de les amener plus rapidement», a déclaré Mme Finley lors d'un entretien téléphonique avec La Presse.

L'avocat montréalais Joseph Allen et la directrice du Conseil canadien pour les réfugiés, Janet Dench, approuvent cet objectif. Ils craignent cependant que la discrétion accordée à la ministre - de fixer ses «instructions» elle-même et par règlement - ne soit dangereuse.

«La discrétion ministérielle a toujours été un aspect que les avocats n'aiment pas. On préfère faire affaire avec des critères qui sont établis et auxquels nous pouvons nous attendre qu'ils soient respectés quand nous faisons nos demandes», a déclaré Me Allen, président de l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration.

Selon ces deux experts, l'élément le plus inquiétant est le fait que la ministre ait placé les demandes pour motifs d'ordre humanitaire sous cette nouvelle discrétion.

«Je me demande jusqu'à quel point le ministère profite de l'ouverture de cette loi pour glisser cela en même temps. Je ne vois pas vraiment le rapport avec le point principal, qui est de gérer les demandes économiques», s'est questionnée Janet Dench. Elle a ajouté qu'une fois cette discrétion introduite dans la loi, elle le serait pour tous les ministres et gouvernements à venir.

Les partis d'opposition ont eux aussi critiqué les amendements à la loi sur l'immigration. La députée néo-démocrate Olivia Chow craint que le gouvernement ne favorise dorénavant certains intérêts économiques au détriment de la réunification familiale par exemple. «La manière de réduire cette liste est d'augmenter les cibles d'immigration, d'annuler les coupes et d'engager plus de gens dans les bureaux de visas outre-mer», a-t-elle affirmé.

Le chef libéral, Stéphane Dion, a qualifié ces nouvelles mesures d'arbitraires et susceptibles d'engendrer des abus. Il a ajouté que son parti ne pourrait appuyer ce projet de loi dans sa forme actuelle. Mais il a refusé d'aller jusqu'à dire qu'il s'en servirait pour provoquer des élections. «Ça peut vouloir dire provoquer des élections, mais ça peut vouloir dire aussi que nous manifestons notre désaccord et que nous attendons un autre moment pour provoquer des élections», a-t-il dit.

La ministre Diane Finley, de son côté, a balayé toutes ces critiques d'un revers de main. Elle a précisé que son premier objectif serait de s'attaquer aux dossiers inactifs qui bloquent le système.

À terme, Mme Finley espère réduire l'attente à une moyenne d'un an, ce qui équivaut à réduire la liste d'attente à maximum 400 000 demandes, dit-elle. Par contre, elle est restée vague sur la manière dont elle comptait s'acquitter de ses nouveaux pouvoirs, une fois la loi adoptée.

Le projet de loi C-50, qui plus globalement vise à mettre le budget en oeuvre, fera son chemin à travers la procédure normale d'adoption des lois au Parlement. Il devrait être étudié de manière plus détaillée en comité d'ici quelques semaines.

Il faut enfin noter que ces changements toucheront le Québec de manière indirecte, puisque les demandes d'immigration sont faites par le ministère de la province. Une approbation du fédéral est toutefois nécessaire une fois l'acceptation québécoise reçue.

Par ailleurs, le Canada a accueilli 429 649 étrangers en 2007, «un nombre record», a annoncé hier le ministère canadien de l'Immigration.

Les avocats spécialisés se disent inquiets des lois immigration

Les avocats spécialisés se disent inquiets des lois immigration
Reuters

Réunis samedi à Nantes (Loire-Atlantique), une cinquantaine de militants associatifs et d'avocats spécialisés en droit des étrangers se sont déclarés inquiets des conséquences des dernières lois Sarkozy et Hortefeux en matière d'immigration.
"Avec trois lois en quatre ans, c'est un droit en perpétuelle évolution. Il faut sans cesse se remettre à jour, car la jurisprudence n'a pas le temps de se stabiliser. C'est un vrai nid à litiges." a expliqué à Reuters Marie-Cécile Rousseau, qui préside la commission sur les droits des étrangers du barreau de Nantes.

Lors de cette journée, les associations de défense des immigrés (Cimade, MRAP, Ligue des droits de l'Homme) ont fait état de "dérives" qu'elles disent avoir constaté sur le terrain.

"Les mairies doivent s'assurer de l'identité des étrangers qui viennent les voir, mais en aucun cas s'assurer de la régularité de leur séjour en France", a expliqué par exemple Pierre Jourdain, membre d'une coordination régionale Bretagne/Pays de la Loire d'aide aux immigrés.

"Pourtant, certains agents zélés feuillettent les passeports, et s'ils ne voient pas de visa, le signalent au procureur de la République", assure-t-il.

Cette réunion avait aussi pour objet de faire circuler les dernières décisions de justice entre les avocats spécialisés, qui ne sont pas légion au niveau national.

"Le droit des étrangers a longtemps été délaissé, car les litiges n'étaient pas intéressants et rémunérateurs. Mais aujourd'hui, le nombre de contentieux explose. Les étrangers sont en outre une population fragilisée, qui méconnaît ses droits", dit Marie-Cécile Rousseau.

Ces réunions annuelles existent depuis quatre ans à Nantes, et ont coïncidé avec la mise en place de la première loi CESEDA (Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile), dite "Sarkozy I". Cette dernière a été complétée le 14 novembre 2006 par une seconde loi, dite "Sarkozy II", et renforcée par la loi Hortefeux du 20 novembre 2007.

Ce dernier texte, qui introduisait la possibilité de recours à des tests ADN pour prouver un lien de parenté dans le cas d'une demande d'immigration liée à un regroupement familial, avait provoqué une vive polémique lors du débat parlementaire.

Guillaume Frouin

dimanche, mars 09, 2008

Immigration - Filles d’Abraham mise en ligne

Source : Secours Catholique : http://www.secours-catholique.asso.fr/actualitefrance_1472.htm

À l’heure où des sans-papiers sont expulsés, des femmes maghrébines et françaises cassent les préjugés et vont à la rencontre les unes des autres. À l’image du patriarche biblique qui laissait les quatre pans de sa tente ouverts pour accueillir les visiteurs, le groupe interculturel de Toulon, la Tente d’Abraham, ouvre ses portes aux personnes en attente de régularisation. Les mots d’ordre sont partage, tolérance et culture.

Tandis que le poste de musique diffuse des airs orientaux, Fatima écrit avec application sur le glaçage du gâteau “Aïd Mabrouk et Joyeux Noël”. Deux termes qui, au premier abord, semblent étranges mis côte à côte. L’un est la commémoration de l’obéissance d’Abraham à Dieu au point de sacrifier son fils, l’une des plus importantes fêtes musulmanes, l’autre célèbre la naissance de Jésus-Christ, événement majeur pour les chrétiens. Djellabas aux couleurs chatoyantes, caftans aux tissus soyeux ou karakous aux broderies scintillantes, une quinzaine de femmes ont revêtu leurs plus beaux habits traditionnels pour l’occasion. Aujourd’hui, à Toulon, Maghrébines et Françaises célèbrent avec le même enthousiasme l’Aïd-el-kébir au sein de la Tente d’Abraham. Créée à l’initiative du Secours Catholique avec l’Union diaconale du Var (UDV), Sichem une association d’accueil de l’étranger, et avec Aviso, organisme d’insertion par l’économie, la Tente d’Abraham est « un lieu de rassemblement et de rencontre interculturelle où Français et immigrés apprennent à se connaître », explique Catherine Martinez, présidente de la délégation du Secours Catholique du Var. Inauguré en novembre 2007, ce groupe de partage culturel possède trois pôles. Le premier s’adresse aux enfants dans l’objectif de rompre leur isolement. Solid’amitié, le deuxième pôle, est un groupe de jeunes en difficulté. Les jeunes, volontaires, s’occupent en particulier de l’animation des ateliers d’enfants et organisent des activités et sorties culturelles. Le troisième groupe, Hevra, dont la signification en hébreu est “rassemblement dans un but amical”, réunit une vingtaine de femmes en situation irrégulière et des Françaises. « Sous le nom d’Abraham, père de plusieurs peuples et personnage commun au judaïsme, à l’islam et au christianisme, nous partageons ensemble et apprenons à nous connaître », explique l’une d’elles.

Intégration. Commandement numéro un de l’Aïd-el-kébir : on ne doit pas jeûner en ce jour. Et les participantes comptent bien respecter cette obligation. Les plats s’accumulent au fil des heures dans la cuisine de la Tente d’Abraham. Salade de légumes, tajine de mouton aux pruneaux et aux abricots, cornes de gazelle et toutes sortes de pâtisseries maghrébines garnissent les tables dressées pour l’occasion. Un rêve commun unit ces femmes et leur donne la force de continuer : obtenir des papiers et s’installer de façon durable en France. Venues vivre dans l’Hexagone pour des raisons familiales, financières ou de santé, elles ont quitté la Tunisie, le Maroc, l’Algérie avec l’espoir d’obtenir un statut. Pour nombre d’entre elles, l’attente de régularisation est longue et insupportable. « Ne pas avoir de papiers et attendre ainsi nous tue à petit feu », confirme Saliha, 27 ans, diplômée en droit et marocaine. Même si elle se sent parfaitement intégrée à la société française, la jeune femme ne cesse de se poser cette question : « Jusqu’à quand l’Europe va-t-elle nous supporter ? Aidez-nous à rester dans notre pays ! » Dans la peur perpétuelle d’être reconduites à la frontière, Aziza, Souad, Latifa, Slama et les autres trouvent dans le groupe Hevra une parenthèse de paix et de joie dans leur existence cachée. « Être sans papiers est une humiliation totale. C’est comme si on était sur une barque sans rame, explique Souad, Algérienne de 43 ans. C’est dans ce groupe que j’ai sorti tout ce que j’avais sur le cœur. » Et Latifa de renchérir : « Ici, nous sommes un peu comme dans une famille. » Occasion de se décharger, de décompresser, de sortir de l’exclusion, de se sentir entourés, la Tente d’Abraham est avant tout une intégration à la société française par ces femmes.

Interculturel. Avant de commencer le repas, Fatima, ancienne sans-papiers et salariée de l’association, enseigne aux trente convives la signification de l’Aïd. À son tour, Isabelle explique la symbolique de la crèche. Sur cet échange culturel, le repas débute. À chaque plat, les femmes insistent auprès de leurs invités pour les resservir une, deux, trois fois… comme le veut la tradition orientale. Tandis que certaines se laissent tenter par une pâtisserie de plus, d’autres se lèvent et dansent sur des musiques orientales. Fabienne, bénévole du Secours Catholique, tente la danse du ventre. Chaque jeudi et lundi, les femmes du groupe Hevra se réunissent pour apprendre la danse orientale avec une professionnelle. Si ce n’est pas la danse, c’est la couture ou la cuisine. « Un projet de salon esthétique est sur le point de se réaliser, où nous pourrons nous occuper de nous-mêmes. Il y aura des ateliers pour la manucure, pour s’épiler les sourcils, gommer la peau et se faire coiffer », s’enthousiasme l’une d’entre elles.
Cuisinières chevronnées, les femmes organisent également des tables ouvertes où elles vendent leur cuisine pour 8 euros. « Cet argent leur permet de financer les sorties. Dernièrement, nous avons visité Saint-Tropez, explique Catherine Martinez. Nous réfléchissons également à une piste d’insertion avec un restaurant du monde. » Toutes les femmes ont maintenant rejoint la “piste de danse” tandis que le poste de musique tente, en vain, de couvrir les youyous traditionnels. Le Maghreb n’est plus loin...

Clémence Richard

dimanche, mars 02, 2008

Une convention pour les réfugiés et demandeurs d’asile

Source : Secours Catholique

Le 6 février 2008, l’association de promotion et de protection du droit d’asile, France Terre d’Asile, et La Poste ont signé une convention en vue d’améliorer l’accueil des demandeurs d’asiles et réfugiés dans les services de Poste.

Un homme se présente au guichet de Poste de sa ville. Il est haïtien. Il sort sa carte de réfugié et demande à retirer de l’argent sur son compte qui est largement approvisionné. Le préposé refuse d’accéder à sa demande à la vue de ses papiers. Une situation qui s’est souvent répétée à La Poste. Tant et si bien qu’au mois de juillet dernier, l’association France Terre d’Asile a saisi la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour les égalités (Halde). « La Poste ne reconnaissait pas systématiquement les titres de séjours temporaires, avec photo de l’intéressé, délivrés par les préfectures. Elle refusait parfois de remettre le courrier et d’ouvrir des livrets A pour les demandeurs d’asile », explique France Terre d’Asile dans un communiqué.

Partenariat. « La Poste est un interlocuteur privilégié pour les demandeurs d’asile et les réfugiés. » Les services de la Poste sont essentiels pour ce public. Ils leur permettent de percevoir les aides versées par les autorités françaises et de recevoir leurs courriers relatifs à la procédure de demande d’asile. France Terre d’Asile et La Poste se sont engagés à leur fournir l’accès à leurs droits et à améliorer les services postaux. La convention de partenariat signée par les deux organismes, le 6 février, permet au public concerné d’accéder librement aux services bancaires et postaux. Pour que le maximum de personnes concernées puisse en bénéficier, France Terre d’Asile a associé à cette convention d’autres organismes qui travaillent avec ce public.

Engagements. « Dorénavant les demandeurs d’asile pourront retirer leur courrier et leur argent que leur récépissé de demande d’asile soit valide ou pas, dès lors que l’identification du demandeur est possible », explique France Terre d’Asile. L’identification sera rendue possible grâce à l’accompagnement d’une personne accréditée par l’une des associations partenaires qui pourra attester de l’identité du demandeur. Ces derniers bénéficieront également d’une ouverture temporaire de livret A sur présentation d’un récépissé de demande d’asile en cours de validité ou d’une convocation Dublin avec photos. Le contact entre les bénéficiaires et la Poste sera également facilité par la désignation d’un bureau de poste référent. Des formations à destinations des personnes de la Poste sur les questions relatives aux demandeurs d’asile et aux réfugiés seront animées par France Terre d’Asile.

samedi, mars 01, 2008

Les Beurs : Des Français à part entière ou entièrement à part ?

«Je veux dire à ces enfants qui sont Français et qui croient souvent à tort, et quelquefois à raison, qu´une partie de la France les aime moins, je veux leur dire que personne ne sera jugé sur la couleur de sa peau ou l´adresse de son quartier». Nicolas Sarkozy, le 8 février 2008

par Professeur Chems Eddine Chitour

Le chef de l´Etat français a présenté, vendredi 8 février, son plan «Espoir Banlieue», axé sur l´insertion par le travail, la lutte contre l´échec scolaire et le désenclavement. Nicolas Sarkozy a également promis des renforts de police. Initialement, cette présentation aurait dû être faite depuis Vaux-en-Velin, aux côtés de la secrétaire d´Etat à la Ville, Fadéla Amara. Mais cette dernière s´est rendue seule dans le Rhône, le 22 janvier, se contentant d´en présenter les grandes lignes au risque d´accentuer l´impression d´impréparation. Surtout, la secrétaire d´Etat a été publiquement désavouée par sa ministre de tutelle, Christine Boutin, qui a déclaré ne pas croire en un "énième plan banlieue". Le plan «Espoir Banlieue» dévoilé par Nicolas Sarkozy s´ajoute, en effet, à une longue liste. Depuis le lancement du programme "Habitat et vie sociale", en 1977, ou la création de la politique de Développement social des quartiers (DSQ) et des zones d´éducation prioritaires (ZEP) en 1981, la politique de la ville en France a compté pas moins de 13 plans successifs. Le chef de l´Etat a souhaité un plan d´action concentré sur une centaine de quartiers prioritaires, autour de trois axes: l´insertion par le travail, la lutte contre l´échec scolaire et le désenclavement.

Nicolas Sarkozy a d´abord annoncé un toilettage du pilotage de la politique de la ville. Un conseil interministériel sera créé sous l´autorité du Premier ministre, et devra être "le lieu de suivi des décisions". Le chef de l´Etat a également appelé à "clarifier la chaîne des responsabilités". Il s´est engagé à ce qu´un représentant de l´Etat soit présent dans chaque quartier visé et a promis de conduire avec les élus locaux une réflexion sur la répartition des dotations aux collectivités. Nicolas Sarkozy s´est fait le chantre de la promotion de la diversité. A ce titre, il a rappelé avoir confié à l´ancienne garde des Sceaux, Simone Veil, la mission d´inscrire la garantie de ce principe dans le préambule de la Constitution. Le chef de l´Etat a également appelé la fonction publique à faire des propositions pour permettre la diversité, "à tous les niveaux".(1)

«J'assume!»
L´ancien ministre de l´Intérieur a aussi abordé la question de la sécurité. Nicolas Sarkozy a annoncé le déploiement de 4000 policiers supplémentaires dans les banlieues d´ici trois ans, plaidant pour "une police au plus près des habitants des quartiers". "Il y a dans ces quartiers un sang neuf pour la France". Pour ne pas le laisser dépérir, Nicolas Sarkozy a promis l´insertion par le travail. Le chef de l´Etat a ainsi annoncé la création d´un nouveau dispositif, baptisé "Contrat autonomie", pour accompagner vers l´emploi dans les trois prochaines années plus de "100.000 jeunes". "Chaque jeune qui le voudra aura ce contrat qui débouchera sur une formation, sur un contrat d´apprentissage ou sur un emploi", a-t-il affirmé. Le chef de l´Etat entend également favoriser la création d´entreprises dans les banlieues. Enfin, pour lutter contre l´échec scolaire, Nicolas Sarkozy a souhaité que les jeunes sortis sans diplôme du système "soient accueillis par une école de la deuxième chance". Le chef de l´Etat n´a pas craint de décréter cette proposition "priorité" de son quinquennat. Il s´agit donc de généraliser ces établissements qui ne sont actuellement qu´une petite poignée par académies, en leur permettant de bénéficier de la taxe d´apprentissage.(1)

Nicolas Sarkozy fait des banlieues un "enjeu de civilisation": "Nous allons réinventer la ville". Il convient enfin, qu´"il y a des quartiers dans notre pays où l´on a moins de droits et moins de chances que d´autres". "J´assume tout ce que j´ai dit et fait par le passé sur le sujet", a-t-il dit en référence à ses propos polémiques sur le "Kärcher" et la "racaille" avant les émeutes de 2005. De quoi s´agit-il? Voilà des jeunes Français en pleine errance identitaire qui peinent à s´en sortir. Ils vivent dans des ghettos appelés banlieues et de temps à autre en réponse à des contrôles fréquents ciblés- délit de faciès- et itératifs, qui finissent mal, du fait que souvent la police se sentant pousser du zèle -surtout ces dernières années- ils rentrent en éruption et flambent tout sur leur passage. On parle alors d´intifada des banlieues. Cette malvie touche même ceux qui font l´immense effort de s´en sortir. Même avec leur diplôme, leur nom de famille est un véritable calvaire qui plombe leur avenir.

Un petit coup d´oeil dans le rétroviseur pour nous rendre compte de la façon dont les ancêtres de ces Beurs sont traités chez eux. Etrange discours, en effet, la rhétorique sur la politique de civilisation bien ciselée et agréable à entendre sans plus. Nous avons des difficultés à comprendre cette hauteur de vue toute gaullienne et les positions pour le moins "colonialistes" du président Sarkozy à Dakar en juillet 2007: "Le drame de l´Afrique, c´est que l´homme africain n´est pas assez entré dans l´Histoire (...). Jamais il ne s´élance vers l´avenir (...). Dans cet univers où la nature commande tout (...), il n´y a de place ni pour l´aventure humaine ni pour l´idée de progrès.". Avec habileté, le président Sarkozy, écrit Prao Yao Séraphin, insulte la mémoire de nos ancêtres, en justifiant son refus de repentance. Pour lui, "le colonisateur est venu, il a pris, il s´est servi, il a exploité, il a pillé des ressources, des richesses qui ne lui appartenaient pas. Il a dépouillé le colonisé de sa personnalité, de sa liberté, de sa terre, du fruit de son travail. Il a pris mais je veux dire avec respect qu´il a aussi donné". Prao Yao Séraphin poursuit son plaidoyer en écrivant: L´heure est venue de repenser l´Afrique autrement qu´avec des rapports condescendants. Le locataire de l´Elysée gagnerait à lire Paul Bairock, pour qui le sous-développement est un phénomène historique, car "jusqu´à la fin du XVIIe siècle, les écarts dans les niveaux de développement économiques et techniques des divers pays étaient peu importants". C´est la colonisation qui a désarticulé et retardé notre développement".(2)

Ce colonisé n´en est pas pour autant sorti indemne des méfaits de la colonisation. La France a eu besoin des bras et du sang de ces "bougnoules" - René Naba pense que ce mot vient du mot "Abou Gnole", il semblerait que pour affirmer la bravoure des soldats indigènes, on leur donnait de la gnole et on les envoyait à l´assaut pratiquement ivres. C´est avec leur sang que les indigènes ont défendu Wissembourg en 1870, Verdun et le Chemin des Dames en 1917 et, plus tard, ils se distinguèrent sur les théâtres pendant la Seconde Guerre mondiale, Monte Cassino fut pris grâce au sacrifice des RTA et des Tabors marocains (Régiments des Tirailleurs algériens). Le colonisé n´en est pas pour autant quitte. Après 1945 et sous l´impulsion du Plan Marshall, il fallait reconstruire la France. Ces mêmes tirailleurs algériens et marocains, voire sénégalais, devinrent des tirailleurs béton, ils construisirent l´essentiel des infrastructures de la période des Trente Glorieuses. Ce sont justement les descendants de ces pionniers - naturellement analphabètes, la colonisation y ayant veillé - qui vont tenter de s´intégrer - en se désintégrant - dans une société qui leur ordonne de se dissoudre et de gommer leurs aspérités identitaires ou religieuses. Il vient que les discriminations subies par les descendants des colonisés, sont une triste et injuste réalité. Un rapport du Conseil économique et social en France révèle que, loin d´avoir disparu, les pratiques discriminatoires à l´égard des jeunes issus de l´immigration sur le marché du travail sont récurrentes et qu´"il existe une réalité extra-économique, non rationnelle".(3).

Les jeunes issus de l´immigration continuent d´être confrontés à des pratiques discriminatoires. L´exclusion du marché du travail reste la question la plus douloureuse. Une inégalité d´autant plus mal vécue qu´ils ont cru dans l´école et investi dans leurs études. Les discriminations à l´emploi se font, en effet, de plus en plus pesantes en France. Le "plafond de verre", bloque l´ascension sociale des jeunes Beurs, et se fait de plus en plus présent. "Les pratiques discriminatoires sont récurrentes et ont tendance à s´accroître". La transition professionnelle, définie comme le passage du système scolaire vers l´emploi stable, diffère selon la nationalité ou l´origine des jeunes, relève la chercheuse. "Pourtant, ces jeunes ont de meilleurs atouts pour l´accès à l´emploi que leurs parents, en raison de leur formation, des normes sociales acquises, et d´une manière générale, de leur meilleure intégration sociale dans la société. " Mais "il existe une réalité extra-économique, donc non rationnelle, au regard des exigences du marché du travail": à côté des critères utilisés pour tous les demandeurs d´emploi, entrent en jeu des "exclusions formelles" tacites et non reconnues, liées à l´origine ethnique des candidats. Cette réalité douloureuse est difficile à mettre en évidence. Il en ressort qu´à tous les niveaux, les enfants nés de parents immigrés sont handicapés dans leur accès à l´emploi. Mais surtout, les études n´ouvrent pas plus de perspective d´insertion. "L´analyse du taux de chômage par niveau d´études montre que le diplôme n´est pas aussi déterminant pour tous", insiste le rapport. Le taux de chômage des jeunes diplômés issus de l´immigration est le double de celui des jeunes nés de parents français. La discrimination repose plus sur un "faisceau informel d´apriorismes" que sur une orientation idéologique clairement formulée: les chefs d´entreprise, les chargés du recrutement affichent rarement une "préférence nationale". La sociologue Mouna Viprey détaille ainsi le processus classique de cette mise à l´écart: la forme "la plus commune consiste dès le premier stade pour l´employeur, à éviter tout contact avec le postulant d´origine étrangère réelle ou supposée, en lui déclarant que l´emploi est déjà occupé, alors qu´un candidat autochtone est convié à un entretien." Dans une deuxième phase, lors de l´entretien, il est "fréquent" qu´on exige d´eux des qualifications supplémentaires non demandées aux autres. Enfin, même quand un emploi est proposé à des jeunes issus de l´immigration, c´est "souvent"à des conditions moins intéressantes que celles offertes aux autres candidats. "Plus qu´au sein du monde professionnel, la discrimination semble s´exercer à son seuil", conclut la chercheuse.
Cette discrimination directe aboutit enfin à une autre, indirecte et masquée: celle, invisible, qui est pratiquée par les dispositifs d´accueil et d´aide à la recherche à l´emploi (ANPE, mission locale, CIO), qui poussent les jeunes Beurs à déployer des stratégies de contournement. Dans une étude effectuée en 1999 dans le bassin d´emploi de Roubaix sur les jeunes diplômés issus de l´immigration, qui a mis en évidence "une discrimination au faciès, permanente à l´embauche", le sociologue Saïd Bouamama explique que plus de la moitié des jeunes rencontrés se sont vu proposer de modifier leur prénom dans leurs démarches de recherche d´emploi. "Cette expérience est encore plus douloureuse car elle exige une autonégation identitaire", explique le chercheur. Enfin, le taux de chômage des cadres immigrés est deux fois plus élevé que celui de la moyenne de la population active nationale. Le problème de fond réside dans l´image que se fait le Français de souche de l´immigré africain ou arabe, surtout s´il est de confession musulmane. Frantz Fanon dans "Les Damnés de la Terre" avait raison d´écrire que le colonisateur utilisait un "langage zoologique" pour désigner l´indigène. Toujours comparé à un animal sauvage, sournois et dangereux, l´"Arabe" doit être pourchassé et souvent repoussé vers les confins pour assurer le triomphe des Français. C´est une "hyène" ou une "bête féroce" qu´il faut "refouler au loin" et rejeter "pour toujours dans les sables du Zahara (sic)", affirme Hain, fervent défenseur d´une politique brutale de déplacements massifs et forcés des populations d´Algérie. (...) Selon Sauclières, l´"indigène" est un "rapace" dont il faut se méfier, car ses attaques sont à la fois rapides et meurtrières. Sous la plume du capitaine Lapasset, il est un "animal" qui, "comme le chacal", ne s´apprivoise jamais. Pour le général Bugeaud, "les "indigènes" sont des "renards" que l´on doit "fumer à outrance" lorsqu´ils fuient dans des cavernes pour échapper aux armées françaises lancées à leur poursuite. (...)Face aux barbares qui font peser sur la civilisation une menace mortelle, tout est permis, puisqu´ils ne laissent d´autre alternative que de les détruire ou d´être détruits par eux". Bien plus tard, il s´est trouvé un ministre de "Gauche", pour traiter les descendants de ces indigènes de "sauvageons".

L'Autre
Les Beurs des banlieues fondent comme un essaim, qu´ils appartiennent à leurs tribus, qu´ils sont de zoulous, voire des apaches, bref tout un langage forgé par l´homme blanc pour désigner l´Autre qui lui est, par essence, inférieur et qu´il a mission de civiliser portant ainsi sa croix et son fardeau en tant qu´homme blanc ´The white man burden" de Kipling. Pourquoi ne rend-on pas justice à ces Français entièrement à part qui rêvent d´être des Français à part entière. La malvie actuelle des jeunes des banlieues plonge ses racines dans la nuit coloniale. Ce n´est pas, le croyons-nous, des mesures conjoncturelles et quelques saupoudrages loin d´un réel Plan Marshall qui, décidées d´en haut, règleront structurellement le problème de l´intégration de Français issus de l´immigration maghrébine ou d´Afrique noire. Le problème est justement un problème de civilisation: l´Homme blanc pense qu´il est seul producteur de sens. Pour cela, il a la posture du Shérif gardien de "l´ordre". Il est maître chez lui-même si les Beurs sont là depuis mille ans, on leur collera toujours le vocable, devenu péjoratif, celui d´être issus de l´immigration. Un Italien, un Portugais, voire un Hongrois, est rapidement intégré. Pourquoi? Une tentative de réponse consisterait à postuler qu´en définitive, c´est finalement un problème de civilisation qui fait que le corps social français n´absorbe pas des éléments allogènes à sa civilisation, sa culture et en définitive sa religion. Ceux qu´on prétend être "intégrés" seraient en fait, en pleine errance, ayant largué les amarres avec leur identité originelle, on leur impose une identité de rechange où ils seront toujours tenus en suspicion, malgré une allégeance douloureuse et des signes extérieurs d´acculturation.



1.Hugo Lattard. Sarkozy tente de redonner l´espoir aux banlieues. L´Expansion.com - 08/02/2008.
2.Prao Yao Séraphin: Quand Sarkozy déclare la guerre à l´Afrique: Président du Mlan [www.mlan.fr]url:www.mlan.fr Vendredi 14 Septembre 2007.
3.Rapport du Conseil Economie et Social. Le Monde 3.06. 2002.

Pr Chems Eddine CHITOUR
Ecole Polytechnique Alger
Ecole d'Ingénieurs de Toulouse



Mardi 19 Février 2008
vdida2003@yahoo.fr

vendredi, février 29, 2008

Rétention des étrangers : un exemple

Source : RESF, Réseau édution sans frontières

Témoignage Cour d’appel du 35bis (Paris) devant laquelle comparaissaient des sans papiers arrêtés lors de la rafle du 12 février dans le foyer du 13° de Paris (Le foyer TAC est le Foyer Terre aux Curés à Paris 13°). Voir l’article expliquant les faits survenus 12 février 2008 au petit matin.

Samedi 16 février, Cour d’Appel du 35 bis, 15h15 : je parviens à entrer dans la salle où doivent être examinés les dossiers de 25 personnes arrêtées au foyer TAC. Les audiences ont commencé vers 9h30 ce matin. 6 heures plus tard, 4 personnes seulement sont passées, et seuls 2 jugements ont été rendus, après des délibérés infinis. Cette attente va se répéter tout au long de la journée, alors qu’invariablement la décision sera la même pour tous les retenus, à une exception près. Les délais vont juste un peu se raccourcir en soirée.

Les avocats (3 commis d’office et une d’astreinte) font l’hypothèse qu’il s’agit d’une juge très peu expérimentée dans ce domaine, et qui n’ose donc pas « prendre de décisions courageuses. ». Aucun d’entre eux ne la connaît, l’avocat de la Préfecture, lui-même, bien rodé dans sa tâche et d’une assurance à toute épreuve ( « Je n’ai aucun état d’âme dans le cadre de ce travail ») voit cette juge pour la première fois.

D’autres choses vont d’ailleurs surprendre. Ainsi lorsqu’en pleine audience le téléphone portable de l’avocate générale sonne et qu’elle y répond, sans aucune remarque de la Juge. Une telle attitude relève du « jamais vu » pour l’une des avocates, et peut selon elle être interprété « comme un signe de mépris total à l’égard de ce qui se passe dans cette cour ».


Le contraste singulier entre une juge qui « marche sur des œufs » et l’avocat de la Préfecture à l’aise comme un poisson dans l’eau, va de toute évidence peser, tout au long de la journée, en la défaveur des retenus. Quelques exemples :


concernant ………………… : un moyen nouveau est soulevé par l’avocate, à savoir la contradiction flagrante entre 2 points de procédure :
- lors du PV de GAV, il est écrit « M. n’a pas souhaité prévenir un membre de sa famille » (alors que son père habite dans le même foyer)

- il a coché la case « je désire faire aviser M. ………………(son père) dans un délai de 3 heures. »

La présidente constate cette contradiction.

L’avocat souligne que le placement en rétention est donc illégal, la procédure étant irrégulière.

L’avocat de la Préfecture invoque alors l’article 74 : « la diligence a été faite dans les 3 h. Puisqu’il n’y a pas d’avis à famille c’est un PV de carence, ça signifie que le père n’a pu être joint. »

La juge questionne alors l’intéressé qui confirme avoir souhaité que son père soit prévenu. Elle ajoute comme si elle avait elle-même vérifié l’information : « les services de police ont cherché à joindre votre père et n’y sont pas parvenus ».

Ce que conteste l’intéressé : « A l’arrivée au CRA, j’ai demandé s’ils avaient réussi à joindre mon père. On m’a répondu qu’ils n’avaient pas essayé. »

La juge clôt le dossier avec un « Mais nous avons ici un PV de 21h, qui dit le contraire. »

Ordonnance confirmée.


concernant …………………. : l’avocat demande l’assignation à résidence car il dispose de garanties de représentation (quittances de loyer et pièce d’identité d’un compatriote ayant le même patronyme.)
L’avocat de la Préfecture s’y oppose, du fait que la quittance n’est pas au nom du retenu. Et pour cause puisqu’il s’agit d’un certificat d’hébergement !

La juge reprend cet argument inepte … l’avocat de la défense ne relève pas.

Ordonnance confirmée.


concernant …………………… : le PV d’interpellation ne porte pas la mention « placement en GAV » et « avisons le juge mandant. », ce qui est cause de nullité de procédure.
L’avocat de la Préfecture indique alors que le juge a été avisé globalement, « puisqu’il a été informé des 106 GAV ». L’avocat maintient qu’il y a irrégularité. Parade de la partie adverse : ce moyen ne figurant pas dans l’appel, la demande n’est pas recevable. S’ensuit une discussion incompréhensible entre avocats et juge, où sont cités les articles 74 et 563. Ordonnance confirmée.


concernant ……………………….. (dernier de la journée, dossier examiné après 23h30) : 2 moyens sont mis en évidence par l’avocat d’office :
- commission rogatoire trop vague

- violation de l’article 63-1 du CP relatif à la notification de la GAV, le PV indiquant que les droits de la GAV ont été lus par l’intéressé lui-même. Or précisément, il n’est pas en mesure de lire, en le comprenant, un énoncé de cette nature en français.

L’avocat de la Préfecture récuse ce moyen :

- « Il a indiqué qu’il lisait péniblement le français »

- « à défaut de le lire et de l’écrire il le comprend », ajoute la juge.

- « ceci n’a pas été mentionné par le premier juge » (pas trace de l’article 63-1 dans le procès du JLD)

L’avocat de la défense demande à la juge de mettre le retenu en situation d’avoir à lire quelque chose, celle-ci répond que « ce n’est pas utile ».

Ordonnance confirmée.

concernant …………………… : pour lequel l’avocat demande une remise en liberté, la Préfecture ayant le passeport et l’avocat présentant des justificatifs d’hébergement.
L’avocat de la Préfecture argue que le passeport ne peut être pris en compte puisqu’il est périmé, « le passeport étant un document trans-frontières, à partir du moment où il n’est plus valide, il ne peut être considéré comme tel et ne peut donc être accepté. » Il prie la juge de confirmer l’ordonnance et le maintien en CRA, « car la présence de ce passeport, même périmé, facilitera l’obtention du laisser passer auprès des autorités maliennes. »

La réalité de l’hébergement depuis 2004, chez une amie, est contestée au seul motif qu’il a « pourtant été interpellé au foyer AFTAM. »

Lorsque nous faisons remarquer à une avocate que ça ne constitue pas une preuve qu’il n’est pas hébergé par cette amie, nous recueillons un sourire narquois et condescendant.

Ordonnance confirmée.

concernant ………………………. . : entré en France en 1991, il était en règle en 2005. Détail que cela ! Ordonnance confirmée.

2 autres retenus comparaissaient aussi ce jour-là : un Algérien, ………………………. (le premier jugement ayant été rendu par la Préfecture de Créteil.) A l’énoncé de son lieu de naissance, (Rélizane), une militante de la LDH nous rappelle que cette ville de Kabylie a vu son nom immortalisé par un massacre terrible en 1998. Cet homme comparaît alors que son épouse (française) et sa mère sont dans la salle.
L’avocat demande la remise en liberté car il y a de solides garanties de représentation : l’épouse a notamment apporté les quittances de loyer. Mais pas le bail de location !

Alors que nul ne conteste la réalité de la vie commune de ce couple, il repart pour le CRA. Son épouse pleure. Sa mère, qui ne peut se résoudre à comprendre ce qui se passe, regarde autour d’elle, effarée.


Et un Turc, …………………… : l’avocate reprend les moyens invoqués lors du premier jugement : il a été placé en GAV puis en rétention avec APRF alors qu’il s’était présenté spontanément à une convocation au commissariat pour « affaire vous concernant ».
L’avocate rappelle que la CEDH a déjà condamné la France pour arrestation déloyale. En vain.

M. Ozan retournera lui aussi au CRA.

vient ensuite l’examen des 6 appels du Préfet, à la suite de 6 décisions de remise en liberté, prononcées par le tribunal d’Evry. Les intéressés ont préféré ne pas courir le risque de venir comparaître. Ils ne sont pas représentés par un défenseur : tous les avocats sont partis.
Moment de « justice confidentielle » : l’avocat de la Préfecture s’avance au plus près du bureau de la juge, et commence à lui parler à voix basse. La porte de la salle des délibérés (drôle de terme quand on y pense : la juge, étant seule, a du délibérer avec elle-même !) est ouverte avec les frappements réguliers du tampon de la greffière. Nous n’entendons à peu près rien de ce qui se trame.

Cette justice rendue en notre nom n’en a plus aucune des formes. Protester énergiquement, au risque d’être sorti pour outrage ?

Nous appelons la greffière revenue dans la salle, et lui faisons remarquer l’aberration de la situation. Elle va en faire état à la juge qui se reprend et demande à l’avocat de retourner plaider à la barre. Il s’exécute de mauvaise grâce, ce qui nous permet de l’entendre exposer son motif, dont il précise que, comme il est « identique pour les 6 dossiers, je ne plaiderai qu’une fois. » N’est-ce pas justement ce qu’avaient demandé les avocats de la défense le matin même, pour la même raison, et qui leur avait été refusé ? Cette fois-ci ce sera accordé.

Cette différence de traitement vient-elle du fait qu’il est plus de minuit ? Ou du fait que ce matin les avocats demandaient la mise en liberté de tous les retenus, alors que l’avocat de la Préfecture, lui, demande d’infirmer les 6 décisions de remise en liberté ?

La décision de 1ère instance sera confirmée et l’appel de la Préfecture rejeté. Maigre consolation....



Pendant tout ce temps, les retenus attendent dans une petite pièce.

Ils n’ont accès qu’aux toilettes et à une fontaine d’eau. Nous n’avons pas le droit de communiquer avec eux. A un moment nous demandons aux gendarmes qui les surveillaient de bien vouloir leur transmettre un peu de nourriture. Refus. Après le verdict, chacun est reconduit vers le CRA, à l’exception du seul libéré de la journée (sur les 21 qui se sont succédé, dont 19 arrêtées au foyer TAC). Pourquoi celui-là a-t-il été libéré ? Alibi pour tenter de faire croire au pékin moyen qu’il y a une « quand même une justice » ?

Tandis que pendant les pauses, en salle d’audience les avocats devisent, et à une heure avancée le ton se détend :

- "Ca va peut-être devenir habituel. Tous les lundis un autre foyer, et bien, comme ça on aura atteint les quotas au mois de mai !

- "Ils ont trouvé la poule aux oeufs d’or !"

- "Une opération comme ça c’est un travail incroyable, ce rythme n’est pas tenable si on veut que les dossiers soient impeccables"

Je questionne un peu plus tard l’une des avocates dans le couloir pour savoir si l’allusion aux « dossiers impeccables » est du ressort du pur cynisme, ou de l’humour noir : « Mais non, c’est vrai ! On est ici devant une procédure plutôt bien ficelée. Il y a relativement peu d’erreurs. »

Voilà qui a de quoi laisser songeur…

Avant de conclure, encore 2 remarques, qui sont aussi 2 interrogations :

- Sauf erreur de ma part, la question « y a-t-il une intervention volontaire du GISTI pour ce dossier ? » n’a été posée que pour 8 des 15 retenus. Pourquoi cela n’a-t-il pas été fait pour les autres ?

- et, toujours sauf erreur de ma part, 5 ou 6 seulement de ces 15 personnes ont été assistées par un interprète lors de cette audience. Ce qui, on peut le supposer, est préférable pour eux. Mais même dans ces cas-là, l’observation de ce qui se passe laisse parfois perplexe : en effet, de nombreux échanges ont lieu entre avocats et magistrat sans que personne ne considère utile d’informer l’intéressé de ce qui se dit à son sujet. Lorsque des questions ou des échanges sont traduits, c’est à la vitesse de la parole du locuteur initial. Et lorsque tombe la sentence, qui tient en 2 mots, il n’y a pas de commentaire, le retenu est reconduit, dans l’indifférence générale, vers la porte et –faut-il le rappeler ?- vers une probable expulsion, après un séjour plus ou moins long en prison (maximum 32 jours actuellement, durée qui risque de passer à 18 mois selon les projets qui seront examinés en mai prochain.)


Comment peut-on prétendre, comme n’a cessé de le répéter l’avocat de la Préfecture tout au long de la journée, que les sans papiers qui comparaissaient devant cette instance avaient « parfaitement compris l’étendue de (leurs) droits tout au long de la procédure », et que l’absence d’interprète à leurs côtés, dès le début de celle-ci, ne pouvait être considérée comme un vice de procédure ?

Quiconque aurait à vivre, en si peu de temps, une accumulation de traumatismes de cet ordre, aurait sans doute du mal à en prendre la pleine mesure et à interpréter correctement le sens de tout cela, quand bien même ses droits lui seraient énoncés dans sa langue maternelle (ce qui n’a été le cas pour aucun d’entre eux), le langage juridique n’ayant qu’une parenté lointaine avec celle-ci.


Ce même jour, l’un des avocats a fait remarquer à la juge qu’il était tout de même curieux qu’en la circonstance tant d’interpellés aient refusé globalement l’assistance, tant d’un interprète que d’un avocat et même d’un médecin. La juge non seulement en a convenu et déclaré que cela lui avait effectivement semblé bizarre, pour ajouter aussitôt « il ne m’appartient pas ici d’en chercher la raison. »


Se pourrait-il que cette raison soit économique ? Un dialogue entre l’un des avocats et une interprète laissait entendre que la Préfecture rechignerait à appeler les interprètes aussi souvent que nécessaire pour cause de budget. L’interprète a précisé que lorsque le traducteur est requis par la police, les factures sont adressées au Tribunal, parce que la Police dépend du Parquet ; alors qu’au CRA cela dépend de la Préfecture. Elle suggère de soulever le problème auprès du bâtonnier.


L’un des avocats remarquait que souvent les personnes arrêtées déclarent comprendre le français, parce qu’elles parviennent à se débrouiller dans les interactions quotidiennes. Et parce qu’elles considèreraient comme dévalorisant de dire le contraire, eu égard à la durée de leur séjour en France, et au fait que la maîtrise de la langue est à la fois un gage et une preuve d’intégration. Mais dans des circonstances comme celles-ci, leur intérêt est de comprendre le mieux possible ce qui se passe. Il paraît donc important de les inciter à demander un interprète.

D’autant plus que s’ils le demandent et ne l’obtiennent pas, cela pourrait constituer un vice de procédure ?


Marie-Odile Mougin
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jeudi 28 février 2008.

jeudi, février 28, 2008

Des sans papiers régularisés pour cause de travail

Article publié le 19/02/2008 par RFI

Les neuf cuisiniers en situation irrégulière, travaillant dans un restaurant parisien du groupe Costes, ont finalement obtenu gain de cause.

Les neuf cuisiniers africains sans papiers d'un restaurant de luxe parisien ont repris le travail, ce mardi, au terme de 5 jours de grève pour réclamer leur régularisation par leur employeur. La préfecture de police de Paris a accordé un titre de séjour à sept d'entre eux, les deux autres devraient être régularisés dans la semaine. Cette régularisation intervient dans le cadre de l'article 40 de la nouvelle loi sur l'immigration.

Cet article précise que des immigrés venus de pays en dehors de l'Union européenne peuvent être régularisés si leurs compétences professionnelles sont très recherchées. Or les sept cuisiniers sont de nationalité malienne et ivoirienne et la restauration est un secteur qui manque cruellement de personnel.

C'est une circulaire en date du 7 janvier 2008 qui a précisé au préfet les conditions précises d'attribution des cartes de séjour. Il y en a deux : il faut tout d'abord que les immigrés aient des qualifications et une expérience professionnelle dans un secteur en manque de main d'oeuvre. Or, les cuisiniers travaillaient dans le restaurant de la Grande-Armée depuis au moins deux ans, neuf ans même, pour certains.

La seconde condition est qu'un employeur s'engage à embaucher la personne immigrée pour un contrat d'une durée d'un an minimum ou dans l'idéal pour un CDI (contrat à durée indéterminée). Là aussi, les cuisiners répondaient aux critères puisque le gérant du restaurant avait précisé qu'il ferait toutes les démarches nécessaires pour embaucher ses salariés.

Pour le porte-parole des cuisiniers, Jean-Claude Amara, c'est une grande victoire qui ouvre la voie à la régularisation de milliers d'autres travailleurs sans papiers. Mais la circulaire du ministère de l'immigration est claire : ce dispositif ne doit concerner qu'un nombre très limité d'individus, les étrangers en situation irrégulière ont vocation à regagner leur pays d'origine.

mercredi, février 27, 2008

Immigration : impossible de comparer les chiffres d'un pays à l'autre

Immigration : impossible de comparer les chiffres d'un pays à l'autre
Source : Challenges.fr | 26.02.2008

Les pays européens ne comptabilisent pas tous de la même façon les flux migratoires et n'ont même pas une définition semblable du migrant.

Les pays européens ne comptabilisent pas tous de la même façon les flux migratoires et n'ont même pas une définition semblable du migrant, selon une étude publiée dans le dernier numéro de la revue Population et sociétés mardi 26 février.

Dans un article intitulé "Les migrations internationales en Europe : vers l'harmonisation des statistiques", l'auteur souligne qu'on ignore les chiffres de l'émigration et de l'immigration en 2005 pour 7 des 27 pays membres de l'Union européenne, selon l'organisme Eurostat. Il ajoute que "quand ces chiffres existent, ils ne sont pas toujours fiables et comparables d'un pays à l'autre".

Même chose pour la définition du migrant: certains pays ne prennent en compte que les séjours d'au moins un an, d'autres écartent les séjours universitaires ou professionnels, ou les demandeurs d'asile.

Cette disparité ne devrait toutefois plus perdurer, du fait du règlement européen (862/2007) de l'été dernier sur les statistiques communautaires sur la migration et la protection nationale. Ce règlement, qui a une valeur contraignante, demande aux pays européens de fournir des données identiques concernant les émigrations et immigrations (y compris des nationaux), permis de séjour, naturalisations, et demandes de protection (droit d'asile)...

254.000

Ainsi, les statistiques 2008 (établies en 2009) devraient être harmonisées pour l'ensemble de l'Europe.

Actuellement, la France comptabilise seulement l'immigration étrangère hors UE, chiffrée à 165.000 entrées pour l'année 2005. Selon l'auteur de l'article, Xavier Thierry, chercheur à l'INED (Institut national d'études démographiques), ce chiffre passerait à 254.000 si on utilisait les critères recommandés par l'UE, c'est-à-dire en incluant les sorties (émigration) ainsi que les mouvements des membres de la communauté européenne et des nationaux.

Télécharger L'étude de l'Ined

mardi, février 05, 2008

Le banquier n'est pas juge de la régularité du séjour de son client

La Poste ne peut refuser l'accès au compte et la délivrance d'un relevé d'identité bancaire, au seul motif que le récépissé constatant le dépôt d'une demande de statut de réfugié était périmé.
Com. 18 décembre 2007, FS-P+B, n° 07-12.382

Lors de l'ouverture d'un compte, l'établissement de crédit doit procéder à un certain nombre de vérifications : domicile et identité doivent être contrôlés conformément aux articles R. 312-2 et R. 563-1 du code monétaire et financier. Le postulant est alors tenu de présenter un document officiel portant ses photographie et signature. La loi n'ayant pas défini la notion de « document officiel », la jurisprudence est venue en donner une illustration au cas par cas. Ainsi a-t-il été décidé que la seule présentation d'une carte de séjour était insuffisante (Com. 3 avr. 1990, Bull. civ. IV, n° 105 ; Paris, 25 avr. 1997, D. Affaires 1997. 1154), de même qu'un certificat de réfugié politique (Paris, 17 févr. 1989, Gaz. Pal. 1989, 2, p. 521, obs. Piédelièvre), ou encore une carte d'identité périmée portant une adresse différente de celle que le client déclarait être la sienne (Civ. 1re, 2 nov. 2005, D. 2006. AJ. 62, obs. Avena-Robardet ; Com. 8 nov. 2005, JCP E 2006, n° 22, p. 959, obs. Salgueiro).

En l'occurrence, La Poste avait ouvert un compte livret A à une personne ayant demandé le statut de réfugié, sur présentation d'un récépissé constatant le dépôt de sa demande, valable jusqu'au 4 octobre 2002 et renouvelable. Ce récépissé comportait la photographie et la signature de l'intéressée. À partir du mois de mai 2005, cet établissement de crédit a toutefois refusé à sa cliente l'accès à son compte au motif que ce récépissé était venu à expiration et que l'identité de la titulaire n'était justifiée par aucun document en cours de validité. Cette pratique de La Poste est connue. En règle générale, elle n'accepte pas les titres de séjour périmés et peut refuser la restitution des sommes détenues sur un livret A (V. Migrants/étrangers en situation précaire, Guide Comede, 2008, p. 146 s.). Mais, en l'espèce, loin de se laisser faire, la cliente a demandé en référé la condamnation du banquier à lui donner accès à son compte sur présentation de ce récépissé, seul document dont elle disposait, et à lui délivrer un relevé d'identité bancaire. Ce que lui a refusé la cour d'appel de Paris, au motif que La Poste était tenue, sous peine d'engager sa responsabilité, de vérifier l'identité du titulaire du compte, non seulement à son ouverture, mais également durant toute la durée de son fonctionnement (Paris, 24 févr. 2006, JCP E 2006, n° 48, p. 2030, n° 12, obs. Salgueiro). Fort heureusement une telle décision est censurée par la Cour de cassation. La justification de l'identité ne doit pas être confondue avec la régularité du séjour.

Ici il n'existait aucun doute sur l'identité de la personne en question. La Poste avait elle-même considéré le récépissé, non périmé à l'époque de la demande d'ouverture du compte, comme valant pièce officielle d'identité. Elle n'avait exigé aucun autre document et justificatif et ne pouvait dès lors opposer à sa cliente le même récépissé, fût-il expiré, pour lui dénier l'accès au compte et la délivrance d'un relevé d'identité bancaire. Du reste, dans une décision du 16 mars 2005, le tribunal administratif de Paris a jugé que la procédure du droit au compte ne pouvait être subordonnée à la régularité du séjour du demandeur en France et que la Banque de France ne pouvait opposer un refus au postulant au motif qu'il ne disposait pas d'un titre de séjour en cours de validité (TA Paris, 16 mars 2005 n° 0502805/9, Rép. min. n° 65599, JOAN Q 22 nov. 2005, p. 10839 ; JCP E 2005, n° 50, p. 2147).

La Cour de cassation ne dit pas expressément qu'un tel récépissé vaut document officiel au sens des articles R. 312-2 et R. 563-1. Simplement, à partir du moment où une banque considère un document comme tel, elle ne peut plus, par la suite, lui dénier cette qualité pour lui refuser l'accès à ses comptes, l'identité ayant été préalablement établie et n'étant pas contestée.

Source : éditions Dalloz