Aux Etats-Unis, la querelle de l'immigration connaît une pause
LE MONDE | 26.05.06
Le Sénat américain a adopté, jeudi 25 mai, une réforme mesurée de l'immigration. Dans une atmosphère politique américaine d'ordinaire tendue et divisée, le Sénat est parvenu à un accord rassemblant des républicains et des démocrates.
La loi proposée reste dans l'esprit des mesures voulues par le président George Bush, qui souhaite l'accueil des immigrants et le renforcement des lois contre les illégaux. Comme le discours présidentiel, elle manie la carotte et le bâton. Le Sénat a approuvé le renforcement des frontières au sud du pays et l'envoi provisoire par le président des gardes nationaux, pour stopper l'immigration clandestine.
Mais l'Assemblée essaie de trouver des solutions pour les immigrés clandestins qui se trouvent déjà dans le pays. Plus de 11 millions d'immigrés illégaux vivent aux Etats-Unis - dont plus des trois quarts viennent d'Amérique latine et la moitié du Mexique -, où ils constituent une grande partie de la main-d'oeuvre dans des secteurs comme la construction ou l'agriculture.
Ceux qui sont présents depuis cinq ans pourront, selon le Sénat, demander la nationalité américaine, à condition de ne pas avoir été condamné et d'apprendre l'anglais. A l'occasion de ce débat, peu après la polémique sur l'hymne national américain repris en espagnol, le Sénat a adopté un amendement instaurant l'anglais comme langue nationale, tout en maintenant les mesures en faveur du bilinguisme instaurées dans de nombreux Etats. Le vote a été obtenu par l'alliance des démocrates et des républicains modérés comme John McCain, Lindsay Graham ou Arlen Specter. Mais aussi par des républicains plus conservateurs, comme le leader de la majorité au Sénat, Bill Frist, qui a voté en faveur du compromis, adopté par 62 voix contre 36.
UN VOTE DÉLICAT
L'examen du projet de loi par la Chambre des représentants, beaucoup moins portée sur le compromis, va être délicat. Fin 2005, les représentants avaient proposé une loi se limitant à verrouiller les frontières et à considérer l'entrée illégale sur le territoire américain comme un crime. Des millions de Latinos ont défilé dans plusieurs villes pour protester. Le débat s'annonce vif, d'abord lors de la conférence entre des membres du Sénat et de la Chambre des représentants pour essayer de trouver une position commune, ensuite à la Chambre elle-même, où les courants conservateurs du Parti républicain sont mieux représentés.
Le Parti républicain est fortement divisé entre ceux qui défendent "une nation d'immigrants", comme l'a rappelé George Bush lors de son allocution du 15 mai, et ceux qui redoutent une perte de l'identité américaine. Le renforcement des frontières annoncé par le président est jugé insuffisant par l'aile droite du parti pour laquelle l'immigration est devenue l'un des principaux chevaux de bataille. Les députés ont peur de perdre le soutien précieux de ces voix pour la prochaine échéance électorale en novembre, où la majorité républicaine est dans une position très fragile.
Alain Salles
Article paru dans l'édition du 27.05.06
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