Le Royaume-Uni en tête pour attirer les riches étrangers
Le Royaume-Uni multiplie les visas d'entrepreneur et d'investisseur pour les étrangers non européens.
Le Parlement européen s'inquiète d'une concurrence sans contrôle pour attirer les riches des pays émergents.
Dans la bataille que se livrent les pays occidentaux pour attirer les investisseurs et les entrepreneurs des pays émergents, Londres marque des points. Les obtentions de visas d'entrepreneur et d'investisseur, qui sont destinés aux non-Européens et ont été aménagés en faveur des plus riches par le gouvernement de David Cameron, se multiplient. La barre des 1.000 personnes se voyant accorder chacun de ces sésames est en train d'être franchie (voir graphique ci-contre).
Jill Turner, qui dirige l'équipe immigration intraentreprise du cabinet d'avocats Pinsent Masons, évoque même une sorte de « rêve britannique » comme il y a un « rêve américain ». « Il y a vingt ans, ces gens rêvaient d'obtenir la Green Card pour aller dans la Silicon Valley, mais aujourd'hui Londres est perçue comme aussi excitante », explique-t-elle. Selon elle, le succès de ces visas s'explique certes en partie par la fermeture d'autres voies d'immigration pour les non-Européens. Mais elle ajoute que les Chinois, les Pakistanais, les Russes et les Américains sont aussi attirés depuis plus d'un an par la vigueur retrouvée de l'économie ainsi que par un environnement entrepreneurial favorable outre-Manche.
Julia Onslow-Cole, qui dirige le département immigration chez PwC Legal, fait le même constat. Elle s'attend à une poursuite de la tendance « car le monde reste incertain et ces gens sont attirés par la stabilité politique et économique du Royaume-Uni ».
Outre-Manche, ces visas ne sont pas sans créer quelques controverses. Les visas d'entrepreneur, accordés à ceux qui sont prêts à investir au moins 200.000 livres dans une entreprise, ont attiré des fraudeurs. L'inspecteur en chef des douanes, John Vine, a ainsi dénoncé en septembre le manque de rigueur dans le traitement des dossiers par le ministère de l'Intérieur. Il a expliqué que beaucoup de ces visas étaient indûment accordés à des étudiants souhaitant rester en Grande-Bretagne. « Il fallait prouver qu'on avait l'argent à disposition mais il n'y avait pas de contrôle pour savoir s'il était effectivement investi », note un avocat. Depuis janvier 2013, les candidats à ce visa doivent détailler un « business plan », ce qui, selon Julia Onslow-Cole, a permis de réduire substantiellement les candidatures frauduleuses.
Cela dit, la concurrence est récemment devenue plus dure pour attirer l'argent des riches étrangers - entrepreneurs ou investisseurs - et de leurs familles. Au point que les députés européens doivent voter aujourd'hui pour une « résolution » qui demande à la Commission européenne, en tant que gardienne des traités, de se pencher sur la façon dont les Etats monnaient des permis de résidence ou même des nationalités à des citoyens de pays tiers.
La citoyenneté peut-elle se vendre ?
A priori, la Commission européenne n'a aucune voix au chapitre. Seuls les Etats sont compétents pour dire qui sont leurs résidents et citoyens. Mais la volonté de Malte (400.000 habitants) de donner la nationalité maltaise et, donc, l'accès aux 28 pays européens contre 650.000 euros a mis le feu aux poudres et profondément choqué. « Une citoyenneté ne se vend pas », rappelle Véronique Mathieu Houillon, députée UMP. Dans leur résolution, les députés rappellent que, si les Etats sont souverains, ils sont censés respecter les valeurs communes européennes, où la nationalité n'est pas donnée en fonction de la richesse de la personne.
Malte se défend en soulignant que son programme est limité à 1.800 demandes, soit une goutte d'eau dans le flot des nationalisations des 28 pays membres. Et de promettre une vigilance absolue pour vérifier la moralité des demandeurs et l'origine de leurs fonds. Néanmoins, l'île est le premier pays à promettre une nationalité sans y accoler aucune obligation de résidence effective sur le territoire. Or, avec le principe de libre circulation des personnes, un passeport pour l'un des pays de l'Union équivaut à un passeport pour 28 Etats. Hier soir, la commissaire à la Justice, Viviane Reding, a donc rappelé aux Etats membres qu'ils devraient donner la nationalité à des personnes qui ont un lien réel avec leur territoire et qu'ils doivent le faire en pensant à l'engagement d'une coopération sincère entre les Etats membres.
A Malte, on estime que la plupart des Etats ont des programmes plus agressifs. Le Portugal, l'Espagne (lire ci-contre), Chypre et la Grèce ont des régimes pour accorder des permis de résidence sous certaines conditions d'investissement. Les Pays-Bas ont fixé la barre la plus haute à 1,25 million d'euros d'investissement. La Lettonie, la Hongrie sont moins chères : 250.000 euros. Dans la plupart des pays, une condition de résidence est toutefois réclamée. Outre-Manche, il faut près de cinq ans de présence pour obtenir la résidence permanente, sauf lorsqu'on a investi plus de 5 millions ou créé au moins 10 emplois, auxquels cas trois ans suffisent. Enfin, il faut encore un an de résidence permanente pour devenir citoyen à part entière.
Débat sur les visas
Au Royaume-Uni, les visas d'investisseur sont proposés à ceux qui peuvent investir au moins 1 million de livres. Ils font débat parce qu'ils offrent un traitement de faveur aux immigrés qui ont de l'argent. De plus, il est possible d'investir cet argent en obligations d'Etat, qui peuvent être ensuite cédées en empochant les intérêts.
Une commission doit faire des recommandations le mois prochain pour que l'argent investi bénéficie davantage au pays et à son économie.
Les visas d'investisseur pourraient être mis aux enchères ou on pourrait demander aux candidats d'investir dans des hôpitaux ou des écoles.
Les enjeux sont importants : depuis 2011, ceux qui investissent plus de 5 millions de livres ou plus de 10 millions peuvent demander le droit de résidence permanente après trois ans ou deux ans dans le pays, au lieu de cinq ans.
Une commission doit faire des recommandations le mois prochain pour que l'argent investi bénéficie davantage au pays et à son économie.
Les visas d'investisseur pourraient être mis aux enchères ou on pourrait demander aux candidats d'investir dans des hôpitaux ou des écoles.
Les enjeux sont importants : depuis 2011, ceux qui investissent plus de 5 millions de livres ou plus de 10 millions peuvent demander le droit de résidence permanente après trois ans ou deux ans dans le pays, au lieu de cinq ans.
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