vendredi, janvier 29, 2010

L'immigration légale a baissé en France en 2009

Le Monde, édition du 20.01.10

La crise économique n'a eu qu'un impact limité sur l'immigration professionnelle hors Union européenne


L'immigration légale est en recul en France en 2009. Dressant, lundi 18 janvier, à l'occasion de ses voeux à la presse, le bilan de son action un an après sa nomination à la tête du ministère de l'immigration, Eric Besson s'est félicité d'une « meilleure maîtrise » des flux migratoires. 173 991 titres de long séjour ont été délivrés en 2009 soit une baisse de 3,7 % par rapport à 2008, a-t-il indiqué. Cette baisse de l'immigration légale, qu'elle soit économique ou familiale, s'explique en partie par les effets directs ou indirects de la crise économique.

Détaillant ces chiffres, M. Besson a affirmé que l'augmentation des titres délivrés aux étudiants ( 1,9 %) et aux réfugiés ( 12 %) était compensée par la poursuite de la baisse de l'immigration familiale (- 12,3 %) et par la diminution de l'immigration professionnelle (- 15,3 %). « Tous les indicateurs disponibles montrent que les flux migratoires, légaux comme illégaux, ont globalement baissé en 2009 », a insisté M. Besson, tout en soulignant que cette baisse était « liée, comme dans toute l'Union européenne, à la crise économique mondiale et à la détérioration de la situation de l'emploi ».

Selon le ministre, l'immigration professionnelle passe de 33 034 titres de séjour délivrés en 2008 à 27 966 en 2009 et enregistre ainsi une baisse sensible de - 15,3 %. « Cette diminution, a souligné le ministre, constitue une inversion de tendance par rapport à l'année précédente, qui avait connu une augmentation de 22,4 %. » Le nombre de titres de séjour délivrés à titre professionnel en 2009 reste ainsi supérieur à celui de l'année 2007.

La baisse sensible de l'immigration économique mise en avant par M. Besson doit toutefois être nuancée. Elle s'explique par le fait que les chiffres du ministère comprennent les ressortissants des nouveaux Etats membres de l'Union européenne (Roumanie, Bulgarie) qui restent encore soumis, pour une période transitoire, à l'obligation de détenir une carte de séjour pour travailler.

Selon un bilan statistique précis de 2009 établi par l'Office français de l'immigration et de l'intégration et que s'est procuré Le Monde, le nombre de Roumains et de Bulgares venus s'installer en France pour y travailler a connu un net recul (- 25,1 %), passant de 6 040 en 2008 à 4 584 en 2009. A contrario, les entrées de travailleurs en provenance des pays hors Union européenne (UE) et hors saisonniers ne reculent que de 6,5 % (25 904 en 2008, 24 221 en 2009).

« La crise a surtout un effet sur les flux migratoires économiques au sein des espaces de libre circulation, analyse Jean-Christophe Dumont, de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). En effet, plus la circulation est libre, plus l'ajustement à la conjoncture se fait de façon importante. » Hors saisonniers et hors UE, le recrutement de travailleurs étrangers se stabilise plus qu'il ne baisse, à l'exception notable des contrats temporaires dont le nombre a chuté de moitié pour s'établir à 4 374.

L'impact de la crise sur l'immigration économique hors Union européenne reste donc limité. Il semble en revanche plus marqué pour l'immigration familiale. « L'expérience des crises passées montre que le regroupement familial peut être retardé en période de crise, l'étranger présent en France craignant de ne pouvoir assumer le surcoût de la venue de son conjoint ou de sa famille », souligne M. Dumont.

Au-delà de la crise, le recul des entrées en France en 2009 s'explique plus, pour M. Dumont, « par les changements de politiques intervenus ces dernières années que par l'évolution du contexte économique ». Dans le cas de l'immigration familiale, la baisse s'explique également par les mesures des lois sur l'immigration de 2006 et 2007 qui ont durci les conditions de venue des familles (hausse du niveau de ressources autorisant le regroupement familial, allongement du délai pour un Français avant de faire venir son conjoint étranger...).

Dans le cas de l'immigration économique, la venue de travailleurs étrangers a été facilitée par des assouplissements de procédure institués par la loi Sarkozy de 2006 et mis en oeuvre fin 2007. « Il existe des besoins économiques structurels qui traversent la crise et le fait que le recrutement de salariés étrangers soit désormais facilité a sans doute permis d'y répondre », explique M. Dumont, observant que la France n'a pas, à la différence d'autres pays de l'OCDE, pris de dispositions spécifiques visant à restreindre l'immigration économique du fait de la crise. Globalement, la part des entrées pour motif économique (hors saisonniers) sur l'ensemble des flux demeure faible : de fin 2008 à fin 2009, elle s'est maintenue autour de 14 %.

Quant à l'immigration irrégulière, Eric Besson a confirmé lundi 18 janvier, que 29 288 étrangers en situation irrégulière avaient été reconduits à la frontière en 2009. Un chiffre en recul de 1,7 % à celui affiché par son prédécesseur, Brice Hortefeux, en 2008 (29 799), mais supérieur à l'objectif de 27 000 que lui avait assigné le chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy.

Laetitia Van Eeckhout

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