La part des russes, des ukrainiens et des chinois qui décident de s'installer dans les pays de l'OCDE s'accroît
Après plusieurs années de hausse, les migrations internationales à destination des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) se sont stabilisées en 2003. C'est l'un des constats fait par l'organisation internationales dans son dernier rapport sur «Les tendances des migrations internationales», rendu public le 23 mars. Dans un contexte où l'immigration devient un enjeu majeur des prochaines années, notamment pour une Union européenne (UE) à la population vieillissante, cette nouvelle pourrait être de mauvais augure. En réalité, elle n'est que le reflet de la modification des politiques migratoires entreprise dans la plupart des pays développés.
Ce sont avant tout les flux de demandeurs d'asile qui ont fortement diminué. Ainsi dans l'Union à quinze, le nombre de demandes d'asile a chuté de 25 % durant l'année 2004. De même, les migrations liées au regroupement familial ont été freinées dans un certain nombre de pays riches. En revanche, les migrations à des fins d'emplois, notamment qualifiés, constituent une part croissante de la mobilité internationale des personnes depuis une dizaine d'années. En 1994, la proportion d'étrangers ayant une formation supérieure était de 20 % au Royaume-Uni et de 12 % en France. Entre 1994 et 2002, cette catégorie a représenté 53 % des entrées au Royaume-Uni et 33 % des entrées en France.
Signe de cet attrait pour les cerveaux venus d'ailleurs, l'augmentation, «spectaculaire» selon l'OCDE, des entrées et des effectifs d'étudiants étrangers. Entre 2001 et 2003, le flux d'étudiants étrangers a crû de plus de 36 % au Royaume-Uni, de 30 % en France et de 13 % en Australie. Le nombre d'étudiants étrangers a atteint 165 000 en 2002, soit le double des entrées comptabilisées en 1998. Seule exception, les Etats-Unis, qui ont vu le nombre d'étudiants étrangers baisser de 26 % en raison notamment d'un contrôle accru de l'immigration après les attentats de 2001.
Autre enseignement relevé par l'OCDE, la prédominance des migrations de «proximité» et celles résultant de liens historiques traditionnels. On assiste à un accroissement des migrations en provenance de Roumanie en Hongrie et en Italie, de Pologne et de Turquie en Allemagne, du Maghreb en France, de Chine en Australie, en Nouvelle-Zélande et au Japon, ou encore d'Allemagne en Suisse et en Autriche.
Le rapport souligne également l'importance prise par certaines nationalités dans les flux migratoires : les Russes et les Ukrainiens (y compris dans les pays non européens de l'OCDE) ainsi que les Chinois et les Indiens. Les Russes constituent désormais la septième nationalité parmi les immigrants au Japon et la troisième en Allemagne, les Ukrainiens la première au Portugal et la dixième aux Etats-Unis. Les ressortissants chinois sont quant à eux identifiés parmi les dix premières nationalités dans la moitié des vingt et un pays considérés. La part des Chinois et des Russes dans les flux d'entrées est supérieure à celles qu'ils représentent dans les effectifs de la plupart des pays de l'OCDE.
Enfin, les travaux des experts de l'organisation internationale tordent le cou aux craintes d'une invasion des pays qui ont rejoint l'UE le 1er mai 2004. «Dans les trois pays - Royaume-Uni, Suède et Irlande - qui ont décidé de ne pas imposer de restrictions à l'accès de leur marché pendant la période de transition, l'afflux des travailleurs de l'Est n'a pas eu lieu», analyse Jean-Pierre Garson, chef de la division des migrations internationales à l'OCDE. Entre mai et décembre 2004, au Royaume-Uni, 133 000 ressortissants des pays de l'élargissement ont fait une demande de permis de travail. Mais sur ce total, 40 % vivaient déjà sur le sol britannique avant le 1er mai 2004. «Il s'agit davantage d'une sorte de régularisation des travailleurs provenant de ces pays que du signe d'une «invasion˜», souligne M. Garson. Une tendance qui devrait rassurer la plupart des quinze pays déjà membres de l'UE qui, par «précaution», avaient décidé de ménager une période de transition de deux à sept ans avant d'ouvrir leur marché du travail aux ressortissants des «nouveaux adhérents».
Le Monde, du 30.03.05
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